Ca y est, c'est la rentrée littéraire, le moment que tout lecteur passionné attend avec une patience démesurée. A la lecture de toutes les sorties, cela donne d'ailleurs un peu le tourni. On voudrait tellement pouvoir tout lire, partir à l'aventure de tous ces récits.
Pour commencer, je suis tellement enthousiaste par la lecture du dernier livre de Véronique Ovaldé que je voulais vous en faire part même si elle est déjà une des reines incontestée de la rentrée. Lire "Ce que je sais de Véra Candida", c'est s'embarquer dans un autre monde, accepter de lâcher prise et partir vers un pays imaginaire en Amérique du Sud, bouillonnant de vie, de verve où l'écriture de l'épure cotoie le baroque.
C'est à Vatapuna précisément que se déroule ce conte et l'histoire de trois femmes d'une même famille. Trois destins sombres et forts : chacune à leur manières affronte le sexe fort et se retrouvent à enfanter une fille sans jamais pouvoir révéler le nom du père. Il y a Rose, la grand-mère, qui vit dans sa cabane; ancienne pute reconvertie en pécheuse de poissons volants; Violette sa fille, un peu demeurée qui elle aussi lève un peu trop vite le jupon pour quelques canettes de bières trop chèrement payées. Et puis Véra, la petite fille qui sera élévé par sa grand-mère, faute d'avoir une mère responsable... Refusant la fatalité du destin, Véra s'enfuie de Vatapuna, du haut de ses quinze-ans. Direction "la" ville, où elle rêve d'oublier son passé pour mieux élever sa fille. La rencontre avec un journaliste indépendant, de vingt-ans son ainé, Itxaga va bouleverser sa petite vie... Partir loin, dans cet univers tropical, pour mieux parler des relations des femmes avec leurs hommes et de leurs relations avec leurs filles...C'est ça, la force du roman. Car sans avoir l'air d'y toucher, elle nous raconte ce qu'il y a de plus universel: l'amour et les irréfutables erreurs ou liens qui se transmettent parfois. Et les enseignements qui trottent inconsciemment dans nos têtes, qu'on reprend... ou pas.
Comme Rose qui ne se lasse pas de répêter à Véra, sa petite fille: "attends les coincidences des corps" ou encore: "ces cicatrices-là, mon sucre, sont des étendards disait grand-mère Rose. Au fond, c'est un avantage toutes ces coupures bien visibles. Quand le mal qui t'est fait est seulement à l'intérieur (mais sache, ma princesse, qu'il peut-être aussi taraudant et violent que des coups de poings), alors ne pas perdre de vue ta colère et ta juste rage demande un bien plus gros effort".
Lire l'histoire de Véra Candida est un enchantement pour toutes ces raisons: une écriture lumineuse, un rythme entraînant, ces portraits de femmes haut en couleurs, et l'exotisme du décor dans cette contrée imaginaire, à la fois synonyme d'évasion et de réflexion emprunts de sentiments forts.
NB: A la lecture de romans, je ne peux m'empêcher très souvent d'associer le texte à l'image. Et cette fois-ci; c'est une confrontation "almodovarienne" qui me vient à l'esprit. Comme cohabiterait l'univers de Véra Candida et la plume de Véronique Ovaldé si elle pouvait rencontrer Almodovar et les héroines de Volver? Une chose est sûre, ce serait une rencontre magnifique et explosive !
Ce que je sais de Vera Candida de Véronique Ovaldé est paru aux Editions de L'Olivier.