Depuis le premier jour où elle est venue à ma rencontre, j'ai su que j'allais désormais passer tout mon temps à l'attendre. Elle. Et pas un
autre. Elle, si légère, si douce et précieuse à la fois. Elle et ce léger parfum de réglisse et de rose que je ressens désormais bien avant de la sentir, elle.
Il m'est devenu si indispensable que lorsqu'ils sont venus me chercher, j'ai bien cru que j'allais me laisser submerger par un sentiment mystérieux que je ne savais pas inscrit en moi.
Ils m'ont emmené sans ménagement, arraché, même. Plus rien ne fut pareil ensuite.Tout ce qui m'était devenu familier, les cris des oiseaux se poursuivant au-dessus de moi, les poules d'eau
venant se réfugier en hordes apeurées, si près que j'en ressentais le battement de leur coeur au bord de la rupture, même les coups de poignard que je reçus au plus tendre de ma structure,
tout me fut enlevé. Et mon univers s'écroulâ.
Ils me mirent dans une cabane, au bord du parc, si longtemps que j'en oubliais que je fus vie et racines.
Puis ce fut de nouveau la lumière et le chant de l'univers. Un autre lieu, d'autres racines, plus douces. Je ne sais pas compter le temps, mais je sais la force du souvenir, son parfum
aussi, rose et réglisse entremêlées. Le jour où nous nous retrouvâmes fut si absolu, si lumineux que j'aurai voulu danser pour Elle. Mais un banc de bois et de métal ne peut danser. C'est
ainsi.