L'invention de la vérité - Marta Morazzoni

Publié le 23 août 2009 par Ivredelivres

L’invention de la vérité - Marta Morazzoni - Traduit de l’italien par Marguerite Pozzoli - Editions Actes Sud
Un roman qui mêle l’art et l’histoire, qui entrelace deux époques et en marie les personnages, qui interroge sur la beauté et la création, un récit subtil et attachant mêlant fiction et réalité.
La réalisation de la tapisserie de Bayeux d’un côté, le voyage à Amiens de John Ruskin esthète et critique d’art de l’autre.
La tapisserie de Bayeux chef d’oeuvre du Moyen Age raconte par touches successives les conquêtes et les batailles de Guillaume le Conquérant, la reine Mathilde pour rendre hommage à son époux et chanter ses exploits, rassemble 300 brodeuses venues de toute la France pour réaliser la tapisserie qui « ne se veut pas moins que les oeuvres des maîtres sculpteur de la cathédrale  »
Une brodeuse originaire d’Amiens Anne-Elisabeth prend place auprès de la reine et tisse jour après jour les fils colorés qui vont transformer le lin blanc en un livre vivant " Le rouleau de lin, encore intact et immaculé, attendait de se déployer devant les brodeuses à l’oeuvre telle la plaine qui, dans la nuit, attend le combat. "

La tapisserie avance lentement " les heures sur la toile de lin qui se trouvait devant elle, deviendraient des mois, voire des années ; le jour de l’achèvement se rattacherait difficilement dans sa mémoire, au matin du début."
Anne-Elisabeth met tout son art et toute son âme au service du chef d’oeuvre " Le passage de l’aiguille sur le tissu suit un mouvement intérieur qui ne s’épuise pas dans le caractère mécanique du geste. "
En alternance John Ruskin  esthète et fin connaisseur de l’art gothique nous sert de guide dans Amiens, ce sera son dernier voyage. Cet amoureux de la beauté en fera une Bible  La Bible d’Amiens que Marcel Proust traduira en français.

Pour lui "L’extérieur d’une cathédrale est semblable à l’envers d’une étoffe qui vous aide à comprendre comment les fils produisent le dessin tissé ou brodé du dessus" Il nous fait partager sa vision, dévoile les secrets de la cathédrale, ce qu’il appelle son labyrinthe "en plein jour la lumière frappe le tracé du labyrinthe après avoir franchi la broderie de la rosace"
Les mots de Ruskin créent un dialogue entre la Cathédrale et la tapisserie, fils, étoffes, broderie, dessin tissé....
Ce livre léger et fin se déroule lentement, n’attendez aucun rebondissement, il n’y en a pas. Anne-Elisabeth le personnage de fiction rejoint John Ruskin, tous deux nous font sentir la joie éprouvée devant la beauté, nous font toucher l’impalpable de la beauté.
L’auteur
Marta Morazzoni a été révélée au public par son premier livre, La Jeune Fille au turban (1986), traduit en neuf langues. Professeur de lettres et d’histoire, critique littéraire, elle est l’auteur de plusieurs romans et recueils de nouvelles. L’Invention de la vérité a également été récompensée par le prestigieux prix Campiello. (source l’éditeur)