Lieux communs : le monde est ultra-libéral

Publié le 15 août 2009 par Vincemobile

&MS明朝&


J’en avais parlé il y a quelques mois mais Peter Sloterdijk remet ça. Il s’est de nouveau lancé dans une diatribe contre l’Etat omnipotent écrasant toute initiative. Cette charge virulente est intéressante car elle est argumentée et précise. Il nous rappelle juste que le capitalisme ou le libéralisme n’existent plus depuis belle lurette. Voici une citation intéressante :

A l'évidence, nous ne vivons pas le moins du monde dans un système capitaliste - comme le suggère de nouveau, depuis peu, des discours aussi irréfléchis qu'hystériques. Nous vivons dans un ordre des choses qu'il faut définir, avec prudence, comme une forme de semi-socialisme animé par les médias de masse, qui se développe grâce à l'Etat fiscal...

On hurle contre le néo-libéralisme mais nous sommes sorti depuis longtemps de ce système. Nous sommes plutôt à l’ère d’un socialo-féodalisme.

Système socialiste car n’oublions pas que l’Etat absorbe environ 50% de la richesse produite chaque année. En France par exemple, sur 100 de salaire payé par votre entreprise, vous ne touchez qu’un peu plus de 50, déduction faite des charges sociales et patronales. Si vous comptez en plus la TVA qui renchérit de 5,5% à 19,6% le coût de vos achats, l’impôt sur le revenu et j’en passe vous ne touchez in fine que 30 à 40% du salaire réellement payé par votre entreprise. On est donc très loin du libéralisme, évidemment ultra, dénoncé la bouche en cœur par la bien-pensance.

Mais ce système socialisant est couplé avec un néo-féodalisme triomphant. Certaines catégories ont accumulé au fil des ans de multiples privilèges fiscaux et s’enrichissent grâce aux largesses de l’Etat (la dernière folie étant les subventions pour l’énergie verte qui feront la fortune des possédants). Ces catégories se perpétuent grâce à la baisse drastique des impôts sur la succession et deviennent de plus en plus étanches. En France toujours, le taux de fils d’ouvriers entrant dans les grandes écoles est de plus en plus faible. Une nouvelle noblesse est née, j’aime beaucoup cette formule de Chevenement parlant des « élites mondialisées ».

Finalement, ce système non-libéral au possible a sa logique interne. D’un côté, la socialisation rampante des Etats permet de distribuer quelques piécettes afin d’éviter que le couvercle de la marmite ne saute. On achète la paix sociale et on évite ainsi de remettre en cause le pouvoir d’une oligarchie ayant confisqué les richesses avec la complicité des politiques. Enfin, les alter-mondialistes jouent le rôle d’idiots utiles en faisant croire que le monde est libéral alors qu’il est en train de revenir vers un système d’Ancien Régime.

C’est pour cela que l’article de Peter Sloterdijk est important car il dénonce les choses telles qu’elles sont. La réaction de journaux comme Marianne est donc totalement à côté de la plaque. Ce texte n’est pas une provocation à l’heure du libéralisme triomphant mais un constat amer et désabusé sur le néo-féodalisme actuel.