Magazine Culture

Match : Virgin contre la Fnac

Par Albrizzi

Les deux grandes enseignes culturelles ont ouvert le bal des prix littéraires... à 24 heures d'intervalle.

Même tactique ?

VIRGIN
Prix Laurent Bonelli / Lire & Virgin Megastore 

Créé en 2007, il perpétue la mémoire de Laurent Bonelli. Ce dernier a dirigé la librairie du Virgin Megastore des Champs-Élysées de 2000 à 2006, avant d’être emporté par un cancer le 19 décembre 2006 à 39 ans. Le Prix récompense un auteur français (ou francophone), choisi parmi les écrivains retenus dans la sélection de la Rentrée littéraire établie par les libraires du groupe Virgin et par la rédaction du magazine Lire. Les critères sont : l’éclectisme, la surprise, la découverte, le coup de cœur, des valeurs qui animaient Laurent Bonelli et le guidaient dans ses choix littéraires.

Dotation : 3000 euros
Lauréat : Vincent Message pour Les Veilleurs (Seuil)

Magasins
: 31
Chiffre d’affaires : 323 millions d’euros (dont 31% grâce à la vente des livres, premier poste d'activité de l'entreprise)

Propriétaire
: Walter Butler (Butler Capital) à hauteur de 75% de l'entreprise depuis 2008. Lagardère détient encore 20% de l’entreprise.

Président du directoire
: Jean-Noël Reinhardt
Remise du prix : le 31 août au cours d’une soirée dans le magasin de Champs-Elysées. Tout le rez-de-chaussée est réquisitionné : une estrade pour faire monter les auteurs en lice et le lauréat, présentés par François Busnel, directeur de la rédaction de Lire. Brève présentation, presque personne n’écoute (la faute à qui ? Le secret de la délibération a été dévoilé une semaine avant sur le site de Livres Hebdo). Plus d’adrénaline ni de suspense. Résultat, les attachés de presse, journalistes et éditeurs papotent (on se raconte les vacances) avant de se ruer sur le buffet. Apéritifs à tomber : carrés de foie gras, verrines de crabes et d’avocats, toasts de pain d’épice aux crevettes, madeleines salées aux anchois, puis les indétrônables macarons, sucettes au café et tartelettes aux fruits des bois. Beaucoup de monde, le champagne se réchauffe trop vite, et le public déborde vite sur les Champs. Une cigarette et puis s’en va. Que c’était bon !

FNAC
Prix du roman fnac
Créé en 2002, il est attribué par un jury composé de 400 adhérents et de 300 libraires parmi 30 titres sélectionnés par les adhérents et les libraires de la Fnac. Ces lecteurs ont quelques semaines pour lire les romans de la rentrée littéraire, en moyenne cinq, qui leur ont été attribués, et rédiger une fiche de lecture sur chacun d’entre eux. L’analyse de ces fiches permet de dresser les quinze titres préférés des adhérents ainsi que ceux des libraires.
Dotation : ?? euros

Lauréat
: Yannick Haenel pour Jan Karski (Gallimard)
Magasins : 81
Chiffres d’affaires : 3,31 milliards d’euros en 2007 (dont 18% grâce à la vente des livres).
Propriétaire : François Pinault via son groupe PPR, depuis 1994.
Président-directeur général : Christophe Cuvillier depuis le départ de Denis Olivennes en juin 2008 pour Le Nouvel Observateur.

Remise du prix
: le 1er septembre à 20 heures au Carré Marigny, chez Monsieur Robert Hossein. Pourquoi un théâtre si c’est uniquement pour entendre l’annonce (déjà connue depuis dix jours) du lauréat ? Surprise ! La fnac a décidé d’offrir, cette année, un véritable spectacle à ses hôtes. L’orchestre est plein, les baignoires également, il faut donc monter au premier balcon, voire, pour les retardataires, au second. Le théâtre s’agite, rempli avec l’effervescence d’une générale : pas tout à fait raccord mais tellement plus gaie ! Le public a été trié sur le volet, plus sélect que chez Virgin la veille, plus âgé aussi peut-être.
Les lumières tombent, le noir nous enveloppe alors que s’élève un son de clarinette et quelques notes caressées sur un violoncelle. Irène Jacob et Jérôme Kircher à la voix. Chacun à leur tour, parfois ensemble, ils lisent des extraits des romans sélectionnés. De l’autre côté de la scène, un homme perché sur un tabouret agite sa main sur une immense planche à dessin sur laquelle il pose une feuille blanche filmée et projetée sur grand écran face aux spectateurs silencieux. L’encre de Chine illustrera en direct les thèmes des livres. L’œil et l’esprit. Merleau-Ponty n’aurait pas désapprouvé. Que c’était beau !


RESULTAT : le prix Virgin gagne la palme de l'originalité en primant un premier roman, qui plus est, un thriller onirique qui revisite les codes traditionnels des polars anglo-saxons. La Fnac remporte, quant à elle, haut la main le prix de la soirée la plus brillante. Et couronne un livre lui aussi transgenre : à la frontière de la documentation et du roman historique.

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