Hier soir, j’ai vu deux films : Ultimate Game et … Ultimate Game. Bon, en fait on était deux : si j’ai vécu ce film comme un ratage agaçant, mon compagnon de salles obscures s’est réjoui de ce joyeux nanar comme on les aime. Récit de cette double expérience.
Expédions d’abord l’histoire : « dans un avenir pas si lointain » (dans le texte) Kable/Gerard Butler fait partie de ces condamnés à mort qui ont accepté de se faire contrôler à distance – comme des marionnettes, mais en Wifi – par des gamers dans des combats à mort. Il reste 3 combats à notre tas de muscles avant la liberté, seulement voilà: le grand patron du jeu, Ken Castle/Michael C. Hall, l’homme le plus riche du monde, veut faire disparaître ce héros gênant…
Bay qui ferait du Azimov
Dès la deuxième scène, on sent que le duo de réalisateurs Neveldine/Taylor a l’ambition de faire plus qu’un film d’action bourrin. Après un premier combat à rendre Michael Bay épileptique, on a en effet le droit à l’interview du fameux Ken Castle. Séquences courtes à l’extrême, gros plans flous sur des objets indéterminés, caméra – littéralement – à l’envers, nous voici plongés au cœur de la société post-moderne. En une émission de deux minutes on estime avoir fait le tour du sujet Ken Castle, un homme qui a compris comment contrôler une personne à distance et en a profité en lançant « Les Sims » en version réelle, des humains contrôlant d’autres humains. Fort de ce filon, il a logiquement lancé la version mortelle du jeu : le Counter Strike Réel.
A ce moment du film, l’espoir naît : une réflexion intelligente est-elle en train de s’amorcer? Une société où la moitié des gens paie pour contrôler la seconde moitié. L’univers des « Sims », censé être la réalisation de tous les fantasmes des joueurs, est une horrible place où chacun se comporte de façon grotesque, sans aucune limite. Le bonheur des joueurs dépend des protagonistes, mais ces derniers ne sont pas pour autant récompensés : lorsqu’une travailleuse « sims » avoue son métier devant l’assistant social, la garde de sa fille lui est retirée. Dans le monde post-moderne de Ultimate Game, le JT est présenté par un couple habillé en clubbers, qui fume et s’extasie devant la bêtise de ces pirates qui osent dénoncer cette société déviante. On réalise alors que si tout cela est si mal filmé, c’est bien sûr pour souligner le mal-être et la décadence de cet univers futuriste. Bravo messieurs Neveldine et Taylor, vous avez éveillé l’attention de l’audience, approfondissez désormais.
Et bien, n’est pas Azimov qui veut, car la suite est navrante d’incohérences et de ratés. Les personnages sont dans un concours d’inconsistance, dont la gagnante est largement la journaliste : si la première moitié du film elle se comporte en rapace intraitable du scoop, elle se transforme ensuite en bon samaritain qui sauve nos héros in extremis. Risible. Quant à la résistance, censée être le cœur de ce type de film, est montrée durant cinq brèves minutes puis remise au placard au profit d’une grosse scène de bourrinage.
Les scènes d’action, parlons-en : une fusillade de jeu vidéo, a priori une longue séquence sans coupe, est ici réduite à une succession de plans où l’on voit des membres et des gerbes de sang voler, sans nous laisser la possibilité de comprendre quoi que ce soit à la scène. Les règles de cet « Ultimate Game » ne sont elles mêmes pas claire : qui combat qui, qui sont ces automates qui se promènent sur le champ de bataille, il semblerait que les scénaristes ne se soient pas embarrassés de ces détails.
Tant d’inconsistance ruine toute tentative de faire un film crédible. Un haltérophile qui fait la gueule à l’effort, ce n’est pas agréable à regarder. Lorsque sa tentative lui permet de soulever son poids on lui pardonne ses grimaces, mais quand la barre reste au sol il a simplement l’air d’un con.
Kaboom !
Le bon nanar des familles
Mon voisin de fauteuil, lui, a compris comment voir ce film : en cessant de bêtement réfléchir devant chaque scène, on pourra voir dans Ultimate Game un bourrinage plutôt ridicule mais qui fait bien rire, dans la droite lignée du Running Man interprété par Schwartzenegger. Et où les rares moments de grâce couronnent ou daube honorable.
Au final, ne vous laissez pas tromper par quelques tentatives pour crédibiliser le tout : en allant voir Ultimate Game il FAUT débrancher son cerveau, sinon ça ne passe pas.