En été, quand ma Grand-Mère Zosia venais chez nous, elle apportais les meilleures jagodzianki, petits pains aux myrtilles, que je n’ai jamais mangés.
Elle n’était pourtant pas l’auteur de ces délicieuses viennoiseries. Elle les achetait au Bazar Różycki, un ancien marché se trouvant dans le quartier de Praga, aux abords duquel elle habitait.
A chaque fois que je me rendais avec Maman chez ma Grand-Mère, je les suppliais de m’emmener faire un tour au bazar. C’était un voyage dans un autre monde.
Dans les années 70 et 80, quand on ne trouvait dans les magasins que des étalages vides, ce marché était un endroit où florissait l’initiative privée, qui se développait sans être gênée. On pouvait tout y trouver. Je me rappelle toujours de stands avec de magnifiques robes de mariée, avec des vêtements colorées issu du trafic clandestin avec la frontière de l’ouest, ou encore de pyramides de livres et de cassettes vendus sous une grande pancarte signalant : Vente de cassettes de livres interdits :) C’est justement à côtés de ce dernier que nous nous arrêtions le plus souvent. A l’époque, ma Mère dirigeait une librairie avec des livres d’occasion. Je me rappelle l’envie avec laquelle elle regardait ces livres qu’elle ne pouvait que rêver de voir dans sa librairie…
Quand je ferme les yeux en essayant de me souvenir de cet endroit, je vois les habitués du bazar attirant les badauds en jouant au bonneteau, de vieilles dames vendant des pyzy, qui sont des boulettes de pommes de terre farcies de viande hachée. Mais je me rappelle surtout les chariots remplis de jagodzianki, dégageant une saveur sublime.
C’était une vrai caverne d’Ali Baba, surtout pour la gamine que j’étais à l’époque, un monde irréel empli de trésors et de dangers. Le portail du bazar à peine franchi, il fallait toujours faire extrêmement attention afin de ne pas se faire subtiliser sa carte d’identité ou son portefeuille…
Au milieux des année 90, P’tit Suisse et moi avons déménagé dans le studio de ma grand-mère. Quasiment tout de suite, j’ai amené P’tit Suisse au bazar pour acheter des jagodzianki. Mais… à part des stand surchargés de camelotes made in China, quelques vieux habitués du coin cuvant quelques verres de vodka, la casquette à carreaux nonchalamment portées sur l’oreille, mais sans le sourire charmant de mon souvenir, nous n’avons rien trouvé. Il n’y avait plus de pyzy chaudes, pas de tripes à la varsovienne. Ni de jagodzianki non plus. Peut-être n’était-ce plus la saison. Peut-être étions-nous venus trop tard dans la journée... Mais je pense que c’est plutôt moi qui ai grandi. Tout ce que j’admirais avec les yeux d’un enfant enchanté, au fil du temps qui s’écoule impitoyablement, n’a pas survécu à la triste réalité.
J’ai essayé plusieurs recettes, mais il y avait toujours quelque chose qui clochait. Cet été, Polka m’a persuadé de faire encore un effort et d’essayer la recette de Tatter. Bien sûr, je ne croyais pas du tout que les jagodzianki de Tatter seraient sans reproches. Erreur! Ces jagodzianki sont quasiment aussi bons que ceux de mon enfance, achetés par ma Grand-Mère au Bazar Różycki… Quasiment, car ces derniers ont la saveur irrésistible des souvenirs :)
Jagodzianki aux saveurs de citron et vanille – 16 pièces:
Je vous donne le recette de Tatter avec mes modifications
Pâte:
500 g de farine fleure
1 et 1/2 c. à c. de levure boulangère
1 verre de lait tiède (temp. env. 40°C)
2 œufs
50 g de beurre
80 g de sucre
2 c. à s. de sucre grossièrement moulu avec un demi bâton de vanille
zestes d’un citron bio
1 pincée de sel
Farce:
500 g myrtilles*
3 c. à s de sucre
1 c. à s de maïzena
Crumble:
80 g de farine
40 g de beurre
40 g de sucre
zeste d’un citron bio
En plus:
1 œuf légèrement battu
1 c. à s. de lait
Préparation:
Laver les citrons sous l’eau chaude.
Préparer le levain en mélangeant la levure boulangère avec une cuillère à soupe de sucre et une cuillère à soupe de farine. Laisser le mélange au chaud afin qu’il double volume.
Commencer à préparer la pâte en tamisant le reste de farine. Y ajouter le levain, les œufs, le sucre, le sucre vanillée, le reste du lait, le zeste de citron ainsi que le sel.
Bien pétrir la pâte à l’aide d’un robot, jusqu’à ce qu’elle devienne brillante (dans mon cas, je devrais plutôt dire « quand elle ne collera plus à tout ce qu’elle touche » ;)), y ajouter le beurre fondu et refroidi. Pétrir de nouveau 5 minutes environ.
Transférer la pâte dans un grand saladier, la couvrir de film alimentaire et mettre dans un endroit chaud afin qu’elle double, voire triple le volume.
Quand la pâte est prête, préparer les myrtilles. Les laver et laisser égoutter un bon moment. Ensuite les mélanger délicatement avec le sucre et le maïzena.
Dégazer la pâte et la diviser en 16 petites boules. Aplatir à la main chaque boule en formant une galette. Au centre de chaque galette déposer une cuillère à soupe de farce aux myrtilles. Coller soigneusement les bords en formant un petit pain.
Poser les jagodzianki sur une plaque avec le papier sulfurisé, en laissant une espace entre chacun. Les mettre de nouveau au chaud et laisser doubler de volume (environ 45 minutes).
Faire préchauffer le four à 180°C.
Préparer le crumble en malaxant avec les doigts tous les ingrédients jusqu’à ce que la pâte devienne sableuse.
Dès que les jagodzianki sont prêts, préparer un mélange d’œuf légèrement battu avec une cuillère à soupe de lait froid. A l’aide d’un pinceau, en badigeonner la pâte, la saupoudrer du crumble et mettre au four.
Faire cuire 30 minutes environ ou jusqu’à ce qu’ils deviennent joliment dorés. A la sortie du four les faire refroidir sur une grille.
Bon appétit!
*Si on remplace les myrtilles par les framboises on obtient les malinianki. Il faut mettre des groseilles, voir des cassis, pour obtenir les porzeczanki :)
PRZEPIS PO POLSKU: Jagodzianki