Omar Khadr, Abousfian Abdelrazik et Suaad Hagi Mohamud sont Canadiens. Tous ont eu des problèmes personnels importants lors de voyages à l’étranger. Le PM Harper a refusé d’aider ces individus à se sortir du pétrin dans lequel ils ont été pris. Par contre, Brenda Martin, une Canadienne, blanche anglo-saxonne, condamnée pour fraude et blanchiment d’argent au Mexique, a été rapatriée, en mai 2008, à bord d’un avion nolisé par le gouvernement canadien.
Omar Khadr est le plus connu. Il est dans l’infâme prison américaine de Guantanamo de Cuba depuis 2002, alors qu’il n’avait que 15 ans. Il était enfant, de père terroriste, et a été arrêté pour avoir supposément lancer une grenade qui a tué un soldat américain. Il nie la chose. Cet enfant-soldat a été torturé et est le seul occidental dans ses murs. Malgré que le président Obama ait décidé de fermer la prison, pour raison de l’injustice qu’elle représente par rapport aux droits de la personne, et demandé aux pays-amis des USA d’accepter les prisonniers, le PM Harper refuse de rapatrier Khadr pour le remettre entre les mains de la justice canadienne. Il préfère que ce soit la partiale justice militaire américaine qui le juge. La cour fédérale canadienne s’est penchée sur ce cas et a décidé de forcer le gouvernement canadien à rapatrier Khadr pour la raison que les droits constitutionnels du jeune canadien ont été bafoués. Le gouvernement a interjeté appel de la décision et la Cour d’appel fédérale a confirmé le jugement. Aujourd’hui, choqué, le PM Harper décide de porter le tout devant la Cour Suprême du Canada. Pourquoi ?
Abousfian Abdelrazik se rend, en 2003, au Soudan visiter sa mère malade. Il est arrêté, là-bas, et on lui enlève son passeport canadien à la demande du Service canadien de renseignement de sécurité (SCRS) qui a découvert qu’il prie à la même mosquée radicale que fréquente Ahmed Ressam, un terroriste reconnu. Relâché en 2004, les USA placent Abdelrazik sur leur liste de terroristes internationaux. Face à cette décision, il se réfugie à l’ambassade du Canada à Khartoum. Il y est coincé sans passeport, sans argent et sans possibilité de circuler. Les USA avisent le Canada qu’ils n’ont pas suffisamment de preuves pour l’accuser formellement et demande au Canada de les aider à monter un dossier. Nonobstant cette admission, le PM Harper refuse d’intervenir pour aider Abdelrazik, en bloquant l’envoi de documents nécessaires pour assurer son retour au Canada. Ce n’est qu’en juin 2009, après que la Gendarmerie Royale et le SCRS aient admis, enfin, qu’ils n’ont aucune preuve contre lui, que le PM Harper bouge. Abdelrazik a perdu 6 ans de sa vie. Pourquoi ?
Suaad Hagi Mohamud a vu sa nationalité canadienne mise en doute, à l’embarquement d’un avion pour retourner chez elle à Toronto, par un employé kényan de KLM qui estime que la lèvre inférieure du visage sur la photo de son passeport n’est pas tout à fait similaire à celle de Mme Mohamud en personne. Ce qui est surprenant dans ce cas, c’est que le Haut-commissaire canadien à Nairobi, au lieu de l’aider à régler ce conflit, se tourne contre elle malgré qu’elle ait son passeport canadien. La Première secrétaire du Haut-commissaire écrit même aux autorités kenyanes qu’elle « suspecte Mme Mohamud d’être un imposteur ». Mme Mohamud, inquiète, passe huit jours en prison (on sait ce que sont les prisons africaines) et, désavouée par son pays, attend trois mois sans ressource ni sympathie dans une chambre d’hôtel minable et cela malgré toutes les communications qui parviennent de Canadiens qui confirment la véracité de sa citoyenneté canadienne. Le PM Harper vient de prétendre n’avoir appris ce cas que la semaine dernière. J’ai peine à le croire car j’en suis au courant depuis des semaines ayant lu plusieurs reportages dans les média canadiens sur ce cas, surtout que le gouvernement canadien a été vertement critiqué au pays pour n’avoir pas aidé Mme Mohamud. C’est finalement un test ADN qui a permis à cette personne de retrouver son pays. Pourquoi ?
