Sans commencer par “j’vous jure, j’vais m’les faire”, j’ai décidé de partager avec vous cette formidable aventure de l’administration française. Je ne débarque pas, j’ai déjà touché le RMI, galéré au chômage pendant 6 mois, jeune diplômée, les Assedic de Sarcelles je connais. J’avais espéré que ce que j’ai connu à l’époque changerait.
Mais reprenons : après ma décision, le 31 août, de retrouver le chemin de la passion, j’ai donc décidé d’entreprendre des démarches pour faire un bilan de compétences.
Première étape : la recherche sur le site Internet ANPE. Pardon, Pôle Emploi “né de la fusion entre les Assédic et l'ANPE pour mieux vous accompagner dans votre recherche d'emploi ou vos recrutements”. Je cherche, bilan de compétences. Rien.
Je cherche un numéro de téléphone : 30 minutes de recherche. Je suis pas une quiche en recherche Internet, je précise. Ce site est un foutoir sans nom, et c’est tout en bas en petit en minuscule que j’ai cliqué au hasard sur “votre pôle-emploi”. On te propose ensuite de choisir une ville ou un département peu importe et on te colle sur une carte Mappy mal foutue un ensemble de points qui se chevauchent les uns les autres pour choisir TON pôle emploi. Mais pas de n° de téléphone. Je commence à paniquer, clique à droite sur “trouver votre contact”, et j’arrive sur la page de TOUS les cas qui ne sont PAS normaux. Intermittents du spectacle, marins-pêcheurs, agriculteurs… Soupir…. Arrivée en bas, je clique finalement sur “Qui sommes nous ?”. Bonne question, pour être capable de faire un site pareil, je me demande d’où ils viennent, vont-ils acheter une baguette le matin ? Connaissent-ils la dernière veste à la mode chez H&M (ah ah !!) ? Savent-ils à qui ils s’adressent ? Je vous refais pas l’historique complet de ma recherche, mais finalement, je tombe au hasard sur le n° de téléphone “unique qui permettra de répondre à toutes vos questions”. J’ai regardé Tipi et un instant j’ai eu envie d’être un chat pour ne pas connaître les soucis d’un être humain qui tente de rendre son passage sur Terre un peu plus intéressant.
Deuxième étape : ma conversation avec le conseiller ANPE. “Tapez étoile, tapez 5, tapez 2, tapez 4543548….” On me fait patienter, un monsieur, sympathique au demeurant, interloqué de ma demande. Ah oui, parce que je vous ai pas dit, mais je suis toujours la première personne sur Terre à demander quelque chose à l’administration. Je ne sais pas pourquoi, ils n’ont jamais vu ça, jamais. Alors que ma demande est pourtant claire. Je me suis renseignée sur Internet, un B.C. peut être lancé à l’initiative de l’employeur ou d’un salarié, aucune obligation de prévenir son boulot. Et c’est bien mon cas, je veux être indépendante dans ma demande, savoir comment peut être financé mon B.C., mes questions sont simples et demandent de la précision. Il ne sait pas. Pour lui, c’est un patron qui doit être à l’origine d’un dossier comme celui-ci. “Mais je vous passe quand même un conseiller qui saura mieux vous renseigner, parce que je ne m’y connais pas”. Raaaaaah !!!! Mais qu’est ce que tu me fais perdre mon temps, si tu sais pas, réponds pas, passe moi tout de suite quelqu’un qui sait !!!!!!! Evidemment, c’est quelque chose de classique en France, la dame au bout du fil me répond “pas de souci, vous pouvez très bien faire cette demande seule, il suffit de vous rendre dans le Pôle Emploi le plus proche de chez vous, c’est sans rendez-vous !”. Merci. On ne peut rien me dire de plus, il faut que je me déplace physiquement, avec des tickets des ordis pourraves et des files d’attente de 3 km. Ma motivation n’est pas entachée pour autant, je file, je sui sur ma lancée.
