Magazine Politique
Xavier Bertrand renvoie la collaboration avec Philippe de Villiers à une logique de dialogue naturel davantage que d'alliance politique.
La vie publique française bataille pour définir les fonctions nouvelles des partis politiques.
L'opinion publique française attend des partis politiques davantage de renouvellement de l'offre mais aussi davantage d'harmonie au sein même de chacun des partis politiques.
Pour expliquer, voire justifier, une partie de la désaffection qui frappe les partis politiques, il est de bon ton de les présenter comme des lieux de discordes généralisées. Est-ce ce climat de discorde qui discrédite les partis politiques ou l'organisation actuelle des partis qui explique ce climat de discorde ?
La 1ère question, et probablement la question centrale, est la suivante : est ce que les actuelles étiquettes politiques reflètent une réalité de classification d'opinions ?
La distinction droite-gauche est née en France le 11 septembre 1789.
Ce jour là, les partisans d'un pouvoir monarchique fort se groupèrent à la droite du Président de l'Assemblée Constituante. Par la suite, les tenants d'une " idéologie conservatrice " seront qualifiés de " droite ".
La gauche de 1789 est révolutionnaire. Elle triomphe de l'ancien régime et porte la bourgeoisie au pouvoir. Contre ce nouveau pouvoir, en 1848, une " nouvelle gauche " de plus en plus socialiste vient apporter la contestation.
En 1871, les querelles politiques opposent alors trois courants :
- un courant monarchiste,
- un courant bonapartiste,
- un courant républicain.
Avec la révolution russe en 1917, des " idées neuves " élargissent le débat.
Une nouvelle ligne de fracture apparaît.
Pour les uns, il est hors de question d‘importer une " révolution étrangère " qui viendrait bouleverser les acquis de la " révolution française ".
Pour d'autres l'approche internationale doit emporter ces barrières " conservatrices ".
A cette époque, l'internationalisme réorganise donc les clivages.
Quelques années plus tard, la " révolution nationale " de Vichy va à son tour structurer durablement l'échiquier politique.
Puis c'est au tour du gaullisme de marquer les positions avec une logique d'action et d'homme providentiel.
Au début des années 1970, c'est la question du " programme commun de Gouvernement " qui entraîne les nouveaux positionnements.
Ces exemples précis montrent qu'à chaque époque un thème structurant a redistribué les forces politiques.
Qu'est ce qui structure actuellement la vie politique française ?
C'est peut-être le vide comme réponse à cette question qui explique les actuels flottements ?
En principe, chaque parti politique a vocation à rassembler d'abord celles et ceux qui se reconnaissent dans une certaine " culture du pouvoir ". Sans parler d'idéologie, un parti politique doit être un support culturel qui définit un mode de pensée susceptible d'imprégner une organisation politique, économique et sociale.
C'est cette fonction explicative globale qui est l'une des raisons d'être des partis politiques et l'une des fondations de la démocratie.
Sans présence idéologique, sans cohérence conceptuelle efficace, que peut recouvrir l'existence même d'un parti politique ?
Faute d'un cadrage conceptuel, chaque parti porte une menace permanente d'atomisation ou de paralysie.
Dans ce contexte, l'entrée de Philippe de Villiers au sein de l'UMP a ouvert un débat de fond car ce leader est l'un des rares à disposer d'une ligne politique solide.
Comment expliquer qu'il soit "Sarkocompatible" au même titre que la "nouvelle gauche" avec la ligne présidentielle ?
Philippe de Villers n'est-il pas trop emblématique pour être "Sarkocompatible" à la différence des leaders de "gauche tendre" peu connus de l'opinion ?
Pour éviter d'avoir à répondre tout de suite à cette question de fond, Xavier Bertrand a choisi de banaliser la liaison en la réduisant au "dialogue naturel". Il n'est pas sûr que l'explication soit plus aisée demain ?