En moins de quinze ans, le portable est entré dans la vie quotidienne de chacun d'entre nous. Depuis, on parle autant de son mobile qu'avec son mobile. Certains déplorent le lien social menacé, la civilité mise à mal, la solitude à l'heure de la communication. Cependant, les pratiques ne ressemblent guère à ce qu'on en dit : on se plaint de devoir être toujours joignable, mais on multiplie les stratégies pour l'être seulement selon sa convenance ; on se délecte d'anecdotes sur les nuisances quotidiennes, mais on s'en arrange avec une facilité surprenante. Il fallait donc ouvrir l'enquête sur ce qui est aujourd'hui - bien plus qu'un outil de travail ou un gadget- un objet qui traduit le plus intime de la personne, véritable prolongement de soi. Pour la première fois, une étude explore à la fois les comportements, les discours et l'imaginaire qui entourent le téléphone mobile. Pendant six mois, à l'initiative de l'Association française des opérateurs mobiles (AFOM), une équipe de chercheurs a observé les usages du portable dans les jardins publics, les rues, les transports en commun, les bibliothèques ou les entreprises, mais aussi les récits et les films de fiction. Ils ont saisi sur le vif les manières de faire et d'être que révèlent ces usages. On découvre ainsi la part d'invention qui revient à chaque utilisateur. Car plutôt que nous dicter sa loi, le portable nous met en situation de devoir maîtriser des contextes de communication imprévisibles. Charge à chacun de savoir se mettre en scène, arbitrer sans relâche entre plusieurs ordres de priorités, orchestrer des situations où l'on parle pour plusieurs publics à la fois. Les utilisateurs du téléphone mobile développent désormais des compétences qui font d'eux de petits ingénieurs virtuoses de la communication ordinaire.
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