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Parmi les mécanismes de la mémoire, les associations d'idées sont ceux qui subliment la banalité matérielle. C'est grâce ou à cause d'elles que des couples se pâment en entendant une chanson nian-nian de leur jeunesse "Minou, c'est not'chanson !". Quand un plat tout ce qu'il y a de plus simple devient "comme les spaghettis de ma grand-mère", ce sont encore elles qui oeuvrent dans nos synapses.Tout ce petit baratin pour vous dire que ces derniers temps, il me vient des envies de manger un gâteau à la carotte. Mais pas n'importe lequel : le gâteau à la carotte de David !Que je vous explique un peu : il y a six mois, j'ai subi la perte cruelle d'un colocataire. Ne riez pas, je ne plaisante pas. Quand on vit avec deux personnes et que celle qui soude le trio repart dans son pays, c'est rien de moins qu'un cataclysme domestique !Imaginez plutôt : une fille genre Bree Van De Kamp (moi) cohabite avec une autre nana, plutôt style... bordélique, y'a pas d'autre mot et je ne trouve pas de personnage fictif pouvant la représenter si ce n'est peut-être... Non, je n'ose pas... Bon alors juste entre parenthèses, on dira que ça compte pour du beurre (Homer Simpson), mais en intello. Pour stabiliser ce cocktail explosif et faire de notre quotidien un véritable plaisir, il fallait un être extraordinaire, vous en conviendrez.Il a existé et il existe encore, quelque part au milieu des vignes australiennes. Et vous l'avez sans doute deviné, il s'appelle David. Mais qu'avait-il de si spécial, ce colocataire spécialiste du déminage ? D'abord, il avait un accent à couper au couteau. Il suffisait qu'il dise "choche" ou "trouc" pour qu'on se déride après une prise de bec, Homer et moi. Ensuite, il ne savait pas faire la cuisine. Il nous a mis le feu deux trois fois à la cuisine lors de ses premières tentatives de tortillas. Et même si sur le coup, on n'a pas franchement adoré, la pyromanie de l'espingouin est vite devenue notre anecdote préférée, à tous les trois.Autre trouc aussi contradictoire qu'attachant, il semblait complètement dans la lune, mais était très observateur quand il s'agissait du partage des tâches ménagères. Il tenait à s'acquitter de sa part. Et s'il estimait que j'en faisais trop et l'autre nana (on va pas l'appeler Simpson tout le temps) pas assez, il prenait sur lui d'en faire un peu plus, par souci d'équité.Ce qu'il faut savoir sur les espagnols, c'est qu'ils adorent l'huile d'olive. J'ai pu le constater en vivant avec un beau garçon tout mousclé et poilou viril, mince comme tout malgré un régime alimentaire basé sur la friture. Au bout d'un moment, David qui travaillait beaucoup, a ressenti une certaine fatigue. Il s'est alors demandé si le contenu de ses assiettes n'y était pas pour quelque chose et j'en arrive bientôt à la recette que vous attendez tous. Comme il avait du mal à manger des légumes et que ceux qu'il achetait finissaient souvent par moisir dans le frigo "Merdé, merdé, c'est éncor porri les carottes !", David a décidé de diversifier ses compétences culinaires en se confectionnant des gâteaux pour le petit déjeuner. Vous l'aurez compris, gâteau du matin plus carottes à manger avant qu'elles ne marchent toutes seules égale gâteau à la carotte. Les premières tentatives nous ont quelque peu laissées perplexes H.S et moi. Mais el David a vite progressé pour parvenir à l'alchimie parfaite dont je m'en vais vous livrer le secret.
* Préchauffez votre four à 180°.* Fouettez 3 oeufs avec 100g de sucre en poudre jusqu'à ce que le mélange blanchisse.* Ajoutez 4 carottes cuites mixées, 40g de beurre et 2 carottes crues râpées.* Mélangez 250g de farine, 1 sachet de levure et 40g de poudre d'amandes. Incorporez progressivement à la préparation précédente en évitant les grumeaux.* Versez dans un moule à manqué beurré puis fariné* Cuisez 35 à 40 minutes. La pointe d'un couteau doit ressortir juste sèche.
Je pourrais me le faire, mais il n'aurait pas le même goût. Je crois que le meilleur dans le gâteau, c'était que je pouvais le partager avec mon pote. Maintenant, je fais mes balades en ville toute seule et je mange des flocons d'avoine le matin. Il me manque...