Nintendo, acteur majeur et historique du domaine vidéoludique, retrouve aujourd'hui sa place de leader du marché du jeu vidéo. Constructeur, éditeur et développeur depuis près de trente ans, on lui doit nombre des créations qui ont marqué, voire révolutionné, le secteur. A travers l'histoire de la firme au logo rouge, c'est l'histoire du jeu vidéo lui-même qui se dévoile.
Cet article relate l'épopée Nintendo au travers de ses consoles principalement, et sera suivi d'un article détaillé sur la dernière machine de Nintendo : la Wii.
1889-1980 Les prémices de Nintendo
La création de la société remonte au 23 septembre 1889. Elle s'appelle alors Nintendo Koppaï (que l'on peut traduire par « Laissons la chance aux dieux »). Il ne s’agissait que d’une petite entreprise artisanale que Fusajiro Yamauchi avait créée pour vendre des cartes à jouer, les hanafudas, qu’il composait et fabriquait lui-même.
Après quelques pérégrinations et quelques changements de nom, le jeune Hiroshi Yamauchi devient le président de Nintendo (il le restera jusqu’en 2002) et diversifie les activités de la société. Par exemple, on l’a vue se développer dans le marché des portions de riz individuelles, de la gestion de compagnies de taxis et même propriétaire d’un love hotel (activités anecdotiques). C’est grâce à un contrat signé avec Disney en 1959 que la société prend une envergure internationale et entre en bourse en 1962 sous le nom de Nintendo Co. Ltd.
En 1969 est créé le département Games, dirigé par un nouveau venu dans l’entreprise, Gunpei Yokoi. Le premier jouet de ce dernier se nomme Ultra Hand et se vendra à 1,2 millions d’exemplaires. Par la suite, Nintendo lancera d’autres jouets avec plus ou moins de succès.
Puis en juin 1978 Nintendo lance la Color TV Game Racing 112, elle contient une dizaine de jeux vidéo de course et dispose d'un volant et d'un levier de vitesse. Deux manettes plus petites peuvent être utilisées pour le multijoueur.
En avril 1979 sort la Color TV Game Block Kuzushi, un jeu solo basé sur Breakout, le casse-briques à succès de l'époque. L'apparence externe de la console est l'un des premiers projets de Shigeru Miyamoto qui a rejoint Nintendo en 1977. La console se vendit à 400 000 exemplaires.
La Computer TV Game, dernier système sans cartouches de Nintendo, a été distribuée au Japon en 1980 ; c'est un portage du jeu d'arcade Computer Othello.
1980-1996 Le règne Nintendo
Au début des années 1980, la micro-informatique explose, le marché des consoles s’effondre pour la première fois de sa courte histoire. En 1983, Nintendo sort au Japon sa première console 8 bits, la Famicom (contraction de Familly Computer), qui dispose désormais de cartouches de jeux interchangeables. Son faible prix et la qualité de ses jeux permettra à Nintendo d'en vendre une quantité pharaonique et également de sauver le marché.
A noter qu'avec la console sont vendus les jeux Super Mario Bros. et Duck Hunt, ainsi que le Zapper, un pistolet électronique qui permettait de tirer sur l'écran de sa télévision (Duck Hunt est un jeu de tir au pigeon).
Cette console, sortie en Europe en 1986 (1985 aux USA) sous le nom de NES (Nintendo Entertainment System), imposera ses standards et permettra à Nintendo une très forte expansion dans le monde (62 millions d'unités vendues). À cette époque Nintendo contrôle près de 90 % du marché des consoles de salon.
En 1989 sort la Game Boy qui rencontre un énorme succès, notamment avec des jeux comme Tetris, mais surtout grâce à la qualité de leur matériel. Alors que ses concurrentes, la Lynx et la Game Gear, possèdent un écran en couleur, la Game Boy propose un écran monochrome, qui permet cependant une bien plus grande autonomie. De plus, la console est facile à prendre en main, agréable à manipuler et pratique à transporter : points cruciaux pour une console nomade. Nintendo va une nouvelle fois rafler le marché avec 118 millions d'unités vendues (record absolu et historique pour une console portable). Et ainsi ouvrir la voie aux nombreuses évolutions de sa console portable : la Game Boy Pocket puis la Game Boy Color.
Côté 16 Bits, c'est la Super Nintendo qui prendra la relève en 1990 : on est désormais à l'apogée de l'ère 2D. Nintendo et SEGA se livrent une guerre sans merci et signent quelques-uns des meilleurs jeux de tous les temps : Super Mario World, Super Metroid, The Legend of Zelda, Earth Worm Jim, Mortal Kombat, Street Fighter II, les Final Fantasy et les Dragon Quest, qui assureront à la console de Nintendo un énorme succès.
