Sonatine/Sonachine (1993) de
Takeshi Kitano est le premier film que j’ai vu de son auteur et quelle ne fut pas la claque que je me suis prise devant ces images, cette musique, ces acteurs s’apparentant à des soldats de plombs ? Très vite, j’ai eu le sentiment d’assister à un chef d’œuvre. Aujourd’hui encore, mon sentiment n’a pas changé.
Murakawa est un yakuza de
Tokyo qu’on envoie à
Okinawa pour prêter main forte à un clan ami plongé dans une guerre qui fait rage. Il y débarque avec quelques hommes, apprend que les tensions sont apaisées, pourtant le clan ennemi voit d’un mauvais œil cette arrivée et contre-attaque. Murakawa subit plusieurs pertes dans son équipe et décide de se mettre au vert le temps qui les choses se tassent. Murakawa va alors prendre le temps de vivre notamment après la rencontre d’une jeune femme…
Soulignons-le, une chose qui m’a tout particulièrement frappée dans
Sonatine c’est la musique employée par
Takeshi Kitano. Joe Hisaishi signe une musique simple et efficace dont le thème principal est absolument génial. L’œuvre de Kitano est rythmé par ces petites mélodies se mariant parfaitement aux images.
La mise en scène de Kitano dans
Sonatine est belle et épurée, particulière aussi. Des plans qui laissent transparaître une magie poétique. Une peinture gravée sur pellicule. Des longs plans tirés en longueur dont règne le silence sont remplacés par la musique de Hisaishi qui s’immisce et fait de ce film, une œuvre profonde. Le temps semble comme s’être arrêté, en suspend, à l’image de ces acteurs dont le jeu est neutre, vide, comme si le poids de la mort les écrasait et les empêchait ainsi de se mouvoir. Ils sont des masses inertes.
L’œuvre de Kitano se veut grave avec une violence sèche, une non-action dont les gunfights sont statiques. La violence est également et souvent hors-champ, elle se laisse entendre et deviner. Elle nous plonge dans l’imaginaire, sans image, d’une horreur glaciale. Cet aspect côtoie des moments plus légers, ceux des jeux sur la plage. Ces moments sont également contaminés par la mort qui flotte de façon permanente au-dessus des personnages. Elle frappe avec autant de spontanéité que de force.
Sonatine de Takeshi Kitano, l’homme qu’on ne présente plus interprète à merveille le personnage principal désabusé et dépressif de cette œuvre, ses tics transparents lui confèrent un jeu à son insu, du non-jeu. Kitano est Murakawa. Il nous offre un grand moment de cinéma d’une beauté mélodique.
I.D.