C'est un peu un mythe qui s'effondre... La marque American Apparel, souvent encensée pour son modèle vertical intégrant toute la chaine de production, se targue d'être une des seules marques à ne pas délocaliser, faisant réaliser ses produits au coeur même de Los Angeles. La marque éthique se vante ainsi de pouvoir fournir à ses employés des conditions de travail et une couverture sociale avantageuses. Ses ouvriers seraient ainsi payés environ 12$ de l'heure (ou 25000$/an), soit deux fois plus que le minimum légal et bénéficient d'un certain nombre d'avantages: subvention pour les transports en commun et les repas, prêt de vélo, congés payés, cours d'anglais, sécurité sociale... American Apparel est également connu pour son travail pour réduire son impact environnemental ou l'utilisation de coton bio dans ses produits.
Derrière la façade éthique d'American Apparel semble pourtant se cacher une vérité moins rose: les services d'immigrations américains ont dénombré pas moins de 1600 travailleurs illégaux dans une de ses usines de Los Angeles, entrainant leur licenciement immédiat par la marque afin d'éviter tout recours en justice de l'état américain. Ce nombre est énorme, car American Apparel compte un total de 10000 employés dont la grande majorité sont des personnels de boutique. Autant dire qu'American Apparel a fait de l'immigré clandestin une base de sa politique de production à bas coût, un immigré sans papier ne pouvant cotiser aux caisses de retraite ou de sécurité sociale américaines, ou se syndicaliser. American Apparel n'a pas pour le moment fourni de justification (la nouvelle n'a d'ailleurs fait l'objet d'aucun écho sur leur site internet).
L'immigration est un sujet assez touchy aux Etats-Unis, terre créée par l'immigration mais qui dorénavant se cache derrière un ensemble de lois protectionnistes. Sur ce plan, American Apparel s'est montré politiquement impliqué en faveur d'une politique d'immigration plus ouverte, son fondateur Dov Charney étant lui-même immigré du Canada (ok, c'est pas le Mexique). Son manifeste Legalize LA est disponible sur son site internet. Le problème a également été d'actualité en France notamment dans la restauration, mais il n'a jamais pris l'ampleur du cas d'American Apparel. Au final, le pire c'est que malgré ses grandes déclarations éthiques ou son manifeste pour la légalisation des sans papiers, American Apparel n'a pas eu le courage d'affronter les autorités américaines, décidant simplement de licencier tous ces employés plutôt que de se battre pour les aider à obtenir des papiers. Une honte...
En tout cas, c'est un coup dur de plus pour la marque alors même que ses ventes d'août ont été en baisse de 20%... Elle a également été au coeur d'un mini-scandale au Royaume-Uni où une de ses publicités a été interdite. L’autorité britannique des publicités avait été alertée par un groupement de lecteurs accusant American Apparel d'exposer des mineurs nus sur leurs publicités. En réalité, la mannequin en question a bien 23 ans, mais la publicité a été quand même interdite en Grande Bretagne du fait de son aspect trop juvénile: Because the ad could be seen to sexualise a model who appeared to be a child, under the age of 16 years, we concluded that it was inappropriate and could cause serious offence to some readers.
La publicité dont la partie inférieure a été enlevée est toujours diffusée aux Etats-Unis. A vous de juger si cela vous choque. Pour ma part, je ne remettrai pas les pieds dans un American Apparel avant longtemps...