La manette impose le standard des quatre boutons de droite, A,B,X,Y, organisés comme la croix directionnelle, ainsi que des boutons L et R placés sur la tranche supérieure (disposition reprise sur les manettes de toutes les consoles ultérieures). Nintendo, malgré la concurrence de plus en plus féroce, domine encore 75 % du marché des consoles de jeux vidéo (49 millions d'unités vendues).
A cette époque, Big N développait en partenariat avec Sony une extension pour la SNES devant servir à lire des CD ; son nom : Super Nintendo Play Station :). Nintento met fin à cette collaboration en 1993 et réalisera finalement un projet avec Philips, sous la forme du CDI. De son côté Sony donna naissance en 1994 (au Japon, 1995 en Europe) à la PlayStation ; l'avenir était en train de s'écrire.
En 1995 sort la Virtual Boy, console expérimentale unique dans l'histoire du jeu. Annoncée en fanfare à une époque où le mot réalité virtuelle était au coin de toutes les bouches, la console se présente sous la forme d'un casque reposant sur un bipied à poser sur la table.
Les graphismes affichés ne sont pas composés de pixels mais de sortes de diodes rouges (possédant cinq nuances) sur un fond noir. Les jeux étaient en 2D (exception faite des jeux Insmouse et Red Alarm) mais bénéficiaient d'un effet de relief grâce aux deux écrans indépendants du Virtual Boy. Chaque œil recevait une image identique mais en très léger décalage ce qui crée un effet de profondeur (méthode que l'on retrouve dans le cinéma en relief)...
Le relief était bien perçu par le cerveau, trop même, ce qui pouvait causer chez certains individus des nausées ou autres maux de tête. Tout ça pour la simple et bonne raison que l'oreille interne du corps humain perçoit un décalage entre la vue et les autres sens. Ce fut un échec commercial retentissant et la console ne vit jamais le jour sur le continent européen. Cependant, jouer à la Virtual Boy reste une expérience unique, gravée dans la mémoire de ceux qui ont eu le privilège de s'y essayer. Ce qui prouve que Nintendo a toujours cherché des moyens novateurs de jouer aux jeux vidéo.
1996-2006 Le Déclin de Nintendo
La Nintendo 64 (ou Ultra 64) sort en 1996 au Japon (1997 en Europe) avec deux ans de retard sur ses concurrentes. Elle conserve le support cartouche qui permet des temps de chargement très courts, contrairement au CD. Cependant les capacités de stockage des cartouches étant très faibles, les textures sont floues et souvent laides. Le nombre de polygones affiché à l'écran et la fluidité des animations sont également en deçà de ce qu'on peut trouver sur PlayStation ou Saturn.
Avec l'ère de la 3D s'est ouverte l'ère de la course technologique, et la N64 a clairement perdu cette bataille. Cependant Nintendo innove toujours en proposant sur sa console quatre ports manette, permettant à quatre joueurs de jouer simultanément à Mario Party, Mario Kart 64 ou encore Golden Eye. La manette de la N64, bien que n'étant pas des plus ergonomiques, était cependant dotée d'une gâchette et d'un stick directionnel (repris sur les contrôleurs PS2 et X-Box) ; les vibrations firent également leur apparition par l'intermédiaire du rumblepack, sorte d'accessoire que l'on incorporait à la manette (la vibration fut également reprise sur les pads PS2 et X-Box). Déjà à l'époque, la convivialité et l'accessibilité faisaient partie intégrante de la stratégie de Nintendo.
Malgré ses évidentes qualités et de très bons jeux, l'Ultra 64 eut du mal à s'imposer face à la concurrence (32,93 millions d'unités vendues contre 102.49 millions de Playstations). Nintendo souffre d'une image enfantine héritée de la guerre avec SEGA, là où la PlayStation propose des jeux et une communication plus mature. De plus, les éditeur tiers délaissent progressivement la N64 au profit de la PlayStation, plus simple à programmer et à utiliser grâce au support CD. Paradoxalement, cela permettra encore à Nintendo de réaliser d'excellents profits car l'essentiel des jeux vendus sur N64 seront réalisés par la firme : Mario 64, Zelda Ocarina of Time, Super Smash Bros, Pokemon.
En juin 2001, Nintendo sort la Game Boy Advance (GBA), la remplaçante de la Game Boy (qui avait déjà connu trois évolutions : la Game Boy Pocket, la Game Boy Light et la Game Boy Color). Cette console portable, plus puissante que la Super NES, possédait enfin un vrai écran couleur. Ce fut cependant la version Game Boy Advance SP (sortie en 2003) la plus réussie : plus agréable à manipuler et possédant un écran rétro-éclairé dissimulé sous un clapet (80 millions de GBA & GBA SP vendues).
Le GameCube sort fin 2001 et a la lourde tâche de rattraper les erreurs de son aînée. Cette console dispose toujours de quatre ports manettes mais adopte le format mini DVD. Techniquement, la machine est au coude à coude avec la concurrence qui comporte désormais un nouveau challengeur : la Xbox de Microsoft.
