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Aller à Canossa, et ailleurs. Comédie des mots 3

Publié le 17 août 2009 par Hippocampe
Nous l'avons dit, tant pis répétons-le, Régine Detambel ,en plus d'être un grand écrivain, est une passeuse *.
Ainsi chaque mois nous passe t-elle un billet de sa série La comédie des mots, soit d'où viennent les expressions qui se promènent dans la langue ? Après J'en passe et des meilleures, A poil, voici Aller à Canossa - ou au diable - tout autant de circonstance que le précédent en ces temps de flux et de reflux.


L’EXPRESSION DU JOUR : " ALLER À CANOSSA"

Il y a une géographie précise des expressions et des locutions qui fait que le choix d’une destination n’est pas seulement une affaire de tourisme. Prenez Canossa, par exemple, c’est un village d’Italie, dans les Apennins. L’empereur allemand Henri IV s’y rendit en janvier 1077, ça ne nous rajeunit pas, et y resta 3 jours pieds nus dans la neige, à attendre que le pape Grégoire VII veuille bien le recevoir et lever son excommunication. Cette humiliation de l’empereur allemand laissa un souvenir si cuisant que naquit l’expression « aller à Canossa » qui s’emploie encore pour dire que quelqu’un a fait amende honorable, qu’il s’est humilié devant l’adversaire ». Bismarck en 1872, pour marquer qu’il ne céderait pas aux catholiques, s’écria devant le Reichstag : « Nous n’irons pas à Canossa ». Puis Alphonse Daudet mit dans la bouche de Gambetta le verbe « canosser », une invention à lui : « Je n’irai canosser, la corde au cou, le cierge à la main, ni à Berlin, ni à Rome. »

Aller à Cracovie, c’était dans l’argot ancien, mentir, raconter des craques et un grand nombre d’expressions furent construites sur ce genre de calembours.

Aller à Angouleme, c’était avaler de l’ancien français engouler, mettre en sa gueule, aller à Cachan, se cacher, aller à Crevant (mourir, ça va de soi), aller à Versailles, verser, aller à Dormillon, dormir. Envoyer en Cornouailles, c’est faire porter des cornes à quelqu’un.

Parmi les plus célèbres destinations figure Niort. Car celui qui va à Niort, c’est celui qui nie. Prenez le chemin de Niort, conseille Clément Marot.

François Villon disait Aller à Montpipeau pour « tricher au jeu à coups de dés pipés » et cela fait mille itinéraires pour dire en somme qu’on va au diable.  

  

Régine Detambel

* Et comme c'est une passeuse, elle passe aussi les écrivains qu'elle aime. On pourra donc la voir avec Pierre Assouline le 26 septembre à 16 h à la Bibliothèque de Levallois, avec Jean-Marie Laclavetine le 29 septembre à 19 h à la Bibliothèque de l'Horloge de Cergy, puis avec Lydie Salvayre, Anne-Marie Garat, Martin Winckler ... Mais tout cela est sur l'agenda de son site.

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