Le financement du développement des transports en commun en Ile-de-France tourne au casse-tête, tant les besoins sont considérables en particulier dans la perspective du Grand Paris. Dans son rappport sur le financement du Grand Paris, le Député Gilles Carrez (UMP) vient de déposer des propositions qui font débat jusque dans les rangs de l'UMP. Celles-ci reposent sur un accroissement de la fiscalité. Prudent, le parlementaire a insisté sur le fait que ce document était "provisoire, temporaire et qu'il n'engageait que lui". Parmi les mesures envisagées : une hausse progressive des amendes de stationnement qui passeraient de 11 à 20 euros.
Racket fiscal
Je trouve cette proposition profondément immorale. Laurent Fabius (PS) nous l'avait déjà servie en 1985, lorsqu'il était Premier ministre, en faisant passer l'amende de stationnement de 50 à 75 francs pour financer la modernisation de la police. Cela revient à inciter à contrevenir à la réglementation pour financer les dépenses publiques. Les "mauvais citoyens" seraient donc, finalement, de "bons citoyens" car contributeurs. En outre, si cette proposition devait être retenue, elle ne manquerait pas d'engendrer de nombreux excès de zèle de la part d'agents "au rendement".
D'une façon générale, dans une optique de développement durable, je suis plutôt favorable à ce que les automobilistes participent au financement des infrastructures de transports en Ile-de-France. Mais cela ne doit en aucun cas tourner au racket fiscal. Les automobilistes contribuent déjà davantage que les autres au financement de la région à travers la part régionale de la TIPP (taxe sur les produits pétroliers) qui a augmenté en janvier 2007, rapportant 80 millions d'euros supplémentaires dans les caisses de la Région. En outre, dans le prolongement du Grenelle de l'environnement, ils acquitteront en plus la taxe carbonne.
Le financement des projets de transports en commun par le biais de l'augmentation des amendes et d'autant plus une mauvaise idée, que cela ne rapporterait, selon les estimations du rapport Carrez, pas plus de 100 à 120 millions d'euros par an. Très loin des 20 à 23 milliards à trouver d'ici 2025 pour financer les projets du SDRIF et ceux proposés par le Secrétaire d'Etat au Grand Paris, Christian Blanc. D'autant qu'à ces investissements, s'ajouteront aux dépenses d'exploitations chiffrées à 18,5 milliards d'euro pour les 15 années à venir.
Le rapport Carrez comporte d'autres propositions, comme le relèvement du versement transports acquitté par les entreprises, ce que celles-ci refusent, ou la récupération et l'actualisation de la taxe sur les surfaces de bureau qui sert depuis 1999 à alimenter le FARIF (Fonds d'Aménagement de la Région Ile-de-France). Pour Gilles Carrez, le recours à la fiscalité est "le seul moyen de garantir un financement sérieux qui ne pèse pas sur nos enfants". D'autres, plaident pour un recours à l'emprunt, à l'instar du MEDEF Ile-de-France qui en appelle à la Commission Juppé-Rocard pour prendre en compte ce financement.
De son côté, Roger Karoutchi, président du groupe de la majorité présidentielle au Conseil Régional d'Ile-de-France a pris position contre toute augmentation de la fiscalité, tant qu'une amélioration concrète du service ne sera pas perceptible.
En tout cas, ce débat pèsera dans les prochains mois sur les élections régionales de 2010.