estuaires (poème de Patricia Laranco).

Par Ananda

estuaires : l’entonnoir de la somnolence,

le jour noué rendu à son point de départ

ô toi chantre des combustions spontanées

tu vis un flagellement

de vent et de fleurs

tout jour gravide de son propre lendemain,

avide du retour à sa cause première,

avide de l’océan qui claque du bec.

Du sang – Du sang – Qui souille invente les parois

qui attise la fonction mobile

de l’ombre.

Du sang – Sous les galops des paquets d’ombre obtus -

Sous leur rassemblement de muscles limoneux ;

du sang – craché sur la paix des lentilles d’eau

et nénuphars dont quelquefois l’âme s’évade.

Il y a des tas d’autres et des floppées de « je »,

et l’hésitation exponentielle du jour

et le souffle du vent qui distribue les gifles

à tour de bras pour fractionner les univers.

Il y a la vie du vent, la racine du vent,

l’évasion

du vent,

son retour

au bercail.

Il y a la jachère qui se répand et court

butant sur chaque mot, interrogeant

les phrases

et les phases des phrases à l’assaut du ciel.

Peut-être que je les ai tous imaginés,

pas moins, ces nuages au dos d’éléphant de mer,

aux balourdises de monstrueux baleinaux

que le vent très fée-du-logis cherche à chasser.

Le sarcophage plombé des murs me tient chaud,

l’habit d’abeille du vent convoite mon corps

j’ai conscience d’une jachère au sol rétif,

d’une ravine qui s’interpose toujours

pour faire résonner le mitan de la nuit

     dont les pétroglyphes ont des pattes d’araignée

              Nous est-elle ajoutée

                  ou retirée,

                               la transe ?

estuaire ligne brisée qui se souvient

pluie comme des lèvres qui butinent un corps

pluie bien à la verticale à la dérobée

dans la nuit où siègent ses bruits conspirateurs

de souris en train de s’activer sous les plinthes

soleil et pluie qui désirent mêler leurs sangs.


P.Laranco