Sarkozy chez Poutine : Un voyage qui a valeur de grand test

Publié le 09 octobre 2007 par Danielriot - Www.relatio-Europe.com

 Décryptage RELATIO par Daniel RIOT--INCONTOURNABLE, Poutine. Et pour longtemps… Incontournable, la Russie en route pour une puissance recouvrée… Indispensable, l’élaboration d’une véritable stratégie politique et stratégique de l’Union européenne envers la Russie, doit l’appartenance au Conseil de l’Europe reste trop ignorée. Impérative, la définition d’une « ligne » française envers le Kremlin. Surtout dans le contexte international actuel et dans la foulée de ce que Sarkozy avait dit comme candidat et a déjà fait comme Président.

« Défendre nos intérêts et dire franchement ce que nous pensons, c'est faisable. », écrit Hubert Védrine dans son rapport  sur « La France et la mondialisation ». A voir… Cette visite première officielle de Sarkozy à Moscou sera un excellent test.

Pendant sa campagne, Sarkozy  avait montré un net durcissement de ton à l'égard du Kremlin sur des sujets que Jacques Chirac évitait de mettre publiquement sur la table : la Tchétchénie, les droits de l'homme, le comportement « impérial » de la Russie vis-à-vis de son « étranger proche ».

Fin août, devant les ambassadeurs, le chef de l'État avait taxé la Russie d'une « certaine brutalité » en visant notamment son comportement sur le marché pétrolier et gazier. La semaine dernière, à Sofia, Nicolas Sarkozy a décrit la Russie comme « un pays qui complique la résolution des grands problèmes du monde » plutôt qu'un « facilitateur ».

Au lendemain du premier anniversaire de l'assassinat de la journaliste Anna Politkovskaïa, les droits de l'homme s'imposeront à l'agenda. Ce sujet ne manquera pas d'être évoqué lors de la rencontre, prévu demain avec des étudiants, à l'université Bauman, qui forme l'élite scientifique russe.

Ce changement de ton n'exclut pas des relations personnelles raisonnablement chaleureuses entre les dirigeants russe et français. D’autant plus que les personnalités de Nicolas Sarkozy et de Vladimir Poutine peuvent si non converger du moins se croiser, comme en a témoigné la complicité qu'ils ont affichée en juin dernier au sommet du G8 d'Heiligendamm.

Les deux ont d’ailleurs quelques points communs dans leurs manière d’exercer leurs pouvoirs, de s’appuyer sur des « proches » dignes de confiance plus que sur des collaborateurs imposée par les  structures ou les hasards démocratique, d’avoir toujours un « coup d’avance » dans chacune des actions entreprises ou des discours faits,  de donner une image dynamique et offensive, d’être omniprésent sur les médias, de chercher à concilier autosatisfaction communicative et réalisme…

Ce soir, le président français sera reçu par Vladimir Poutine dans sa datcha de Novo Ogarevo, dans la banlieue de Moscou. Ils se retrouveront demain pour un entretien et un déjeuner au Kremlin. Les dossiers bi et multi latéraux ne manquent pas. A commencer par ceux qui impliquent une « collaboration très active » dans les secteurs économiques.

Rappels :  En juillet dernier, Total a été retenu pour participer à l'exploitation du gisement gazier très convoité de Chtokman, en mer de Barents. Un accord a été signé entre Airbus et Aeroflot pour la livraison d'A 350. D'autres projets seront évoqués dans le domaine de l'aéronautique.

Mais c’est sur le terrain diplomatique que le dialogue s’annoncele plus  musclé. Kosovo, Iran, Darfour, Bouclier antimissile américain, Otan, ton de guerre froide au Conseil de sécurité de l’ONU, pressions russes sur son  « étranger proche » (Géorgie, Ukraine), pesanteurs russes sur les ex-pays de l’Est devenus membres de l’Union européenne…

À l’Elysée, on se dit prêt à prendre en compte le souci russe de relever la tête, l'histoire particulière de l'ex-empire et l'humiliation qui a suivi son effondrement, à le considérer comme un « acteur majeur des relations internationales ». Mais pas question pour Nicolas Sarkozy de « faire de concessions sur le fond de ses valeurs », a prévenu le porte-parole, David Martinon. Mais la vraie question est de savoir comment la Russie et l’Union européenne peuvent agir de conserve notamment pour régler  la question du Kosovo, cette vraie bombe balkanique, et pour tenter de dédramatiser le casse-tête iranien…

Autant dire que le grand test que constitue ce voyage pour la diplomatie française de l’ère Sarkozy est riche d’enjeux qui dépassent à la fois Paris et Moscou.

Daniel RIOT