Le verrou de FragonardNormalement j'ai gagné un baffe ou un coup de pied dans le siège de mes pensées.Valérie est forte, experte en provocation et je ne suis peut-être pas de taille......- 10 ans de perdu au bout de vacances pourries, la rentrée en solo. Je me retrouve sur le mercato à 40 balais. C'est Céline d'un coup de joystick, alors ton afghanne....Elle me renvoie sans savoir à ma décennie passée, ma sortie des ténèbres de Juliette et le soleil de Muryel bien mal récompensé par une Fabrina qui tombe à pic.Je retrouve un peu d'empathie. Je cherche dans mon spicilège personnel la phrase toute faite, l'aphorisme qui tue, le bout de roman passe partout. Je ne vois que Louis Ferdinand et son "Voyage au bout de la nuit". Il y a tout dans Céline.J'envoi:"-quelqu'un qui t'aide à traverser ta nuit....."- ne me parle pas de Céline!"Oups! elle connait.Et moi je me suis connu plus subtil: Céline avant d'être le pseudo d' Auguste Destouches c'est surtout son ex, et ça saigne encore.- excuse-moi.Tu veux parler c'est ça?- prête moi tes oreilles et dis pas de conneries.- si t'en fait pas, j'en dis pas. On roule comme ça?- oui! Je me faite manipulée, trompée alors tu pourrais être sympa"Elle a séché ses larmes et retrouvé de la combativité, alors la thérapie du coup de pied au cul a fonctionné. Par contre je n'ai pas envie de connaître l'historique: Toutes les histoires d'amour finissent en histoire de chaussettes sales."- Elle a changé, Célinereprend-elle.- elle est partie avec une autre, c'est ça?- UN autre!"La trahison est double. Sa distance avec les hommes va devenir de la haine."- moche en plus, du bide, des gosses déjà tout fait. J'y comprend rien.- remonte aux origines, comment était -elle quand elle t'as plu, comment tu étais, toi.- en pleine galère, comme elle."deux misères ne font pas un bonheur.......durable mais je le dis pas.- elle a changé, mais toi aussi- elle a arrêté le sport et repris la clope.Tiens, comme la "mienne"- une rechute- pour la clope, je m'en fous mais devenir hétéro- si elle est heureuse..- et moi, j'ai rien vu venir- que veux tu qu'elle fasse, t'envoyer un faire part: J'ai besoin d'un homme, des enfants. Elle refume, elle change, des signes tout ça.Quand tu as des problème tes rencontres ont les mêmes problèmes, c'est pour ça que vous vous plaisez.Puis y en a un qui change, l'autre qui ronronne, sans rien voir....- c'est ma faute, c'est ça!- non, tu ne plus agir sur Céline. Par contre t'installer dans le doute et la culpabilité de l'autre, ça va pas t'aider pour tes propres travaux de reconstruction. Agis plutôt que subir.- ça a l'air facile pour toi- parce que je n'ai pas le nez dedans, sinon on est pareil- "on" les hétéro tu veux dire- Les histoires d'amour, le quotidien,les hommes, les femmes, les gouines, les pédés.... C'est dur de se dire que l'histoire qui te déchire est banale.Tu montes le "Tourmalet" à vélo, t'en chie comme c'est pas possible, pour toi c'est un exploit, d'autre se le font au petit déjeuner avant d'aller bosser.- question d'entrainement- c'est ça- j'ai pas envie de m'entrainer à me faire larguer - pas du tout tu vas redevenir une prédatrice, retrouver l'instinct,la sensibilté- séduire, s'habiller, se maquiller, mentir- la vigilance, le meilleur de toi, le talent de l'acquisition, de la conquète- je préfererai celui de la conservation - c'est le plus dur. Il te faut un personnage de transition- je connais, d'ailleurs je commence à croire que je lui ai servi de transition.- on est toujours le salaud de quelqu'un dis- je un peu à cours- et toi ton petit bonheur hétéro, ça tourne?- tranquille, elle m'a rendu fidèle- comme un chien? Elle est souvent dans les Landes, non"un peu de perfidie comme ça ni vu, ni connu. ça glisse.Elle a un drôle de regard."- Monogame si tu préfère"Vraiment un regard étrange.Fabrina n'est pas parfaite: elle n'ouvre jamais un bouquin, elle pense que "Zadig et Voltaire" est un magasin de fringues et Candide, une marque de lait, mais depuis le "Goût des autres" je me méfie du mien. Pourquoi serait-il plus légitime que le sien?Elle suit le cour de la tomate et connaît le prix de l'essence, c'est beaucoup plus essentiel que de savoir que le tempo du "Boléro" est devenu celui de la pub pour un assureur et que "Juanita, banana"ressemble à la "Traviatta". Cela, je le garde pour moi et mime avec une main horizontale et l'autre perpendiculaire en dessous: Temps mort.Elle a tout essayé, Val: la séduction,la flatterie, le dénigrement, la jalousie."- Et tes textes quand vas tu te décider à les mettre dans l'ordre, le rendre lisible et les relier entre eux?relance-t-elle." L'émulation. Je l'avais oublié ce truc. La variante de la jalousie: Elle écrit un peu, elle aussi. Elle me cherche. elle veut jouer à celui qui à la plus grosse. J'esquive: "- il y a des fautes qui traînent, des mauvais accords de participe, des accents mal placés. Il faut tout reprendre. Un jour une femme le fera. Ou pas....- je peux m'en occuper si tu veux."C'est vrai qu'elle est prof."