Pagoverdose.

Publié le 04 septembre 2009 par Wilverge


Bagan, Birmanie (Myanmar)
Quelque part dans le top d'une montagne chinoise, une goutte d'eau pure et naïve ne se doute certainement pas qu'elle parcourra le Myanmar dans toute sa longueur jusqu'au golfe de Bengale. Un parcours de plus de 2000 kilomètres à travers les régions les plus authentiques du pays, que nous partagerons sur quelques centaines seulement, de Mandalay à Bagan.
Le bateau n'avance à peine plus vite que le courant. On se sent un peu comme sur un radeau à la dérive, le bruit d'un moteur en plus. Les 12 heures de trajet - qui remplace agréablement la dizaine d'heures par la route cahoteuse - nous permettent d'observer la vie le long du principal cours d'eau du pays.
À chaque arrêt, car oui, le bateau accoste la berge boueuse maintes fois, on entrevoit les villages et leurs habitants entre le débarquement de kilos de riz ou d’ananas et l'embarquement de régimes de bananes. Du haut du deuxième pont, la scène est un réel voyage dans le temps, à l'image du périple jusqu'à maintenant.

Le Myanmar est seul dans son fuseau horaire, en retard d'une demi-heure sur son voisin la Thaïlande. Trente minutes qui représentent des années, voire 50 ans par endroit. La Birmanie, comme elle sera toujours nommée dans mon cœur, surprend et choque à chaque coin de rue.
Dans les grandes villes comme dans le milieu de nulle part, les gens sont authentiques, inaméricanisés. C'est si magnifique et triste à la fois compte tenu des circonstances qui les maintiennent dans le passé. Quand ce n'est pas les diligences qui assurent le transport public dans la ville, ce sont les buffles qui tirent les charrettes chargées ou même parfois, en toute modernité, tirent la machine à asphalte.

Le sur les rives que nous longeons depuis des heures, les enfants se baignent dans l'eau brune qui sert au lavage des vêtements. Le village entier s'approche au son de la corne de brume et tente de vendre les récoltes et plats préparés aux occupants du ferry.

En mangeant notre petit plat de riz, concombre et menés piquants, servis dans un sac de plastique sans ustensile, le paysage plat et monotone continu à défiler jusqu'à ce que la rive devient falaise et que quelques temples apparaissent par-ci par-là.

Notre croisière sur l'Ayeyarwady, qui restera toujours dans mon cœur l'Irrawaddy, est terminée. Nous sommes rendus à ce qui aurait pu être un patrimoine de l'humanité (si ce n'était pas des gros caves au pouvoir), Bagan, l'icône touristique de la nation.
Deux milles quelques pagodes sur 42 kilomètres carrés, de quoi faire une sacrée pagoverdose. J'ai, malgré tout, survécu à cette expérience full culturelle. Le tour en calèche des principaux temples est assez intéressant. Sauf qu'au bout d'un moment, une pagode c'est une pagode, même si le bouddha à l'intérieur sourit ou bouddhe, ou même, comble d'originalité, est assis à côté d'un autre bouddha (l'apogée de la journée).
À moins d'avoir une trempe exceptionnelle, oubliez la visite de vingt temples en une journée, ou vous finirez avec un sacré mal de tempes. Quitte à être trempé, vaut mieux selon moi visiter à vélo avec modestie, le matin et en fin d'après-midi, et buvez beaucoup d'eau sous votre chapeau pour éviter que le soleil vous file une de ces trempes.
La visite de ce site majestueux est tout de même un incontournable asiatique et prend tout son sens au crépuscule au sommet de l'un des bâtiments encore ouverts à l'ascension. De là-haut, les temples parsemés dans la plaine offrent un panorama magique. Cet immense « bad trip » de rois prend alors un peu de sens. Il suffit d'attendre que le soleil se place à l'horizon contrastant les centaines de stupas qui pointent vers le ciel orangé. À ce moment, je dis à ma bien-aimée : « stupa merveilleux, Nad? » et elle me répond tendrement que je suis l'homme le plus drôle sur cette Terre (mes souvenirs sont flous, mais je pense que c'est ce qu'elle insinuait).

Deux jours nous ont suffi à explorer le coin. On a même eu le temps d’aller se faire attaquer par des singes au Mont Popa. Ce matin, 4h00, nos hôtes se sont levés pour nous préparer un déjeuner à emporter dans notre bus. C'est la première fois que l'on voit ça dans tous les pays traversés jusqu’à aujourd’hui.
Birmans, bravo. Vous êtes géniaux.
- Will.