Cette seule information devrait, en soi, constituer un scandale. Pourquoi faut-il donc que la droite (j'ai l'illusion qu'un ministre de l'éducation nationale de gauche n'irait pas préparer la rentrée chez Intermarché) ne pense qu'à la consommation marchande et associe l'éducation à son côté le plus prosaïque. Le sage lit le livre, le ministre de l'éducation de droite se demande s'il a bien été acheté au meilleur prix chez Intermarché.
Parenthèse refermée : nous sommes tellement blindés que l'héritier de Jules Ferry chez Intermarché, ça passe comme une lettre à la poste. La seule question qu'on finit par se poser c'est de savoir si c'était, au moins, un supermarché ouvert le dimanche...
Non, le scandale apparemment c'est que le ministre a rencontré dans ce supermarché, où il se rendait pour préparer la rentrée, de faux quidams. Plus exactement de fausses quidames, en réalité des salariées du groupe Intermarché (des militants UMP ?), qui ont donc assuré au ministre que, vue d'un supermarché, la rentrée des classes se passait au mieux.
Rien de bien étonnant dans ce transport de troupes qui n'a comme seul défaut que d'être révélé. Rappelons qu'il fallait, aux 65 ans du débarquement, la carte de l'UMP pour s'approcher des chefs d'état présents.
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Ce qui m'étonne, moi, c'est que les faux journalistes,ceux qui accompagnaient le ministre, n'ont pas été démasqués.
Qu'allaient donc faire, en effet, des journalistes sérieux dans un supermarché, en août, avec le ministre de l'éducation nationale ? S'enquérir avec lui, et entre confrères, du prix des taille-crayons ? Quel intérêt ?
Un journaliste digne de ce nom aurait préparé un article dans son bureau, sur le terrain, sans ses confrères - entre les élèves expulsés, les évolutions du recrutement dans l'éducation nationale etc..., les sujets ne manquent pas -, et aurait attendu le communiqué du ministère informant la Nation que, vu des supermarchés, la rentrée est prête.
En réalité, chaque journaliste qui accompagnait le ministre à ce moment là est un faux journaliste (des noms !).
Un ou une journaliste qui "suit" le ministre n'est pas journaliste : c'est un attaché de presse du ministre, qui d'ailleurs vérifiera avant de terminer son article, en comparant avec le dossier de presse diffusé par le ministère, qu'il n'a oublié aucun sujet.
Je ne jette pas la pierre auxdits journalistes, ils risquent la porte s'ils ratent la petite phrase du ministre entre les tailles-crayons et les couvertures plastifiées. Ils sont victimes, avant de reproduire ce système lorsqu'ils auront pris du galon, d'une conception totalement dévoyée du journalisme, pas très éloignée des reportages caricaturés de la Pravda dans le sovkhoze X ou Y.
Tiens, une question : Monsieur Joffrin qui met un long papier de l'AFP à la une de Libé.fr consacré à ce sujet, est-ce que le ou la journaliste de Libé était à l'Intermarché avec M. Chatel et ses fausses quidames ?