Pour lutter contre son image enfantine,
Nintendo obtient l'exclusivité de la licence
Bien sûr, les classiques font leur retour en la présence de Mario Sunshine, Mario Kart : Double Dash, Zelda : Wind Waker et Mario Party (... encore).
Mais des petits nouveaux apparaissent également comme Pikmin, Luigi's Mansion, Wario Ware et Final Fantasy : Cristal Chroniques (qui fait son grand retour sur Nintendo).
La machine possède un solide catalogue mais souffre de la concurrence désormais bien implantée. La Gamecube reste à mes yeux une des meilleures machine de la firme au logo rouge ; malheureusement elle ne rencontra pas le succès qu'elle aurait dû obtenir (21,59 millions de Gamecubes vendus contre 119,875 millions de PS2).
Fin 2004 (au Japon, 2005 en Europe) sort la Nintendo DS, nouvelle console portable venue remplacer la GBA SP. Elle possède deux écrans, celui du bas étant tactile, et, de plus, elle est rétro-compatible avec l'ensemble des jeux GBA. Malgré le progrès remarquable que cela représente, les premiers temps sont difficiles ; il faudra attendre la Nintendo DS Lite, la version redesignée, pour qu'elle connaisse un réel succès.
2006 Le renouveau Nintendo
Délestée de 57 grammes et amoindrie dans ses dimensions (133 × 74 × 22 contre 149 × 85 × 29 mm), la NDS lancée en 2006 devient vraiment nomade. De plus son design épuré correspond aux canons esthétiques contemporains (voir i-pod, senseo, mirror's, etc...)
Cette évolution est également accompagnée d'une série de jeux de qualité qui va booster les ventes de la console, jusqu'à atteindre les 100 millions d'unités. Les jeux étant moins coûteux à développer, de nombreux titres de qualité voient le jour : New Super Mario Bros, Zelda : Phantom Hourglass, Phoenix Wright, Trauma Center. Professeur Layton, Project Rub. Dont certains, pas tout à fait des jeux, vont drainer un nouveau type de public : Programme d'entrainement cérébrale du Professeur Kawashima, Nintendogs, Animal Crossing, Electroplankton.
Le nouvel essor de Nintendo débutera avec la version Lite de la Nintendo DS : sa simplicité d'utilisation due au stylet, et la variété des jeux (et non-jeux) proposés, attirera progressivement une nouvelle catégorie d'utilisateurs, qui jusque-là ne jouaient pas. Nintendo va en prendre conscience avant tout le monde et mettra à profit cette information pour la conception de leur dernière console : la Wii.
C'est en 2006 que sort la Wii ; cette machine exceptionnelle offre la possibilité grâce à un capteur (à placer sur la télévision) et à son contrôleur, la Wiimote, de reconnaître les déplacements dans l'espace. Cette nouvelle manière de jouer, plus intuitive, plus sensorielle, séduira un grand nombre de personnes dont une partie qui, jusque là, ne pratiquait pas le jeux vidéo. On retrouve bien entendu les classiques made in Nintendo : Mario Galaxy, Mario Kart Wii, Mario Party 8, Zelda - Twilight Princess, Super Smash Bros Brawl, Metroid Prime 3 : Corruption, Super Paper Mario, etc. Mais également quelques nouveautés comme Wii Sport, Wii Play, Wii Music et Wii Fit qui se pratique avec le Wii Balance Bord, une sorte de pèse-personne qui capte les mouvements du corps. Cependant, peu de titres d'éditeurs tiers voient le jour sur cette console et ils ne sont souvent pas très bons ; citons cependant : No more Heroes, Mad World, la série des Lapins Crétins, BoomBlocks, Guitar Hero, etc.
Cette console est également la première machine de Nintendo à pouvoir se connecter à internet. Elle dispose donc d'un service d'achat de jeux online sous la forme de la Console Virtuelle, qui permet de télécharger des vieux jeux, et du WiiWare, dédié lui, aux jeux récents. Si on peut retrouver sur la Console virtuelle un grand nombre de titres, dont des légendes qui font désormais partie du patrimoine vidéoludique, en revanche le Wiiware (pour le moment) est assez pauvre ; il dispose tout de même de titres intéressants comme LostWinds , World of Goo ou Strong Bad's Cool Game for attractive People. Le succès de la Wii fut immédiat et c'est aujourd'hui près de 50 % du marché des consoles next-gen. Ceci s'ajoutant aux plus de 100 millions de DS vendues a permis à Nintendo de retrouver sa place de leader.
En 2008, Nintendo sort la DSi. Ce modèle conserve le même design que la DS Lite mais comporte deux caméras (à l'intérieur et à l'extérieur). De plus, la rétro-compatibilité GBA est abandonnée au profit d'une micro-card SD. Ce nouveau modèle dispose également d'un service d'achat de jeux online : le DSi Ware.