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Les premiers brouillards ont recouverts la vallée. Annonce des premières froideurs. La nature, soumise se prépare à entamer une nouvelle mutation.
La page est blanche, mais les mots vont venir doucement, sans bruit, sur la pointe des pieds et l’homme va enfin pouvoir exprimer ce trouble qui l’envahit depuis si longtemps.
Longtemps. Ce mot qui évoque autant l’impatience que l’attente qui peut parfois être évocatrice de joies comme de malheurs.
Mais l’homme sait que la joie ne fait plus partie de son univers depuis bien longtemps. Chaque composante de son corps meurtri rejette systématiquement ce sentiment qu’il perçoit comme une atteinte à la recherche de son expiation.
Il dégage ce sentier tortueux, écarte d’un geste rageur les éclairs de soutien qui se dresse brutalement devant lui. Il est un explorateur qui avance dans la jungle muni d’une machette tranchante. Les lianes du bonheur, les lianes de l’amour, de l’affection sont sectionnées et exposent leur souffrance de n’avoir pu stopper cette marche rageuse.
L’homme pourrait encore se retourner. Faire le chemin inverse. Revenir vers une normalité qu’il a soudain quitté.
Son esprit fragile, au cours des quelques instants de lucidité que celui-ci lui accordait, était traversé en de courts instants d’une lumière éblouissante, tellement éblouissante qu’il ne pouvait la déchiffrer. Etait-ce un signe ? Etait-ce un appel au retour à la vie ?
Le mal qui le rongeait était si puissant qu’il estompait toutes réflexions rationnelles.
Les yeux de l’homme brillaient, fixaient un point imaginaire. Un point en forme d’ombres flottantes qu’il essayait de saisir, mais ces formes s’esquivaient, l’évitaient et augmentaient ainsi sa rage et son désespoir.
Une de ces formes se faisait plus présente. Elle lui rappelait une personne qu’il avait connu autrefois. Une petite forme noire et brillante. Celle-ci avait moins peur de lui. Elle s’approchait parfois à le toucher et cela le faisait frémir de terreur.
Il devait trouver un moyen terrasser cette vision aux yeux noirs et d’où des larmes s’écoulaient et glissaient le long de joues ridées. Des sons lui parvenaient, résonnaient dans sa tête. Il voyait s’ouvrir et se fermer la bouche de la forme.
Un éclair de chaleur, une boule de feu traversa son cœur et la certitude qu’il lui fallait détruire cette forme lui apparût comme une délivrance.
Calmement, il se dirigea vers la remise.
Il revint avec l’instrument qui le sauverait.
La forme était toujours là.
Les larmes coulaient toujours.
La bouche s’ouvrait et se refermait de plus en plus vite, émettant des sons aigus qui vibraient dans sa tête.
Il leva la lourde hache et l’abattit sur la petite forme noire. Il frappa, frappa.
La forme reposait au sol. Il se pencha sur elle, il savait qu’il l’avait vaincue.
Et il reconnut sa mère.
PS : Fiction inspirée d’un fait divers.