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Art de ramper, à l’usage des courtisans

Par Christophefaurie

Clockwork courtier. by thegreatgonzo.

crédit illustration : thegreatgonzo

Nordine Saïdani m’envoie Essai sur l’art de ramper, à l’usage des courtisans, du baron d’Holbach : « de tous les arts, le plus difficile est celui de ramper ». Effectivement, il faut un grand talent pour être un courtisan. Pourquoi y a-t-il des courtisans ? Pourquoi les forts sont-ils courtisés ? Hypothèses :

  • Marque de mépris du courtisan. Il doit croire que celui qu’il courtise est incapable d’entendre la vérité. Peut-être y a-t-il deux façons de s’adresser à quelqu’un : flatter ses faiblesses ou s’adresser à son intelligence ? Il en est de même pour nous, le peuple, nos gouvernants préfèrent le populisme au courage.
  • Complexité de l’honnêteté. Les psychologues expliquent qu’une des règles premières de la société est de ne pas faire perdre la face à l’autre. Or, il est difficile de dire au dirigeant que si son entreprise perd de l’argent, c’est parce qu’il ne comprend pas son métier. La flatterie est une solution peu coûteuse à ce dilemme.
  • Sélection naturelle. L’amour propre élimine tout ce qui émet une critique désobligeante, donc n’est pas courtisan. Idem pour les politiques non populistes.
  • Paresse intellectuelle de l'homme. Une anecdote de début de carrière qui m’a marqué : un collègue me dit : « tu as gagné, dis nous ce que nous devons faire ».

En fait, la victoire du courtisan n’est probablement pas fatale. Après tout, le dirigeant n’est pas moins intelligent que la moyenne des Français : il sait que les courtisans lui cachent la vérité. Pour avoir un point de vue exact, il lui faut sans doute ce qu’Edgar Schein a appelé un « donneur d’aide ». C’est quelqu’un avec qui il a établi une relation de confiance, i.e. 1) qu'il ne trahira pas 2) qui est efficace dans sa fonction.

Et la question de l'amour propre ? Je crois que le donneur d'aide la résout ainsi : il présente au dirigeant des problèmes difficiles, mais formulés d’une manière qu’il sait résoudre. Peut-être aussi intervient-il assez tôt avant que le puissant n’ait fait une grosse erreur dont il se sent coupable et qu'il veuille cacher ?

Compléments :

  • Sur le donneur d’aide, la perte de face, et le substrat scientifique de ce billet : SCHEIN, Edgar H., Process Consultation Revisited: Building the Helping Relationship, Prentice Hall, 1999.

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