Je ne peux pas dire si c’est comme ça dans toutes les régions, mais ici le phénomène est très fort : les gens ont besoin de nous situer dans un arbre généalogique qu’ils connaissent. Hier matin, durant ma ballade en vélo, je me suis arrêté à un joli belvédère pour observer la rivière Bonaventure. Il y avait là un vieux monsieur accoudé à la clôture qui fumait sa pipe. Après les salutations d’usage, il m’a demandé si j’étais de passage dans la région. Je lui ai répondu que oui, mais que ma famille maternelle venait de par ici.
Là, ses yeux s’allument et c’est l’interrogatoire : quelle famille ? D’où ? En quelques minutes, on a constaté qu’il connaissait la moitié des frères et soeurs de ma grand-mère et qu’il connaissait bien mon grand-père. Il m’a donc situé comme le fils de la fille de Jim Grant. Voilà, on pouvait devenir des amis ! Malheureusement, j’ai été trop bête pour lui demander son nom.
Il est arrivé à peu près la même chose plus tard dans la journée en allant acheter du blé d'Inde. Le monsieur pouvait me nommer presque toute ma famille et me dire où chacun avait travaillé et avec qui il ou elle avait été mariée.
Cette même histoire se répète très souvent par ici. Mes grands parents ont élevé leurs neuf enfants à New Carlisle, village juste à côté d’ici et sept de mes oncles et tantes habitent dans la Baie des Chaleurs. Bien sûr, j’ai aussi plusieurs cousins et cousines par ici, ce qui fait qu’à tous les coups... je trouve un lien avec la personne que je rencontre.
Est-ce que les Gaspésiens ont un sentiment d’appartenance plus fort ? Est-ce que de connaître tout le monde est plus important qu’ailleurs ? Est-ce que c’est lié au fait qu’il y a différentes origines culturelles qui se côtoient dans la Baie ? Je ne sais pas. J’ai visité plusieurs régions du Québec et à mon humble avis, il y a une différence.