Troisième étape : le Pôle Emploi de la rue Kleber, à Montreuil. A 10 minutes de chez moi à pied, de toutes façons, j’ai un pantalon à aller chercher au pressing, c’est sur le chemin (trop sexy ma vie). J’arrive dans les locaux, bardé de monde, une queue de 10 personnes, et je suis sûre que chaque personne a un problème particulier, c’est comme la Poste, pareil. Et avec moi ça loupe jamais, la personne qui est au guichet de l’accueil (parce que tu dois passer à l’accueil pour avoir le droit de prendre un ticket…) commence à monter le ton avec une lettre mystérieuse que ni la guichetière, ni le demandeur ne peuvent expliquer. Donc forcément c’est l’embrouille. 10 minutes de spectacle, je kiffe. 25 minutes plus tard, c’est mon tour. J’ai patienté sagement, regardant autour de moi ces gens qui sont là espérant encore une aide quelconque des services du Pôle Emploi.
“- Bonjour, je viens vous voir parce que j’ai besoin de renseignements auprès d’un conseiller pour un bilan de compétences.
- Oui, pas de problèmes, c’est vous qui faites la demande ?
- Oui, je veux le faire sans lien avec mon employeur, donc j’ai besoin de renseignements précis sur le financement possible, les délais, etc….
- D’accord (temps d’arrêt, suspense). Alors ce n’est pas ici, ici vous êtes dans un Pôle Emploi qui ne s’occupe QUE des indemnisations, puisque vous le savez, Assedic ANPE blabla…….”
- …. Et il est où le centre “normal” ???
- C’est le centre Beaune qui pourra vous renseigner.
- Ok.”
Attente inutile, conversation inutile. J’ai poireauté 25 minutes pour qu’on me dise que je servais à rien là où j’étais. Donc fusion mon Q un peu quand même, quand on on sait que finalement, tous les Pôles Emploi ne font pas la même chose.
Il est 15h45, je ne m’avoue pas vaincue, va pour le centre Beaune.
Quatrième étape : le Pôle Emploi de la rue Beaune, à Montreuil. Je trottine direction le Montreuil où je vais jamais, et que j’aime pas trop faut dire, en 10 minutes, on me demande une clope, un punk des pièces pour manger, un autre veut savoir où je vais…. J’arrive dans LA rue, dans ma tête un vague Hallelujah qui finit en larsen, c’est pas encore fini.
La salle est vide. Tout le monde va chercher ses papelars pour les indemnités à Kleber, mais personne vient chercher de taff ici. On a tous compris. 2 agents derrière des guichets debout, les deux lèvent la tête vers moi, me disent “bonjour”, et attendent la suite des événements. Trop de personnel pour moi, ça cache quelque chose. Au hasard, la fille.
- “Bonjour, bilan de compétences / rendez-vous / financement / moi toute seule / renseignements.
- Oui, alors je peux vous proposer lundi après-midi à 14h.
- Ben… c’est pas possible maintenant ? Je comprends pas, votre collègue au téléphone m’a dit que c’était sans rendez-vous.
- Bien sûr qu’il faut un rendez-vous, un conseiller vous renseignera, ça peut durer entre 5 minutes et une heure.
- ….vazyyyyy (dans ma tête)…..Bon et bien dites moi quand c’est possible.
- Alors lundi dans l’après-midi, ou lundi matin, ou mercredi.
- A quelle heure ?
- Ben lundi à partir de 14h.
- Mais comment ça “à partir de ?”, vous ne donnez pas un rendez-vous à une heure précise ?
- Non ce ne sont pas des rendez-vous.
- Mais ?!!!! (bon laisse tomber) c’est absurde…. Bref, lundi vers 14 h alors ?
- Oui voilà. Venez à 14h comme ça vous arriverez dans les premières ! (là elle a eu l’impression une astuce de la mort qui tue, je précise, limite avec le clin d’oeil).
Et voilà comment je suis repartie avec ma bite et mon couteau (autant dire rien), sans rendez-vous, et sans renseignements. 2 heures de ma vie.
Alors je voulais quand même rappeler à ceux qui l’ignoreraient que la fusion ANPE / Assedic a été l’objet d’un GRAND remaniement gouvernemental, et que rien que le logo a coûté 135 000 €. J’vous invite à aller voir ce magnifique tutoriel, ça prend 2 secondes et ça explique tout.
La suite au prochain épisode, rien que pour vous le raconter, je ne m’annonce pas vaincue.
PS : Et mon pantalon au pressing n’était toujours pas prêt.