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La première fois que je l'ai rencontré, j'avais 17 ans et un culot monstre. Bénévole d'une microscopique radio libre provinciale, je m'étais glissée dans sa loge de l'Olympia vers midi et l'y avais attendu jusqu'à 19 h. Sans doute amusé par ma tenacité, il m'a invitée à partager le buffet avec ses musiciens et ceux de Little Bob. Et puis très très indulgent pour mon accent et mes notions d'anglais, il m'avait donné plus de 30 minutes d'interview et deux entrées backstage ! Je peux vous dire que le copain qui m'avait l'année d'avant fait découvrir The Mink Deville n'a pas mis plus de temps pour faire Vincennes-Paris et me rejoindre. Je suis certaine qu'il ne s'est pas lavé la main serrée pendant 8 jours !
Au fil des ans, j'ai vu Willy Deville 14 fois en concert. Souvent avec le super guitariste Freddy Koella. Chaque fois, sa voix m'a pris les tripes et embarquée sur les chemins du blues, de la musique Cajun et même de la salsa.
Ce soir, les mots me manquent. Plus jamais je n'irais écouter Willy Deville en concert...
Adieu Willy
Discographie
- 1977 CABRETTA
- 1978 RETURN TO MAGENTA
- 1980 LE CHAT BLEU
- 1981 COUP DE GRACE
- 1983 WHERE ANGELS FEAR TO TREAD
- 1985 SPORTIN’ LIFE
- Miracle, 1987
- Victory Mixture, 1990
- Backstreets of Desire, 1992
- (live), 1993
- Loup Garou, 1995
- Horse of a Different Color, 1999
- 2002 THE WILLY DeVILLE ACOUSTIC TRIO LIVE IN BERLIN
- Crow Jane Alley, 2005
- Pistola, 2008
- 1988 : Body & Soul
- 1994 : Bauernschach (TV)
- 2002 : Willy DeVille: The Berlin Concerts (TV)
- 2007 : Boulevard de la mort (Death Proof) : It's so easy (numéro 13 de la BO)
Biographie
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Un garçon de quatorze ans vient d’élire domicile sur le toit d’un immeuble de Mac Dougal Street. Nous sommes dans la première moitié des années 60, dans le village, à New-York. Des clubs de la rue émergent la voix rauque et chaude de Fred Neil, les cantiques folk débridées de Bob Dylan, le son électrochoc de la guitare de Jimi Hendrix. Tout cela appartient au jeune garçon.
L’initiation musicale de Willy Deville recèle le caractère vrai et entier d’un conte urbain.
Sa déjà très longue aventure discographique et scénique a exploré sensiblement les moindres recoins de la mythologie musicale de l’Amérique et de ses métissages.
En interprète-passeur, Deville est d’abord celui qui chante et joue les mots de l’Autre (le Clochard urbain et céleste, le Junkie, l’Esclave-griot, le Bluesman-country, le Tzigane, le Chicanos, l’Indien), pour emporter son public au bord de l’Amérique mainstream, « Across the Borderline ».
C’est encore cela que raconte aujourd’hui Willy Deville sur scène, en suant, avec fougue, animé par les mêmes sentiments d’urgence et de nécessité qu’à ses débuts.
En éclaireur solitaire, Deville offre un parcours musical sur plus de vingt ans, durant lequel son image de dandy-rock ne s’est pas forgée dans la seule extravagance vestimentaire de ses métamorphoses successives, mais dans le front du refus et de l’indifférence aux modes (privilèges du dandy) dont sa musique est l’emblème : dès ses débuts, Deville est à contre-courant quand, âgé de dix-neuf ans, en pleine vague punk new-yorkaise, il rejoue l’âge d’or du son sophistiqué de Spector/Nitzsche, en chanteur de charme latin plus proche de Dean Martin que de Johnny Thunder.