Avant le règne du PM Harper, deux autres canadiens, Maher Arar et Zahra Kazemi furent aussi arrêtés lors d’un voyage à l’étranger.
Maher Arar travaillait à Ottawa comme ingénieur en télécommunication. À son retour de vacances en Tunisie, en 2002, il est retenu par l’immigration américaine qui le soupçonne d’avoir des liens avec Al-Qaeda. Après douze jours, il est enchaîné, déporté en Syrie, son pays d’origine, et cela même s’il détient un passeport canadien. Il est incarcéré dans une prison grande comme une fosse pendant dix mois, torturé, forcé d’admettre faussement un crime puis enfin transféré dans une cellule de grandeur normale. Grâce à toutes les pressions que son cas génère, il est enfin libéré et revient au Canada en 2003. En 2004, le gouvernement libéral de Paul Martin forme une Commission d’enquête pour analyser les actions des officiels canadiens en rapport avec ce cas et elle conclut que Maher Arar « n’a commis aucune offense et qu’aucune de ses activités a été une menace à la sécurité canadienne ». L’ex-gouvernement canadien a agi le plus rapidement possible pour le sortir de son pétrin. Pourquoi le PM Harper ne veut-il pas agir de la même façon ?
Zahra Kazemi est la photojournaliste canadienne qui en juillet 2003, trois mois après son arrestation en Iran pour avoir capté des photos à l’extérieur d’une prison durant une manifestation estudiantine, décède au fond de sa prison. Un médecin du ministère iranien de la défense, confirme, éventuellement, l’avoir examinée quatre jours après sa mort et constaté qu’elle a été violée, son crâne fracturé, deux de ses doigts brisés et a subi de nombreuses blessures abdominales. Elle a été tuée en prison. Le gouvernement canadien demande qu’une autopsie soit faite par une équipe de pathologistes internationaux. Devant le refus des dirigeants de l’Iran d’accepter cette requête, le ministre canadien des Affaires étrangères du temps coupe toutes relations avec ce pays. Quelle différence avec l’indifférence qu’exhibe le ministre actuel Lawrence Cannon qui ne cesse de blâmer Khadr, Abdelrazik et Mme Mohamud pour leur détresse !
Il est inquiétant de constater que des Canadiens nés dans d’autres pays, sans ancêtres Européens, sans nom à consonance « canadienne » et avec une couleur de peau qui n’est pas caucasienne n’obtiennent pas la même aide du gouvernement canadien que les autres Canadiens, lorsqu’ils se retrouvent en difficulté à l’étranger. Cela est inadmissible et laisse à penser que notre gouvernement actuel applique une politique raciste d’extrême-droite, en rapport avec cette catégorie d’individus. Je ne peux comprendre que les officiels de nos ambassades, qui sont normalement des professionnels et diplomates de haute qualité, collaborent au jeu de ce gouvernement d’idéologues conservateurs qui, de toute évidence, les handicapent dans leur travail.
La charte des droits et des libertés de notre pays s’applique pour chaque Canadien, quelque soit son origine, sa couleur, sa religion ou sa langue. Il me semble que cela est clair, irréfutable et très important. Et, lorsque les cours jugent sur cette base légale, pourquoi le PM Harper conteste-t-il leurs décisions ? Le gouvernement canadien est le nôtre. Il doit nous protéger et nous aider où que nous soyons. Sans cette garantie, qui viendra à notre secours ? En tout cas, si j’étais un néo-canadien, je serais nerveux chaque fois que je quitte le Canada car je sais maintenant que le gouvernement actuel de mon nouveau pays ne viendra pas me seconder si je suis pris dans une affaire discutable, même si je suis innocent. Les affaires Khadr, Abdelrazik et Mohamud le démontrent clairement aujourd’hui.
Claude Dupras