La loi du 31 mars 2006 permet de postuler à un poste par l’intermédiaire d’un CV anonyme. Cependant, faute de décret d’application, cela restait quelque chose de très théorique. Maintenant il est désormais possible de postuler en envoyant ce type de CV. En effet, fin 2008, le président de la République a demandé à 100 grandes entreprises de mettre en place en 2009 le CV anonyme, souhaitant que cela « devienne un réflexe pour les employeurs ». Alors c’est bien beau tout ça mais je pense que les initiateurs de cette brillante idée insufflent quelques substances chimiquement douteuses. Non parce que généralement, l’auteur d’une lettre anonyme, de par le fait, n’attend pas de réponse à son courrier ; mais le postulant à un job, ne pensez-vous pas qu’il pourrait souhaiter un certain retour suite à sa démarche ?
Le blabla juridique…
Pour rappel, c’est initialement l’article L.121-6 du code du travail qui renseigne le (futur) employeur sur la nature des questions à poser aux candidats. Donc, cet article dit que…
« Les informations demandées, sous quelque forme que ce soit, au candidat à un emploi ou à un salarié ne peuvent avoir comme finalité que d’apprécier sa capacité à occuper l’emploi proposé ou ses aptitudes professionnelles. Ces informations doivent présenter un lien direct et nécessaire avec l’emploi proposé ou avec l’évaluation des aptitudes professionnelles. Le candidat à un emploi ou le salarié est tenu d’y répondre de bonne foi. »
Et c’est donc à partir de la loi n°2006-396 (du 31 mars 2006 – art. 24 JORF 2 avril 2006) que l’article L121-6-1 a été abrogé par l’ordonnance n°2007-329 (du 12 mars 2007 – art. 12 JORF 13 mars 2007). Cet article ajoute que…
« Dans les entreprises de cinquante salariés et plus, les informations mentionnées à l’article L. 121-6 et communiquées par écrit par le candidat à l’emploi doivent être examinées dans des conditions préservant son anonymat. Les modalités d’application du présent article sont déterminées par décret en Conseil d’Etat. »
Conceptualisation…
Pour ceux qui ne suivent pas, sur un CV anonyme, ne figurent ni la photo, ni le nom, ni l’adresse, ni le sexe, ni même la nationalité du candidat. Mais alors comment fait-on pour lui répondre, si on ne connaît ni son nom, ni son adresse ? Le candidat peut bien sûr utiliser son adresse mail, mais si c’est pour se retrouver avec le bon vieux : paul.posichon@infonie.fr -> VIVE L’ANONYMAT !
Mais au delà de ces aspects « pratiques », ou plutôt devrais-je dire « complexes », il y a une réalité. Pour ma part je laisse aux autres le sacro-saint principe de John Irving selon lequel « l’anonymat garantit l’honnêteté ». Je rejoins plutôt le principe d’Alexandre Dumas selon lequel « Les lettres anonymes ont le grand avantage qu’on n’est pas forcé d’y répondre. » A partir de là, inutile de préciser la triste destinée que je réserve aux CV dépourvus de photo et de mensurations anonymes.