En 1977, après s’être affirmé comme l’une des formations les plus originales de la scène punk-rock new-yorkaise, dans le club mythique CBGB’s aux côtés de Blondie ou des Ramones, les débuts discographiques fracassants de son groupe Mink Deville, se font avec la sortie de l’album Cabretta, classé « Album de l’année » par l’influente revue de critique rock Rolling Stone qui y célèbre le charme du rock’n’roll-rythm’n’blues urbain et populaire des années 1950 et 1960 entre les DRIFTERS et PHIL SPECTOR. C’est d’ailleurs Jack Nitzsche lui-même, ex grand arrangeur de Phil Spector et du Wall of Sound de l’âge d’or du Teenage pop song qui produit l’album. Deux tubes permettent la reconnaissance publique de Willy Deville, notamment en Europe, « Spanish Stroll » et « Cadillac Walk ».
Jack Nitzsche reconnaît immédiatement un artiste porteur d’une grande foi et d’un romantisme trop rare pour cette époque.
Leur collaboration fructueuse se poursuit avec l’excellent Return to Magenta la même année qui contient une ballade déchirante « Just Your Friends » co-écrite et arrangée par Jack Nitzsche.
Le chat bleu, en 1980, signé cette fois sous le nom de Willy Deville, est enregistré en partie à Paris. Son admiration pour Edith Piaf, l’amour de la ville, lui inspirent un album au romantisme triomphant avec des hymnes comme « This must be the night » et « Just To Walk That Little Girl Home », un titre composé avec le légendaire compositeur et parolier Doc Pomus.
Suivent le très soul Coup de Grâce en 1981 et Where Angels Fear to Tread en 1983, dans lequel Willy Deville surprend son public avec un nouveau tube « Demasiado Corazon » qui aborde très franchement la salsa.
« Réalisé par Mark Knophler de Dire Straits, Miracle (1987) est un excellent album, au son impeccablement lustré, où le chanteur n’a rien perdu de son âme(…) » (1)
Il s’installe ensuite à la Nouvelle-Orléans qui sera un terreau d’une grande fertilité. Dans cette nouvelle phase musicale, le chanteur se réapproprie des standards rhythm’n’blues de ses idoles et donne le jour en 1990 à un album au charme intense, Victory Mixture, enregistré avec des musiciens de légende comme Dr John, Eddie Bo, Allen Toussaint et la moitié des Meters.
Un très grand coup d’audace surgit en 1992 à l’occasion de la sortie de l’album Backstreets of Desire, avec la reprise très inattendue d’un titre qu’on croyait intouchable dans le panthéon rock : « Hey Joe » . Willy Deville nous livre une version mariachi de ce classique, qui devient un hit international. D’autres titres remarquables sur cet album, « Bamboo road », « Jump City » réalisé par Dr John, et « I Call Your Name » qui suscite l’admiration de Bob Dylan et de Van Morrison.
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En 1995, East West publie le douzième opus de Willy Deville : Loup Garou, un album envoûtant imbibé de l’ambiance vaudoue néo-orléanaise qui engage le chanteur dans une nouvelle voie artistique : « J’ai essayé dans mes nouvelles chansons des choses que je n’avais jamais tenté auparavant. Je les ai moins travaillées et les ai jouées d’une façon plus spontanée. Je voulais capturer ce sentiment de style mélangé inhérent au sud sans m’en tenir seulement au rythme et au blues. Je ne veux pas me répéter. »
L’avant dernier album de Willy est paru en 1999. Il s’appelle Horse of a different color, une vielle expression américaine qui signifie quelque chose de presque pareil tout en étant différent. Horse of a different color est une exploration bouleversante de la musique du sud, fait de reprises de titres traditionnels de la musique noire « 18 hammers », de blues dépouillé « Going over the hill », et de compositions originales comme « Gypsy Deck of Hearts » ou « Lay me down easy ».
En 2002, fidèle à sa réputation, Willy a une nouvelle fois repoussé les limites de son univers musical en partant sur la route avec une formule en trio purement acoustique, avec lui-même à la guitare ainsi qu’un contrebassiste et un pianiste. L’étape berlinoise de ce périple a donné lieu à un enregistrement publié depuis en CD et DVD, et accueilli très favorablement par la critique.
