Magazine Environnement
Entre la Jordanie et Israël apparaissent les rives de la mer Morte. Elle expire là, sous un soleil de plomb, abreuvée d’un flot de baigneurs indolents, incapables de la moindre brasse dans cette eau dont le taux de salinité, 33 %, est dix fois plus élevé que dans les océans. Une goutte dans les yeux brûlerait comme de l’acide. Mais pour la peau, cette concentration unique de minéraux et de micro-organismes possède toutes les vertus. L’air y est aussi plus pur qu’ailleurs, la pollution quasi inexistante. Un monde à part, qui peu à peu s’évapore, ne recueillant de sa source que des larmes : le fleuve Jourdain s’épuise à irriguer l’agriculture, l’industrie, les villes. À cela s’ajoutent le réchauffement climatique et surtout l’exploitation de la potasse, qui engloutit chaque année 300 millions de mètres cubes d’eau, soit un quart des pertes de la mer Morte. Alors, bien sûr, le niveau descend – de 1 mètre par an, c’est le plus bas du globe, à moins 420 mètres – et la terre, bouleversée, se venge. Depuis les années quatre-vingt, le sol s’affaisse, criblant les côtes de cratères bouillonnant d’eau sale. Peut-on ressusciter la mer Morte ? Le projet pharaonique d’un canal creusé sur 200 kilomètres jusqu’à la mer Rouge pourrait renflouer ce « grand lac », tout en approvisionnant par dessalement les pays riverains. Cette solution inquiète pourtant les écologistes pour qui seule la réhabilitation du Jourdain peut éviter un désastre.