Croissance…on attendait Blücher, ce fut Grouchy !

Publié le 14 août 2009 par Nicolas007bis



Décidément, ils sont indécrottables, ils ont réussi à me faire sortir de ma torpeur estivale !

Voilà que Christine Lagarde, qui nous avait pourtant habitués à surestimer systématiquement ses prévisions en matière de taux de croissance, nous annonce fièrement .....qu'elle s’est trompée, mais dans l’autre sens !...elle l’a sous-estimé (plus précisemment dans ce cas, ce sont bien évidemment les prévisions de l'INSEE qui étaient fausses) !

Au lieu des -0,6% attendus c’est + 0,3% …pour une fois qu'on attendait Blücher, ce fut Grouchy !

Et elle de s’exclamer: "Après quatre trimestre de croissance négative, la France sort enfin du rouge" !!!

Ce qui est amusant dans cette déclaration, c’est qu’il y a 1 an quasiment jour pour jour, alors que l’INSEE venait d’annoncer une décroissance (et non pas une croissance négative) de 0,3 %, cette même Christine Lagarde estimait d’une part que "Les circonstances économiques devraient créer les conditions d'un rebond la fin de l'année 2008, début 2009 seront plus favorables" et d’autre part qu’il était tout à fait incongru de parler de récession : "Toute personne qui crierait au loup à la récession aurait un trimestre d'avance" arguant du fait que, techniquement, la récession suppose au moins 2 trimestres consécutifs de décroissance.

Or, même si charitablement on passe sur le fait que, encore fois, ses prévisions optimistes se sont révélés complètement fausses, on ne peut s’empêcher de s’étonner que là ou il fallait au moins 2 trimestres pour parler de récession, il n’a fallut qu’un malheureux et inespéré +0,3% sur un seul trimestre pour que Christine Lagarde se précipite pour proclamer que la France « sort enfin du rouge » !!!

Mais en la matière, une fois n’est pas coutume, la palme ne revient pas à Christine Lagarde pour ses habituels propos lénifiants destinés à rassurer le bon peuple, mais à Luc Chatel et Patrick Devedjian pour leurs grotesques fanfaronnades.
En effet, à propos de ce même malheureux et inespéré +0,3%, le premier nous prétend qu'il valide les "choix économiques" de l'exécutif et le second que c'est une preuve que le plan de relance a porté ses fruits puisque "c'est seulement l'investissement public qui fonctionne", alors que "l'investissement privé est malheureusement déficitaire".

Alors là, il faut oser !

Commençons par cette affirmation que c’est l’investissement public qui tire la croissance.

Il semble qu’effectivement la dépense publique ait eu une très légère contribution positive à la croissance du 2ème trimestre mais relativisons : L’investissement des administrations publiques s'est redressé d'un magnifique ....0,1%, c’est maigre !

C’est d’autant plus maigre que parallèlement, le déficit budgétaire a atteint 88,7 milliards fin Mai !

Par contre, là ou Devedjian a raison c’est lorsqu’il dit que "l'investissement privé est malheureusement déficitaire" !
Effectivement, et c'est le plus important, l'investissement des entreprises a encore diminué de 0,9 % et celui des ménages dans l’immobilier de1,8 % !

Dans ces conditions, il me semble quelque peu indécent de s’auto-congratuler pour un tel résultat !

Ensuite, rappelons que la France n’est pas la seule à profiter de cette heureuse surprise puisqu’en Europe, l’Allemagne et le Portugal ont également fait +0,3% au 2ème trimestre.

D’ailleurs, à ce propos, il n’est pas absurde de penser que ce bon score qui est en partie lié à l’augmentation des exportations ….vers l’Allemagne !....ce qui signifie que si l’Allemagne n’avait pas également connu un petit regain de croissance, le taux de croissance de la France n’aurait probablement pas été aussi « élevé » !

D’autant plus qu’il semble que cette hausse des exportations en volume (+1%), cache en fait une baisse en valeur (-1,7%) ce qui semble surprendre les économistes et qui en tout cas, ne révèle certainement pas un début de tendance de redressement de notre commerce extérieur.

L’autre explication donnée à ce taux de croissance est la bonne tenue de la consommation des ménages portée de manière structurelle par le poids des redistributions dans le budget des ménages (le fameux modèle social) et de manière plus conjoncturelle par la prime à la casse et par la déflation.
Je laisse de côté le premier élément qui ne doit rien au gouvernement actuel. Parmi des 2 derniers éléments, le premier est effectivement à mettre à l’actif de l’exécutif mais quid lorsque cette prime disparaitra ? le second, par contre n’est évidemment aucunement maitrisé par le gouvernement et ne peut, lui non plus, certainement pas être considéré comme pérenne (en tout cas il faut l'espérer).

Tout cela pour dire que, encore une fois, le gouvernement fait le fier à bras au détriment de la plus élémentaire des prudences. A systématiquement minimiser les mauvaises nouvelles et à s'attribuer, en les surévaluant les bonnes, il ne faudra pas ensuite qu'il s’étonne que les citoyens/électeurs ne comprennent pas pourquoi le chômage continue à augmenter, leur pouvoir d’achat repart à la baisse et les déficits continuent à se creuser. Il ne faudra pas qu'il s'étonne que les citoyens/électeurs aient l'impression de s'être fait manipuler !