Un nouveau colis piégé a bloqué la voie Z. Ils ont déroulé le scotch rouge en haut des marches, poussé tout le monde dehors. Une autre de ces bombes sans détonateur, ou avec détonateur désamorcé trop tôt, avant impact, ce qui revient au même. Les démineurs des services souterrains ont ratissé les quais en plaisantant, sans combinaison de sécurité. Un agent planté en haut des marches, derrière le scotch rouge, chargé de répéter la phrase : merci d'emprunter les autres lignes. Plusieurs jeunes types intercalés entre lui, moi, et le scotch rouge, lui ont dit : tu me fous la gerbe toi et toute ta putain de clique, et ils lui ont craché au visage. Ces jeunes types n'ont plus peur d'attraper les saloperies des autres, d'autant plus qu'ils se foutent de contaminer qui que ce soit avec Dieu sait quoi. L'un d'entre eux s'est approché pour lui coller un coup de genoux dans les couilles, l'agent a roulé jusqu'en bas du quai. L'un d'entre eux (un autre) l'a poursuivi en bas des marches pour lui coller son autocollant A4 sur la poitrine, celui qui fait :
On en voit partout des trucs comme ça. Un peu plus loin tag décalqué sur le quai voisin de l'autre ligne :
Qui prête encore attention à ces images ?
Dans le train qui nous éloigne de l'épicentre en filigrane (a jamais passé et toujours à venir), un jeune type a le temps de jouer un peu avec sa barbe de six jours avant de déclencher le signal d'urgence. Ce n'est pas un exercice, il hurle. Probablement vrai, sinon il n'aurait pas autant insisté sur la première syllabe et la négation derrière. Il sent la sueur et un parfum de synthèse comme il y en a tant, peut-être amande ou pin, je ne sais pas. Je fais semblant de me coller à lui lorsqu'il nous bouscule. Il ressemble un peu à ceux que je ramène le soir dans les couloirs déserts et avec lesquels je m'enfonce.