Tous chauffards

Publié le 19 août 2009 par Olivier57

L'atroce litanie des faits divers assénée quotidiennement par les médias porte en elle les ingrédients de la déprime.

S'il apparait indécent d'établir une hiérarchie de l'horreur, force est de constater que certains marquent plus les esprits et devraient être de nature à faire réfléchir encore plus.
Il en est ainsi de l'horrible accident de Narbonne qui a vu une poussette renversée sur un passage piéton par une voiture conduite par une vieille dame, tuant la petite fille de 18 mois qui l'occupait. Un article qui suscite tant d'intérêt  et de réactions qu'il tient la pôle position du Parisien...
Alors bien sûr, ressortent les réflexions sur le permis de conduire jusqu'à un certain âge, occultant opportunément le constat que des accidents se produisent tous les jours en France, et pas seulement avec des personnes âgées au volant.


Il est pourtant incontestable que l'extrème majorité des morts sur la route est à mettre au passif d'une certaine tribu plutôt mâles et plutôt entre 20 et 40 ans, soucieux d'exprimer leur virilité au travers des chevaux de leur caisse à roulettes, persuadés de posséder les réflexes d'un pilote de Formule 1 alors qu'ils se révèleraient le plus souvent défaillants face à un tir au pigeon.
Il y a peu, je me suis arrèté devant un passage piéton pour laisser traverser une poussette. Dans cette rue étroite à deux voies, en plein centre ville, la maman s'est donc engagée devant mon véhicule. Hélas, elle a du s'arrèter en plein milieu de la chaussée pour attendre qu'une autre voiture veuille bien la laissser rejoindre l'autre coté. Mais ce fût peine perdue.

Il a fallu attendre deux douzaines de voitures et plusieurs dizaines de secondes qui m'ont paru un siècle. Pendant ce temps, la jeune femme tournait régulièrement vers moi un visage mèlant remerciement et angoisse.  Je la sentais prête à rebrousser chemin. J'étais horrifié et commençait à déverser ma haine sur tous ces barbares.
Le croirez-vous ?  Finalement, aucune voiture ne s'est arrètée. Seul un feu rouge au loin a tari le flot. Pire, avec la poussette devant mon capot, j'entendais klaxonner derrière moi, alors que leurs conducteurs ne pouvaient ignorer les raisons de ce blocage.
La semaine dernière, c'est une autre jeune fille que j'ai vu éclaboussée par une voiture qui ne s'est pas écarté pour éviter une flaque d'eau sale.
Car c'est ainsi que cela se passe dans notre beau pays, les conducteurs ignorent les piétons et les passages protégés et ceux qui ont quelques vélléités de le faire se font aussitôt doubler ou rappeler à l'ordre par la meute les suivants au moindre ralentissement.
En Angleterre, à peine vous approchez-vous d'un passage piéton qu'une voiture s'arrète. Il m'est même arrivé d'arrèter involontairemenrt la file en marchant trop près du bord du trottoir. Aux Etats-Unis, dès qu'un bus scolaire stoppe, les véhicules des deux cotés s'immobilisent. En France, les enfants n'ont qu'à bien se tenir, les conducteurs ne sont pas câblés pour savoir qu'une trentaine d'enfants sur un trottoir mérite protection et implique prudence.
Alors, on peut parler d'évaluation des réflexes des personnes âgées. Mais l'on pourrait tout aussi bien s'intéresser à ceux qui croient être en pleine possession de leurs moyens et ne se rendent pas compte de la faiblesse de ceux-ci.
A choisir, j'aurais moins peur au milieu de conducteurs ayant dépassé les soixante-dix ans que mêlé à ces malades qui sillonnent les routes au mépris des piétons, ces tarés qui vous suivent à 3 m et à 90 km/h , ces débiles qui doublent sans visibilité, bref, ces centaines de chauffards égoïstes, termes dont le rapprochement relève sans doute à la fois du pléonasme et de l'euphémisme.