La nouvelle a beaucoup surpris. Les Républicains, qui ne s’attendaient pas à pareille aubaine au cœur de la torpeur estivale. Les observateurs, habitués à être époustouflés par l’ingéniosité de Barack Obama dans les techniques de communication. Les Américains eux-mêmes, qui se demandent un peu quelle mouche a piqué leur président : voilà qu’il part à la chasse aux rumeurs sur sa réforme contestée du système de santé.
En effet, pourquoi Barack Obama a-t-il fait publier sur le blog officiel de la Maison-Blanche, un appel aux citoyens américains, pour qu’ils envoient, par email à son staff, les rumeurs et informations tendancieuses qu’ils pourraient glaner sur la fameuse réforme du système de santé qui fait couler tant d’encre et de salive aux Etats-Unis.
Déjà que le président Obama est accusé de vouloir avoir la mainmise sur l’information… Une contestation qui provient des médias eux-mêmes, il ne s’agit donc pas de mainmise sur les médias à la façon de Silvio Berlusconi…
La Maison-Blanche explique sa démarche par la vague de désinformation qui, selon ses dires, entoure ces réformes. Et ce ne sont pas des quarterons de conseillers un peu dépassés qui l’affirme, mais bel et bien le responsable des nouveaux médias du quartier général de Barack Obama, qui complète en précisant que ces rumeurs sont souvent sous la surface de l’eau, et se répandent de manière cachée, au détour de mails et de conversations.
Ce sont donc bien les mails et les conversations personnelles auxquels on s’attaque du côté de des collaborateurs du
président. Osé, dans un pays si ouvertement et profondément attaché aux libertés individuelles.
Ce n’est pas forcément nouveau de la part de Barack Obama. Pendant sa campagne, un site Internet créé à son initiative, www.fightthesmearhome.com, invitait les internautes à envoyer des démentis made in Obama sur des rumeurs à leurs amis, façon chaîne d’emails.
Mais là, c’est différent. Autant l’initiative du candidat Obama pouvait paraître astucieuse, en s’inscrivant dans une stratégie de conquête des électeurs, autant, aujourd’hui, c’est d’un président dont il s’agit.
Les ficelles du procédé sont de plus des plus grossières. Les accusations d’appels à la délation sont assez faciles pour ses opposants.
Il aurait pourtant été relativement aisé pour une équipe rodée à l’utilisation des nouveaux médias, de trouver une
solution technique plus adaptée : on peut imaginer qu’un forum, ou une communauté de discussion autour des rumeurs aurait pu faire davantage l’affaire, et surtout, aurait moins déclenché
d’hostilité. La discussion, le débat sont à la fois une manière de glaner des informations, de les analyser tout en engageant la conversation autour des thématiques soulevées. On rassemble des
histoires et on travaille dessus, tout est clair pour chacun, sans entourloupe. L’envoi de données par email, lui, revêt une dimension plus trouble quand à leur usage.
C’est tellement grossier, comme choix, que l’on peut se poser des questions. Ne se pourrait-il pas que le camp de Barack Obama ait lancé délibérément un os à ronger, pour
détourner l’attention ? Une histoire insignifiante dont on va parler, pendant qu’une autre histoire se joue ? Laquelle ? Les prochains jours nous le diront.
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