Chères et chers collègues de l’ASPU,
Deux mois ont passé depuis que j’ai été arbitrairement enfermé dans ce quartier de « haute sécurité ». Actuellement nous sommes 73 détenus (sur une population de 6102 prisonniers), isolés dans cette zone de la prison nationale modèle, qui peut être considérée comme étant une « prison dans la prison », éloignée des autres cours et où nous n’avons droit qu’à une heure de soleil par jour.
Ici, je partage le sort non seulement de commandants guérilleros mais, aussi de narcotrafiquants reconnus et de chefs paramilitaires qui comme « Zeus » et « Niche » sont accusés d'être les auteurs de nombreux massacres d’hommes, de femmes et d’enfants sans défense. Heureusement, ces derniers se trouvent à un étage différent.
Dans mon dossier on ne m’accuse pas d’avoir massacré des paysans à la tronçonneuse, de même que l’on ne m’attribue pas l’assassinat de jeunes provenant de secteurs populaires présentés ensuite comme des « faux positifs » ; on ne m'impute pas de traitements cruels, inhumains et dégradants contre qui que ce soit; et on m’accuse encore moins de crime contre l’humanité : au contraire, on m’accuse « d’incitation au terrorisme » pour avoir dénoncé ces faits et dévoilé la responsabilité de l'État colombien et des Forces armées dans ces crimes: Je suis accusé d'être un terroriste car je soutiens dans mes écrits dans des forums publics, que les FARC sont une réponse historique aux multiples violences de l'État, parce que dans ce pays, il y a un décret présidentiel disant qu’il n'existe pas de conflit armé, bien que le nombre de déplacés par la violence dépasse déjà 4 millions de personnes.
Par le passé ce même genre d’accusations avaient été portées contre des professeurs universitaires renommés comme le sociologue Alfredo Correa, qui avait été accusé d'être un « idéologue des FARC » ; dans ce cas les fausses inculpations provenaient d'informations fournies par les organismes mêmes de renseignement de l'État, concrètement du DAS [Département Administratif de Sécurité], institution qui dépend directement de la Présidence de la République. Bien que son innocence ait pu être confirmée durant son procès, le droit à la vie ne fut pas garanti au professeur Correa : quelques semaines après sa libération, il était assassiné dans les rues de Barranquilla.
Malheureusement, cette politique de harcèlement contre l’université colombienne n'est pas une chose du passé, au contraire elle s’est amplifiée avec la mal nommée politique de « sécurité démocratique ». William Javier Díaz est un exemple de ces machinations, membre du Taller de Formación Estudiantil Raíces [TJER-Atelier de Formation Estudiantine Racines], qui pendant plus d’une décennie a développé des séminaires sur la pensée sociale à l'Université Pédagogique et à l'Université de district « Francisco José Caldas », avec l’aide d’universitaires et de chercheurs reconnus, aujourd'hui il est victime d'un même montage juridique, par lequel, selon la base de sombres archives d'un ordinateur soi-disant saisi sur la guérilla, il est présenté comme un militant des FARC.
L'université, qui est le centre par excellence de la production et de la circulation de la pensée critique, ne peut pas céder à cette intimidation, en se protégeant derrière une supposée neutralité de la théorie, ni en s’abritant dans la tour d'ivoire d'une connaissance d'experts étrangère à tout engagement avec la réalité sociale, les libertés de la pensée et de l'expression - le professeur universitaire également militant des droits humains, Héctor Abbé Gómez, écrivait - « C’est un droit durement conquis par des milliers d'êtres humains à travers l'histoire, un droit que nous devons conserver. L'histoire démontre que la conservation de ce droit requiert des efforts constants, souvent des combats, et parfois, des sacrifices personnels ».
Malheureusement, cette politique de harcèlement contre l’université colombienne n'est pas une chose du passé, au contraire elle s’est amplifiée avec la mal nommée politique de « sécurité démocratique ». William Javier Díaz est un exemple de ces machinations, membre du Taller de Formación Estudiantil Raíces [TJER-Atelier de Formation Estudiantine Racines], qui pendant plus d’une décennie a développé des séminaires sur la pensée sociale à l'Université Pédagogique et à l'Université de district « Francisco José Caldas », avec l’aide d’universitaires et de chercheurs reconnus, aujourd'hui il est victime d'un même montage juridique, par lequel, selon la base de sombres archives d'un ordinateur soi-disant saisi sur la guérilla, il est présenté comme un militant des FARC.
De cette manière l'État projette de nous punir et de punir tous ceux qui considèrent que les étudiants doivent être en contact permanent avec les problèmes sociaux non seulement du passé mais aussi du présent ; que les futurs professionnels doivent rester en contact avec les tenaces et dures réalités d'un pays continent qui semble aujourd'hui se réveiller après des années de léthargie.
L'université, qui est le centre par excellence de la production et de la circulation de la pensée critique, ne peut pas céder à cette intimidation, en se protégeant derrière une supposée neutralité de la théorie, ni en s’abritant dans la tour d'ivoire d'une connaissance d'experts étrangère à tout engagement avec la réalité sociale, les libertés de la pensée et de l'expression - le professeur universitaire également militant des droits humains, Héctor Abbé Gómez, écrivait - « C’est un droit durement conquis par des milliers d'êtres humains à travers l'histoire, un droit que nous devons conserver. L'histoire démontre que la conservation de ce droit requiert des efforts constants, souvent des combats, et parfois, des sacrifices personnels ».
En Colombie, l'Association Syndicale des Enseignants Universitaires a été un instrument de défense de ce droit, en préservant par son combat l’« alma mater » [c’est-à-dire l’Université, du lat. mère nourricière, NdT], non seulement des barbares qui prétendent la faire taire en recourant à la violence et à la menace, mais en faisant face à la politique néolibérale qui cherche à l'asphyxier.
Depuis ces quatre murs qui emprisonnent mon corps, mais pas ma pensée, je veux vous faire parvenir l’expression de mes sincères remerciements pour vos gestes de solidarité et de ma conviction que dans ce combat nous arriverons à nos fins, pour que dans le pays la pensée puisse circuler librement et qu’elle ne soit pas menacée par ces insensés qui aspirent à faire revivre les temps de l'inquisition, en condamnant au bûcher ceux qui comme nous expriment des idées et des opinions différents.
Accolade fraternelle.
Miguel Ángel Beltrán Villegas
Cárcel Nacional Modelo. Pabellón de Alta Seguridad
[Prison Nationale Modèle. Quartier de Haute Sécurité]
Bogotá, le 20 juillet 2009
Source TLAXCALA .....le site Basta! ........et Pétition en ligne