Le chapitre suivant de l’épopée extraordinaire de Willy DeVille est son nouvel album, Crow Jane Alley. Enregistré à Los Angeles sous l’égide du producteur John Philip Shenale, avec la collaboration d’un impressionnant casting de musiciens venus des quatre coins des Etats-Unis, dont le légendaire batteur Joey Waronker, Willy a réalisé là un opus particulièrement marquant. Des grooves latino de « Chieva » (avec David Hidalgo de Los Lobos) et « Come A Little Bit Closer » au poignant « My Forever Came Today », en passant par une reprise inimitable du « Slave To Love » de Bryan Ferry ou à la gravité de « Crow Jane Alley » (en hommage à son vieil ami et collaborateur Jack Nitzsche), il émane de ce disque une qualité d’âme et d’émotion supérieure qui est l’apanage des rares musiciens à avoir vécu leur art jusqu’à l’extrême. La charge émotionnelle que véhicule la voix de Willy DeVille en est un exemple des plus éloquents.
2007-09-24 CARAMBA . textes réunis par Julien Gaurichon
Version américaine et tirée à quatre épingles de Keith Richard - qui est l'un des plus fervents soutiens de son premier album, Cabretta - il débarque sur la scène punk new-yorkaise à la fin des années 70, en leader d'un groupe improbable à l'époque, Mink de Ville. Entièrement dévoué à son chanteur et guitariste, il glisse son rock latino mâtiné de cuivres, de blues et de fièvre cajun au milieu des fumées du mythique CBGB's, entre un concert des Ramones et un autre de Blondie. C'est l'heure des premiers succès, les singles Spanish Stroll et Cadillac Walk.
En 1980, Le Chat bleu est un hommage à Edith Piaf, à la France, qu'il adore, dit-il, et à Paris - où l'album est enregistré. Cinq ans plus tard, après un dernier tube d'équipe, Italian Shoes, Willy Deville met un terme à l'aventure collective. Sorti en 1987, produit par Marc Knopfler, de Dire Straits, son premier album solo, Miracle, profite du succès de Princess Bride, le film de Rob Reiner, dont Storybook Love est la chanson générique.
C'est en 1992 que Willy Deville, installé depuis une paire d'année dans un état qui lui va comme un gant de veau en agneau plongé, la Louisiane, abat sa carte maîtresse, une reprise hispanisante du Hey Joe de Jimi Hendrix. Aujourd'hui encore, elle fait régulièrement de l'ombre à l'original.
Par la suite, la carrière du "capitaine Crochet du rock" se fait plus hésitante. Les albums s'espacent et, comme souvent, sa cote d'amour devient aussi élevé en Europe qu'elle s'effondre dans son pays.
Eric Mettout, publié le 07/08/2009 sur l'Express.frWilly DeVille, chanteur et guitariste américain connu pour sa musique mélangeant le R&B, le blues et les rythmes traditionnels de la Louisiane, est mort à l'âge de 55 ans, jeudi 6 août, des suites d'un cancer du pancréas à New York. "Willy DeVille s'en est allé rejoindre cette nuit Edith Piaf, [le producteur] Jack Nitzsche et [le guitariste des New York Dolls] Johnny Thunders", a annoncé la société française Caramba Spectacles, qui organisait ses tournées.
Willy DeVille, un dandy-bandit à Paris
Le grand public connaît surtout Willy DeVille pour sa reprise de Hey Joe, classique du rock américain que Hendrix, Zappa ou Sonic Youth ont repris ou réinterprété. La version de DeVille avait la particularité d'être une reprise mariachi. Ce fut un succès qui lui valut une renommée internationale. Le musicien s'apprêtait à travailler sur un nouvel album, prévu en 2010.
LEMONDE.FR du 07 08 09
LES COMMENTAIRES (1)
posté le 08 août à 20:44
Merci pour ce texte. Même histoire que vous. Il m'a accompagné durant 25 ans. Le fait de savoir qu'il n'est plus là me fiche un blues d'enfer! Merci à ce grand homme, tout grand artiste. Il me manque déjà. Patrick