Le légendaire champion d'échecs Bobby Fischer est mort en Islande (AFP) – 18 janv. 2008 REYKJAVIK (AFP) — Le légendaire champion d'échecs Bobby Fischer est mort à l'âge de 64 ans en Islande où il avait vécu ses dernières années comme un misanthrope paranoïaque rejeté par son pays d'origine, les Etats-Unis. "Je confirme qu'il est mort hier (jeudi) à son domicile des suites d'une maladie", a déclaré un de ses proches, Gardar Sverrisson, à l'AFP.
De son côté, Einar Einarsson, président du Robert James Fischer (RJF), groupe qui avait soutenu l'entrée du joueur en Islande, a révélé à l'AFP qu'il était mort des suites d'une défaillance rénale. "Il n'était pas du genre à vouloir un suivi médical. Il ne croyait pas en la médecine occidentale", a ajouté M. Einarsson, devenu un ami de Bobby Fischer mais qui a indiqué ne pas l'avoir beaucoup fréquenté ces derniers mois. Le joueur n'était pas très loquace, selon l'une de ses voisines.
Bien que ne l'ayant jamais affronté, le joueur russe Garry Kasparov a rendu hommage à la carrière de Fischer, "la plus grande de l'histoire des échecs"."Il a combiné des coups de grande qualité avec des éléments d'attaque psychologique et il a fait preuve d'une force absolument irrésistible", a-t-il encore estimé. M. Kasparov a également jugé que Fischer pouvait être considéré comme "le fondateur des échecs professionnels".
Le joueur serbe Svetozar Gligoric, 85 ans, ami de Bobby Fischer, s'est dit "affligé". "Il avait des problèmes avec la Fédération internationale des Echecs et avec les autorités américaines, mais personne ne mettait en doute son mérite", a-t-il commenté. Einar Einarsson a expliqué à l'AFP que Bobby Fischer était "plutôt content" de vivre en Islande. Mais il se sentait probablement un peu coincé ici dans la mesure où il n'était pas autorisé à voyager". Selon lui, Bobby Fischer ne s'était finalement jamais marié à la présidente de la Fédération japonaise d'échecs, Miyoko Wata, qu'il avait rencontrée lorsqu'il était en prison au Japon. Elle devait se rendre en Islande dans les jours à venir.
Connu pour son fort caractère, l'ancien champion du monde d'échecs, qui portait une grande barbe blanche hirsute, avait été pour les Américains l'un des symboles de la lutte contre le communisme pendant la Guerre froide en battant les plus grands champions soviétiques. En 1972, à Reykjavik, ce génie américain de 29 ans avait brisé 24 ans d'hégémonie soviétique en battant Boris Spassky, alors meilleur représentant de l'école russe, au cours d'un championnat du monde d'anthologie et apothéose de sa carrière. Après cette victoire, Fischer disparaît de la scène.
En 1975, il conteste les règles de la Fédération internationale des échecs (FIDE), ce qui lui vaut d'être dépossédé de son titre, attribué au Soviétique Anatoli Karpov. Pendant 20 ans, rien ne le fera revenir, ni les millions de dollars offerts par des organisateurs de Las Vegas ou Manille, ni une situation personnelle précaire après avoir été ruiné par une secte. Imprévisible et taciturne, le champion vivait reclus, fuyant les journalistes et les médias et les accusant de "monter le public" contre lui.
En 1992, il revient sur le devant de la scène pour disputer au Monténégro un "match revanche" contre Spassky avec qui il est devenu ami. Cette revanche "vingt ans après" -pour laquelle il touche 3,35 millions de dollars- se déroule dans l'ex-Yougoslavie au mépris d'un embargo économique de l'ONU alors en vigueur. Après avoir encaissé la prime de vainqueur, il est inculpé par la justice américaine de transaction commerciale illégale et sous le coup d'un mandat d'arrêt. Il est arrêté en juillet 2004 à l'aéroport international de Tokyo-Narita quand il tente de quitter le pays muni d'un passeport américain annulé. Pour éviter la prison, il avait finalement trouvé refuge en Islande où il vivra dans la discrétion. La date et le lieu de ses obsèques n'étaient pas encore connus.