Le dernier jour est situé juste avant le jour d'après.
Il est une veille, qui selon les gens n'a rien de funèbre. Pour autant, discret, il ne fanfaronne pas. Car il fait néanmoins partie de ces journées que l'on aimerait voire durer. Un peu. C'est comme un dimanche. En plus long. Question d'arriérés.
Pour un peu, on passerait une loi pour que ce jour-là fasse disons 30, ou 40 heures. Mais le dernier jour n'est pas le même pour tout le monde. Une loi ferait pitre.
Le dernier jour est aussi un lendemain. Celui de la veille. Qui était pareille à la veille d'avant et à celle d'encore avant. C'est les vacances. Avec le dernier jour, on ne dit plus le présent mais l'imparfait. C'était la veille.
On repère le dernier jour assez facilement. Vous êtes chez vous, en règle générale. Premier signe. Vous pensez furtivement à plusieurs reprises que demain ne sera pas comme aujourd'hui. L'imparfait devient futur. Et négation. Ce ne sera plus les vacances, vous ne vous dites pas. Le dernier jour est comme ça : farceur. Il est un jour comme les autres jours qui ne ressemble pas aux autres.
D'ailleurs, la dernière nuit est une nuit qui elle aussi n'est pas parteille. Souvent, on dort mal, ou moins bien. Et puis on a remis le réveil. Un autre signe, ça. On en sursaute d'avance. On a tellement oublié ce bruit-là.
Autre signe : lors du dernier jour, et pour certain bien avant, pas mal de pensées sont l'air de rien revenues à la surface. Des détails, dont l'addition peut faire masse.
Le mien de dernier jour m'aura permis pas mal de choses, ceci dit. Notamment (entre autres) :
- de noter que les étés dans de grandes maisons donnent envie au retour d'avoir de l'espace même si le bas de plafond réduit les possibles. A la fois, le bas de plafond est pratique pour les toiles d'arraignées.
- de me couper les ongles, de me raser, de décider de ne pas (encore) aller chez le coiffeur.
- De trier le stock de journaux qui rejoignait dangereusement le bas de plafond.
- D'aller en ville acheter du pain et de revenir bredouille après que la cinquième visitée me fit le coup de la porte close.
- de lire un bon bout du tome 2 de Millenium.
- De laver une caisse bleue.
- de rebrancher mon portable professionnel en ayant cette surprise : quasiment pas de messages. Visiblement, je n'ai pas loupé grand chose.
- De déplacer une armoire comme on s'attaque à une montagne à en être tout essoufflé au point de s'accorder illico une pause salutaire souffle court. Vacances, toujours !
- De passer l'aspirateur dans les chambres et de scier les pattes à une étagère trop grande pour nos bas de plafonds.
Une belle journée, le dernier jour. Qui n'est finalement que l'aube du prochain.