La vaine attente
Titre original : The Wasted Vigil
Nadeem Aslam
Traduit par Claude Demanuelli
Éditions du Seuil
Rentrée Littéraire 2009
Première phrase // Son esprit est une demeure hantée.
Dernière phrase // Il doit y rencontrer celui qui est peut-être le fils de Zameen.
Afghanistan, 2005, à l’ombre des monts de Tora Bora. Dans une maison aux murs ornés de fresques, aux plafonds recouverts de livres cloués, avec sa fabrique où l’on distillait autrefois des parfums, le vieux médecin anglais Marcus Caldwell pleure sa femme Qatrina et sa fille Zameen disparues, et désespère de retrouver son petit-fils Bihzad.
Vers ce lieu, où l’amour régnait sous toutes ses formes, où les sens sont tous sollicités, convergent des êtres esseulés. La Russe Lara à la recherche de son frère, soldat de l’armée soviétique ; l’Américain David, ancien agent de la CIA, sur les pas de Zameen et de son fils ; Casa, jeune orphelin endoctriné par les talibans.
Dans ce roman qui jette une lumière crue sur une région brutalisée, à travers les trajectoires de personnages aux destins liés qui apprennent à s’aimer et à faire revivre les êtres aimés, tout s’emboîte de façon inéluctable. À peine s’est-on réfugié dans la maison de Marcus que la sauvagerie du monde extérieur nous agresse.
Nadeem Aslam met dans la balance la fragilité des liens humains, de la raison, de l’art, face à la domination de l’ignorance et de la cruauté étayées par une doctrine suffocante. La langue est chargée de parfums et de couleurs, la narration alterne sans répit entre passé et présent.
Ce livre poignant et à niveau d’homme restera en mémoire par sa maîtrise impressionnante et l’émotion qu’il génère. On le referme le cœur battant.
Je dois dire que pour mon premier billet, je ne pouvais pas tomber sur meilleur livre… En même temps, vous pourriez me dire que je l’ai fait exprès, choisissant justement le livre, parmi tous ceux lus dernièrement, qui a retenu toute mon attention… Mais, détrompez-vous, d’abord (1) parce que je ne suis pas comme ça (non mais !) et “promets” (tant que faire se peut) d’écrire mes billets dans l’ordre de mes lectures… et enfin (2) parce que c’est le premier livre que je lis après une période de non lecture…
Bref, pour en revenir à La vaine attente, c’est un roman, pour moi, époustouflant. Nadeem Aslam y retrace l’histoire contemporaine tragique de l’Afghanistan avec l’invasion soviétique puis l’arrivée des talibans. Il le fait magnifiquement en s’appuyant sur les destinées personnelles de ses héros et notamment par le biais du personnage de David, ancien agent de la C.I.A..
L’auteur manie les flashback avec maestria, nous contant les histoires personnelles de chacun des protagonistes avant de les réunir, tous, dans la demeure de l’un deux ; et dans une langue pleine de retenues, de pudeur mais très parfumée et sensitive.
C’est un roman foisonnant d’informations sur cette partie du monde et ses enjeux, un roman dense, percutant et puissant pour tous ceux d’entre vous, qui, comme moi, aiment à comprendre le monde dans lequel nous vivons… À mon humble avis, un livre qui devrait compter lors de cette rentrée littéraire.
———————————–
Nadeem Aslam Né en 1966 à Gujranwala au Pakistan, Nadeem Aslam avait quatorze ans lorsque son père, fuyant le régime du général Zia, s’est installé avec sa famille dans le Nord de l’Angleterre. Après des études à l’université de Manchester, il se consacre à l’écriture. Son premier roman, Season of the Rainbirds (1993) a reçu le Prix Betty Trask et suscité les éloges de Salman Rushdie. La Cité des amants perdus, sélectionné par le Booker Prize, a été un événement littéraire en Grande-Bretagne. Bibliographie2009 / La vaine attente
2006 / La Cité des amants perdus La vaine attente
Nadeem Aslam
Éditions du Seuil, 2009