- j'ai dit une fem...."Trop tard, le lapsus est lâché. Sorti d'un subconscient de beauf sur fond d'irritation que j'oppose bêtement à sa troublante insistance.Elle a le même regard que tout à l'heure.Elle se fait muette, relevant une jambe comme on relace un soulier sans se baisser. A ceci prés qu'elle n'a pas de chaussures. Elle n'a plus de culotte non plus, puisqu'elle est en train de la retirer. Deux index glissent sur ses hanches emportant sur son passage le tissu triangulaire. Son geste descend doucement emportant les deux remparts de sa pudeur et de ma résistance qui vient de prendre un coup de semonce.Puis ce flamand rose unijambiste et gracieux dépose son cerceau de dentelle, se redresse et comme l'échassier, déploie ses ailes, retire son marcel. il se mèle à tous ça un peu d'artificieldes monts et des merveilles qui ont un gout de miel...Et cette odeur de bergamotte....Hynoptisé par ses petits seins invulnérable à la pesanteur et ses hanches étroites, j'appelle ma morale et le chef des incorruptibles au secours, mais il n'y a pas de réseau.Dans un contre feu dérisoire, honteux de la réduire à une taille de bonnet, je fais des comparaisons stupides de mensurations et de senteurs. Il est vrai que la nicotine par rapport à la bergamotte.....La double culpabilité est dans mon camp. De ma bévue et de ma passivité complice auxquelles j'additionne la mesquinerie.Dans un grand moment de solitude, je la laisse s'approcher sans peur mais pas sans reproche. Ce n'est pas moi, c'est Alex. Moi, je suis hermétique.Valèrie et son arme fatale, Vestale dans mon vestibule, sait ouvrir une porte, pénétrer avec effronterie et sans effraction et cette porte n'est pas celle d'une chambre forte.Glissant sa main sous mon peignoir, elle trouve la poignée et s'en saisit.Je suis en redalert un peu trop tardive. Il n'y a pas que l'alerte qui est raide.J'ai du tomber sur la partie masculine du couple Val/ Céline: Elle me plaque sur le canapè et me renverse. Se glisse entre mes jambes et les ouvre. S'empare de mes chevilles et retourne mon bassin. Je suis comme une tortue les quatre fers en l'air. L' intelligence de ses mains et leur ubiquité capture le petit oiseau qui vient de sortir dans sa précieuse cage. Ses mains reprennent mes malléoles, impriment un mouvement de balance, pas celle qui trahit ou qui pèse, celle qui va et qui vient.Il y a son éloquence et mon renoncement à nos corps qui se parlent. J'abandonne mon statut de mâle à cette femelle virile et offensée, entreprenante, vengeresse et vénéneuse.Aux changements d'allures, de phases lente redoutable d'efficacité en accélérations d'une douce brutalité de cette forme saphique qui ondule et mène la danse, j'ai franchi le point de non retour.Perdu dans le triangle des Bermudes où ma posture féminine subit la perte du contrôle au profit de mon ravissant ravisseur, elle a raison de moi assez rapidement et ma virilité abandonnée aux pieds de Lesbos me permet de prendre le mien.Dans un bruit de succion et de chairs qui s'entre choquent, j'ai du crier d'un plaisir, incontrolable, violent, humiliant et dominateur.Ce texte, comme les autres, se lit et s'observe comme une toile de Dali:Tu peux le lire ou la regarder,autant de fois et chaque "lecture"te renseignes et t'entraines dans un nouveau sens. Il y a une image dans l'image, un texte dans le texte. "Le manuscrit trouvé à Saragosse"se lit à plusieurs niveaux selon la volonté de Jan Potocki son auteur. En peinture, JanVanEyck pour "Les époux Arnolfini"(illustration ci-dessus) et DiégoVelazquez pour "Les Ménines"l'image se reproduit jusqu'à disparaitre dans l'infiniment petit, pourtant elle continue d'exister, c'est la limite de notre organe de la vue qui occulte notre perception.La vérité, l'existence, y est "mise en abîme".Valèrie existe - t- elle? Qui parle par sa bouche? Une femme ? Un homme?l'ennemi de l'intérieur? Le moi profond?Est-elle polymorphe? Androgyne?Philanthrope? Misanthrope?Est-ce: Elle A + Elle B= Elle X. 1+1=3. Deux entités créant une altérité tout aussi réelle.Une aberration mathématique.Ces événements sont-ils passés ou à venir?Dans quelle dimension du temps, dans quelle unité de lieu?Le concept de vérité/mensonge devient caduque. Ces deux ennemis ne s'opposent plus, ils se complètent. 1+1=3: De leur alliance nait une vérité. La tienne celle que tu apporteras dans cette auberge espagnole.Je musarde et je m'attarde le temps de redescendre sur terre. Peu pressé de me séparer d'elle et de verser dans la version biologique de l'extase: Le robinet qui goutte et le verre baveur, souvenir des premières fois où les regards s'évitent.Valèrie ne se retire pas. Le plus intime d'elle épouse ma flacidité, patiente à ma détumescence, reconstitue ma raideur et mon envie.Il est temps pour elle de subir le lycanthrope qu'elle a réveillé. Dehors la lune est pleine. Prémonitoire!Docilement, elle se retourne et se prosterne.J'ignore si c'est vers La Mecque mais elle va tomber sur un mec.J'aperçois une forme, une couleur et une carnation d'abricot dans la pénombre. Sacrificiel!Ce paon qui fait encore la roue m'offre sa précieuse ocelle où je progresse lentement.Je murmure tant que je peux encore parler:"- tu as mal?- oui, continue!"Satisfait, satisfaite de reprendre le pouvoir.Tu parles.Il faut que je grandisse!Il faut surtout que je déménage!