Je prolonge mes vacances tant que c’est possible en me disant qu’il sera toujours temps d’affronter la fournaise et la « civilisation ».
Je suis allée faire un tour, hier au festival d’Aurillac. J’aurais pu mettre les photos que j’y ai faites, mais je n’ai toujours pas le cordon de mon appareil pour les transférer. J’ai assisté à l’inauguration très peu solennelle du Festival en présence du maire et d’un sénateur, je crois, si j’ai bien compris. Ils ont fait un excellent numéro en mettant des masques anti-grippe, pendant qu’un comédien lisait le texte officiel envoyé par la Bachelot pour se prémunir de l’horrible virus, le lieu d’un festival, de rues de surcroît , n’étant pas favorable à l’isolement qu’elle préconise. On est en plein Absurdie, thème choisi pour les 14è rencontres d’Aubrac – auxquelles j’espère pouvoir assister ce soir. La suite de l’inauguration fut très politique avec la ridiculisation de quelques acteurs déguisés en flics, prenant d’assaut la façade de l’Hôtel de Ville et d’autres, en bleu de travail, gréviste voulant tout faire sauter avec des bonbonnes de gaz, jusqu’à ce que l’explosion envoie dans la foule des centaines de nez rouges : « Rire ou périr » est le slogan de cette édition du Festival. Que dire à part ça ? Qu’il y faisait très chaud et que les choix des spectacles, je les ai faits en fonction des lieux et de l’ombre qu’ils proposaient. Très inégaux évidemment.
Dans les Inrocks de cette semaine, la rentrée littéraire est lancée et on ne sait plus où donner de la tête. Allons au plus simple, à ce qui n’a pas été publié. Je m’explique. Dans un article de Nelly Kaprièlian, on parle du dernier Beigbeder, mais surtout on révèle dans l’intégralité un passage de son roman qui n’a pas été publié, qui concerne le préfet Jean-Claude Marin :
Personne ne parle de Jean-Claude Marin. Normal : c’est chiant d’être Jean-Claude Marin. Physiquement, Jean-Claude marin ressemble à Alabn Ceray (l’acteur porno) mais sa vie est moins rigolote. Jean-Claude Marin demande des compléments d’informations ou des enquêtes préliminaires, fait appel des jugements, oublie de saisir les juges d’instruction, prononce des non-lieux (affaire des frégates de Taïwan), ou classe les dossiers sans suite. Jean-Claude Marin fait preuve d’une incroyable docilité et, comme tous les gens qui s’écrasent devant les plus forts, il se rattrape sur les plus petits. Il faut savoir que Jean-Claude Marin peut détruire la vie de n’importe quel habitant de la capitale de la France. Cette page est de loin la plus dangereuse que j’aie jamais écrite de ma vie. S’il est agacé, Jean-Claude Marin peut envoyer une escouade de flics chez moi ou chez Grasset quand il veut.
Cette page « dangereuse » a été supprimée. Autocensure de l’auteur, de l’éditeur ? je voudrais faire remarquer qu’il se classe dans la catégorie des « plus petits », des humbles, des anonymes. C’est faire preuve d’une grande modestie, Monsieur Beigbeder. Même par le préfet Jean-Claude Marin, je doute que vous soyez traité comme le commun de vos compatriotes. Ceci dit, ce roman (le titre = Un roman Français ) ne vaudrait le coup que par les pages qui n’y sont pas ! D’ailleurs, rien que l’aperçu de son écriture donnée dans l’extrait ci-dessus, personnellement, ne m’encourage pas à lire le reste. Si ce Roman Français n’avait d’intérêt que par ses pages absentes ? Ainsi, pourrait-on voir en Beigbeder un Bartleby (comme les a définis Enrique Vila-Matas) qui s’ignore ? La seule différence, c’est que contrairement aux Bartleby de la littérature qui sont les auteurs de livres non-écrits, d’œuvres non-réalisées, Beigbeder les a bien écrites, ces pages, mais les a fait disparaître. C’est moins glorieux.