Mohamed ancien harki ne comprend plus…

Mohamed ancien harki ne comprend plus…

 

Il habite l’Argonne, a dépassé soixante dix ans, s’est retrouvé au chômage à l’âge de 42 ans et ne comprend plus.

Au moment où a éclaté la guerre d’Algérie, Mohamed possédait, dans la vallée du Chélif, une petite exploitation de vingt-cinq hectares et des bêtes. L’insécurité arrivait vite, et la situation devenait intenable.

Pris entre deux feux, il reconnaissait «  avoir peur », ne pouvait plus travailler, il s’engagea aux côtés des troupes françaises pour le maintien de l’ordre. D’ailleurs, une voie autorisée n’affirme-t-elle pas que « l’Algérie, c’est la France ».

A la fin des hostilités, Mohamed devait quitter le pays rapidement, et il débarqua de ce côté-ci de la Méditerranée avec «  juste ce qui lui restait de son uniforme de harki ».

De regroupement en regroupement, il arriva à l’Herveline et finit par trouver du travail. Dans un pays qu’il ne connaissait pas, dont les habitudes de vie différaient des siennes, il a fait reconnaître son statut de rapatrié, et tentait d’obtenir une indemnisation pour les biens abandonnés.

Mais il se heurtait souvent au barrage de la langue et de l’administration. Il connaissait mal ses droits. Le temps passait, et aujourd’hui, Mohamed ne comprend pas.

Il ne peut retourner en Algérie, se sent difficilement admis ici, et maîtrise mal une colère issue de ce qu’il estime une injustice : « Si on nous ne respecte pas, on ne peut pas le faire non plus pour nos enfants ». Aujourd’hui, il se dit prêt à descendre dans la rue malgré son âge.