Cunégonde contre la grippe A : 9

Publié le 13 août 2009 par Porky

(Suite de la scène 12)

LA VOIX DU PRESIDENT

Ainsi tout est réglé. Ces ministres débiles

Ont fini par cesser de jouer les imbéciles !

LA VOIX DE SCARLATINA

Nous avons les vaccins. Ils sont chez Daktari.

En voulez-vous toujours, o mon amour chéri ?

LA VOIX DE CUNEGONDE

Rosie n'est pas coupable, il faut lui pardonner

Et dans son triste igloo, ne plus l'expédier.*

LA VOIX DU PRESIDENT

Mais je veux que l'on pende aux plus hautes fenêtres

Ce docteur à la noix avec ou sans ses guêtres.

DAKTARI (Se tenant le cou)

A l'espagnolette, me pendre !

ROSIE

                                                Ah ! Vengée !

Pour quelque chose enfin, tu vas donc gigoter !

LA VOIX DE CUNEGONDE

Ne soyez pas cruel, et ne soyez pas sot.

Le voyez-vous flotter ainsi qu'un beau drapeau ?

Ce serait, croyez-moi, assez peu politique

En plus de n'être pas vraiment très esthétique.

LA VOIX DE SCARLATINA

Et puis il a montré, avec beaucoup d'éclat,

Qu'on pouvait contre nous commettre un attentat

Et qu'il était aisé de voler les vaccins.

LA VOIX DU PRESIDENT

Que Rosie sur le champ subisse son destin !

ROSIE (Soupirant)

Et c'est bien reparti ! Me voilà de nouveau

En train d'être roulée au fond du caniveau !

LA VOIX DE CUNEGONDE

Quand vous aurez fini de gronder, de punir,

Sans doute pourrez-vous d'autres discours tenir.

Vous n'avez rien à faire ou bien à pardonner

Puisque dans un bel ordre on a tout fait rentrer.

Il vous faut simplement dire si d'aventure

Vous souhaitez encor qu'on fasse la piqûre.

LA VOIX DU PRESIDENT

Mais je me sens très bien ! Je ne me suis couché

Que pour mieux réfléchir, et pour mieux cogiter.

Des réformes je veux, plein de belles réformes,

Et pour les mettre en œuvre, il faut bien être en forme.

Je me lève à présent.

LA VOIX DE SCARLATINA

                                  Quelle résurrection !

FIFI

Et pour nous, ô Seigneur, que de confusion* !

Je reconnais bien là sa grande habileté

A nous duper ainsi, à nous faire tiquer !

LA VOIX DU PRESIDENT

Cependant, je le sais, il faut que le vaccin

Soit testé sur le champ. Dites à ces mandrins

Qu'ils retroussent leur manche et se laissent piquer.

Ainsi de la Patrie auront-ils mérité.

J'étais prêt je le jure à ce pieux sacrifice,

Mais ce serait hélas faire grande injustice

Que de priver Rosie, Daktari, la Madone,

Lanlan et puis Fifi, gloires de l'hexagone,

D'un geste aussi sublime et désintéressé.

Qu'il en soit fait ainsi. Je vous en prie, sortez.

(Scarlatina et Cunégonde sortent de la chambre.)

 

Scène dernière

Les mêmes, plus Scarlatina et Cunégonde

 

CUNEGONDE

Vous avez entendu ce qu'il vient de nous dire ?

FIFI (Piteux)

Qu'il faut se résigner.

LA MADONE

                         Quel immonde vampire !

Nous ordonner ainsi de nous faire piquer !

ROSIE

Et ça changera quoi ? Tu es déjà sonnée.

Et puis tu réclamais à grand cri le vaccin :

Et bien tu vas l'avoir ; prépare donc tes reins.

LA MADONE

Mais je voulais qu'avant on l'ait beaucoup testé !

DAKTARI

Vrai, ma chère Madone, on craint pour sa santé ?

SCARLATINA

L'heure n'est vraiment plus à ces discussions.*

Nous devons à présent, malgré notre aversion,

Faire ce qu'on nous dit.

CUNEGONDE

                                       Vous n'êtes pas visée

Par son commandement.

SCARLATINA

                                         Il serait insensé

Qu'à cet effort de guerre on ose se soustraire.

Je dois être piquée.

CUNEGONDE

                                Et je suis solidaire

De votre décision. Je ne puis supporter

L'idée d'être à l'écart, je veux être piquée.

FIFI

Est-il vraiment utile...

 

CUNEGONDE

                          Ah, plus un mot, Fifi.

Nous devons à présent relever le défi.

Allons tous de ce pas tester notre vaccin

Et sublimer ainsi notre pauvre destin.

(Cunégonde et Scarlatina sortent tête haute, puis les autres, tête basse, sortent à leur tour. Rideau)

 

FIN