Au détour d'une conversation anodine, je lui faisais part de mon agacement à voir certains édiles ne pas résider dans la commune où ils ont été élus.
"Mais est-ce possible, du moins est-ce légal" vous dites-vous?
Soyons clair. Le Code Electoral pose clairement le principe en matière d'éligibilité:
Art.L-228, deuxième alinéa:Or, ont la qualité d'électeurs:
Sont éligibles au conseil municipal tous les électeurs de la commune et les citoyens inscrits au rôle des contributions directes ou justifiant qu'ils devaient y être inscrits au 1er janvier de l'année de l'élection.
Article L11Le droit étant la science des exceptions, le principe de la résidence réelle est tempéré par la possibilité d'être éligible en qualité de maire d'une commune dès lors que l'on s'acquitte régulièrement d'une des quatre contributions directes communales (taxe foncière sur une propriété bâtie, taxe foncière sur une propriété non bâtie, taxe d’habitation, taxe professionnelle) depuis plus de 5 ans.1° Tous les électeurs qui ont leur domicile réel dans la commune ou y habitent depuis six mois au moins ;
2° Ceux qui figurent pour la cinquième fois sans interruption, l'année de la demande d'inscription, au rôle d'une des contributions directes communales et, s'ils ne résident pas dans la commune, ont déclaré vouloir y exercer leurs droits électoraux. Tout électeur ou toute électrice peut être inscrit sur la même liste que son conjoint au titre de la présente disposition ;
(...)
Comme les juristes aiment se couper les cheveux en quatre, les alinéas 3 à 5 du même article L.11 consacre une exception à l'exception, donc retour à la règle principale:
Toutefois, dans les communes de plus de 500 habitants, le nombre des conseillers qui ne résident pas dans la commune au moment de l'élection ne peut excéder le quart des membres du conseil.Donc, être maire et ne pas résider réellement dans la commune où l'on est élu est possible.
Dans les communes de 500 habitants au plus, ce nombre ne peut excéder quatre pour les conseils municipaux comportant neuf membres et cinq pour les conseils municipaux comportant onze membres.
La question qui demeure est: est-ce souhaitable?
Citons pour l'exemple l'ancien député-maire de Poissy dans les Yvelines qui cumulaient visiblement les tares comme on cumule les mandats. Passons sur le fait qu'il ait été déchû de son mandat pour nous concentrer sur le fait que Monsieur avait sa résidence réelle dans une commune voisine.
Le cumul de mandats a lourdement tendance à couper l'élu de la réalité quotidienne de sa commune. Déjà qu'un député-maire ne tient généralement une présence en sa mairie qu'une fois par semaine (au mieux!), si celui-ci n'y demeure pas (ou n'y travaille pas), comment connaître la réalité du terrain?
Oui, le maire est un homme de terrain, au plus près de la réalité des Français.
Ce n'est pas juste un Directeur Général sachant s'entourer de personnes de qualité bien qu'il doit avoir nécessairement cette qualité.
A Madame qui n'est pas une farouche opposante à ce qu'un maire vive dans la commune qu'il dirige, je rétorquai:
"De la même manière, un Chef d'Etat doit-il vivre dans le pays qu'il dirige?Je n'ai pas réussi à convaincre Madame cette fois-ci.
- Ce n'est pas la même chose !
- A quel titre?
- Il n'a pas les mêmes pouvoirs?
- C'est méconnaître lourdement le rôle d'un maire. Si le Président est le premier magistrat de France, le maire est le premier magistrat de la commune. Il cumule des prérogatives de police, de réprésentation en justice, des pouvoirs en matière de santé, d'éducation, etc..."
Mais il me semble que laisser un individu diriger un territoire sur lequel il n'a pas de réelles attaches est une brèche permettant le parachutage politique, expression du fonctionnement baronnique des partis politiques.
Outre le fait que je sois en faveur d'une interdiction totale de cumul des mandats (autre que maire et président de communauté de communes ou d'agglomération), j'estime qu'un élu doit vivre le quotidien des Français qui leur ont accordé leur confiance.