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La Convention des Nations Unies contre la corruption internationale, adoptée à New-York le 31 octobre 2003
Publié le 15 juin 2009 par Gopal
Le 4 septembre 2006 est paru le décret portant publication au J.O. de la Convention des Nations Unies contre la corruption, signé le 31 octobre 2003 à New-York. Cette Convention dite de Merida a été adoptée par l'Assemblée Générale de l'O.N.U le 31 octobre 2003. Au mois de juin 2006, elle était signée par 140 Etats (ainsi que par la Communauté Européenne) et ratifiée par 52. Il s'agit du premier instrument mondial, entré en vigueur le 14 décembre 2005, qui énumère des mesures à entreprendre par chacun des Etats signataires pour lutter contre la corruption. Si le décret a le mérite de rendre effective en droit français la Convention, c'est bien cette dernière qui appelle quelques observations. La corruption peut se définir comme l'agissement par lequel une personne investie d'une fonction déterminée sollicite ou accepte un don, une offre ou une promesse en vue d'accomplir, retarder ou omettre d'accomplir un acte entrant d'une façon directe ou indirecte, dans le cadre de ses fonctions. Ainsi qu'en atteste régulièrement l'organisation non gouvernementale Transparency International dont le but est de lutter contre la corruption, il s'agit d'une infraction internationale n'épargnant aucun pays et dont les victimes sont tant les Etats que les personnes privées ou les entreprises, leurs dirigeants ne pouvant se désintéresser des conditions dans lesquelles sont conclus les marchés à l'étranger au risque d'être poursuivis, par exemple, pour corruption d'agents publics étrangers. Selon des estimations minimales, les sommes versées dans le cadre de la corruption représentaient, en décembre 2003, environ un trillion de dollars américains sur les 33 trillions de dollars du produit mondial brut, a fait observer le directeur chargé de la gouvernance à la Banque mondiale, Monsieur Daniel Kaufmann. Décidée à lutter contre ce fléau mondial, l'Assemblée Générale des Nations Unies a créé, en décembre 2000, un comité spécial chargé d'élaborer un instrument juridique international efficace contre la corruption. De janvier 2002 à octobre 2003, le comité a négocié cette Convention. C'est dans ce contexte qu'en juin 2003, les chefs d'Etat et de gouvernement du G8 ont décidé d'un plan d'action pour lutter contre la corruption. Ce plan exprimait leur engagement à « contribuer de manière active à l'aboutissement d'une Convention des Nations Unies contre la corruption qui devrait inclure des mesures de prévention efficaces ainsi que des mécanismes solides de coopération en matière pénale et de recouvrement des avoirs». La Convention de l'O.N.U. s'inscrit dans le cadre des nombreux accords internationaux de lutte contre la corruption qui l'abordent chacun sous un angle particulier, tels que : - la Convention de l'O.C.D.E sur la lutte contre la corruption d'agents publics étrangers dans les transactions commerciales internationales du 17 décembre 1997, ratifiée par la loi n°99-424 du 27 mai 1999, - la Convention pénale sur la corruption du 27 janvier 1999 et la Convention civile sur la corruption du 4 novembre 1999 du Conseil de l'Europe, signées par la France et ratifiées par les lois n°2005-103 et 104 du 11 février 2005. - la Convention de l'Union Européenne relative à la lutte contre la corruption impliquant des fonctionnaires des Communautés européennes ou des Etats de l'Union, adoptée le 26 mai 1997 et la Convention relative à la protection des intérêts financiers des Communautés Européennes du 27 novembre 1995, - la décision-cadre du Conseil du 22 juillet 2003 relative à la lutte contre la corruption dans le secteur privé. Ce nouveau texte onusien est, lui, global. Il traite de tous les aspects relatifs à la lutte contre la corruption : prévention, incrimination, règles de droit pénal et de procédure pénale, coopération internationale, recouvrement d'avoirs, assistance technique et échange d'informations. La Convention fournit une base juridique aux Etats en matière d'entraide judiciaire pénale et d'extradition et renforce la coopération internationale dans les domaines de la prévention et de la répression de la corruption. La Convention onusienne a, en effet, pour objectif : « - de promouvoir et renforcer les mesures visant à prévenir et combattre la corruption de manière plus efficace ; - de promouvoir, faciliter et appuyer la coopération internationale et l'assistance technique dans le domaine de la prévention de la corruption et de la lutte contre cette dernière, y compris en matière de recouvrement d'avoirs ; - de promouvoir l'intégrité, la responsabilité et la bonne gestion des affaires publiques et des biens publics ». La convention s'attache à édicter des mesures préventives précises et énumère, en outre, l'ensemble des actes que les Etats doivent incriminer concernant, notamment, les agissements de corruption d'agents publics nationaux, étrangers ou d'organisations internationales publiques, de détournement de biens par un agent public ou de blanchiment du produit d'un crime et de recel. Les Etats doivent également permettre la confiscation, le gel et la saisie des instruments et des produits des infractions prévues. S'agissant des infractions de soustraction de fonds publics et de blanchiment du produit de cette infraction, la Convention prévoit la restitution des biens confisqués à l'Etat requérant, principe inédit en droit international et satisfaisant pour les pays du Sud. L'adhésion de la France aux différents traités de lutte contre la corruption a déjà nécessité des adaptations du droit qui est aujourd'hui compatible, dans sa grande majorité, avec les dispositions de la Convention. Il conviendra que le législateur modifie les articles 435-3 et 435-4 du Code pénal qui s'appliquent exclusivement au champ de la convention de l'O.C.D.E. pour des actes de corruption active d'agents publics étrangers et de fonctionnaires. Le champ des infractions prévues aux articles 433-3, 434-8, 434-15, qui incriminent les entraves au bon fonctionnement de la justice nationale, devra également être étendu aux faits visant à perturber le fonctionnement de l'institution judiciaire d'un autre État. Il reste à espérer que les règles de la Convention favorisent la coopération internationale et encouragent à consacrer les ressources nécessaires pour assurer que la lutte contre la corruption soit menée avec efficacité.