Enfin, il semble que la réactivité aux évènements dépendent du sujet. Si Bruno Lemaire a du rentrer ventre à terre pour calmer les agriculteurs, le milliard que BNP prévoit d’attribuer sous forme de bonus à ses traders ne semble pas mobiliser plus que cela le Premier Ministre et la Ministre de l'économie ...
Rappel : " Les syndicats CFDT et CFTC de BNP Paribas ont protesté avec véhémence jeudi 6 août après la révélation de provisions d'un milliard d'euros de la banque pour payer des bonus pour 2009. Les syndicats jugent ces "pratiques scandaleuses" et "pas acceptables" ... / ... la direction confirme avoir provisionné un montant d'un milliard d'euros aux seules fins de récompenser les traders" du pôle Corporate investment banking ... / ... " - Source Nouvel Obs
Ce qui, dans le contexte économique actuel est, vous l'avouerez, une assez jolie provocation et surtout un magnifique pied de nez aux décisions du G20 ! Et que dire des entreprises qui se voient refuser des crédits de fonctionnement et sont obligés de réduire les effectifs ou de mettre la clé sous la porte ?
Le G20, quant à lui tiendra sommet fin septembre à Pittsburgh, aux Etats-Unis. Et, c'est la France qui doit proposer des "mesures concrètes à la communauté internationale destinées à discipliner les pratiques de rémunération des banques".
En attendant, le discours est toujours le même : " une action au seul niveau français sur ce problème risque d'être contre-productive en créant une distorsion de concurrence au détriment de la place parisienne, poussant par exemple des établissements financiers français à installer leurs traders à Londres ou New York si les conditions d'octroi des bonus y sont plus favorables"
C'est pas nous, c'est sont les autres ! Même argument utilisé systématiquement par ce gouvernement et sa majorité pour expliquer des "réformes" tirant vers le bas tout le pays. Même argument pour expliquer la désindustrialisation, la baisse des salaires, le chômage endémique, ..
Mais Christine Lagarde n'avait, ce matin sur Europe, d'yeux pour nos "gentils" banquiers "soumis à la vilaine concurrence des autres"
" ... / ... la ministre de l'économie Christine Lagarde a rejeté la possibilité de légiférer contre les bonus des banquiers, affirmant qu'une loi "ne répondra pas à la question". La ministre plaide pour une "cure de désintoxication collective" de la finance mondiale et affirme: "Ce n'est pas la peine de s'amuser à bricoler à l'intérieur de ses frontières", au risque que "les meilleures équipes de traders aillent tout simplement s'installer ailleurs". Selon elle, les bonus ne doivent pas être "une incitation à une prise de risque" et doivent être liés "à une performance réelle". Elle a rejeté aussi une limitation du montant de ces bonus. - Source Europe1
Elle a également déclaré, sans le moindre humour : "Si les banques font des provisions de résultats c’est quelque part une bonne nouvelle", considère par ailleurs la ministre. "C’est par la finance que la crise est arrivée et il n’est pas tout à fait anormal que ce soit par la finance qu’on commence à ressortir." - Source le site d' Europe1
C'est clair que pour ceux qui travaillent chez : Molex, Alactel Lucent, Sanofi Avantis, Servisair, Cobra sécurité, Avelana, Data Mailing, on doit apprécier à sa juste mesure cette dernière déclaration ...
Ce qui signifie que la convocation des banques aujourd'hui à Matignon et annoncée à grand renfort de communiqués de presse est une mystification et un nouveau coup de propagande !
Ni François Fillon en Toscane, ni Christine Lagarde en Corse ne seront présent à cette réunion : " ... / ... ses services réuniront les principaux acteurs du secteur et la Banque de France, officiellement pour "examiner l'évolution et les conditions du crédit bancaire aux particuliers et aux entreprises ces derniers mois, ainsi que les mesures qui devraient, le cas échéant, être envisagées". Mais "le thème des bonus sera bien sûr évoqué, parce qu'il est au coeur de l'actualité", indique-t-on dans l'entourage de François Fillon. En l'absence de ce dernier, en vacances, la réunion sera conduite par son directeur de cabinet adjoint Antoine Gosset-Grainville, chargé des questions économiques .. / ... " Source AFP/Google
" Participent à la rencontre le gouverneur de la Banque de France, Christian Noyer, Frédéric Oudéa, Pdg de la Société générale, Baudouin Prot, directeur général de BNP Paribas, Michel Lucas, président du directoire du CIC, Ariane Obolensky, directrice générale de la Fédération bancaire de France (FBF). Les patrons du Crédit Agricole et de la Caisse d'épargne sont représentés par des collaborateurs, tout comme la ministre de l'Economie Christine Lagarde " Source Le Parisien
Alors, le show médiatique par lequel, le Premier ministre a convoqué pour qu'ils s'expliquent sur la question des bonus et la lettre que Christine Lagarde, a écrite au gouverneur de la Banque de France ne sont tout au plus qu'un coup de comm. d'urgence, destiné à enfumer la population ...
Surtout lorsqu'on connaît le contenu de la lettre : Dans sa lettre, Christine Lagarde rappelle que "la France a été la première place financière à se doter de règles destinées à encadrer les politiques de rémunération de ces opérateurs pour mettre fin aux rémunérations qui ne sont pas la contrepartie de vraies performances et d'une gestion des risques responsable".
Clairement, Christine Lagarde botte en touche, puisqu'elle : " ... / ... a donc également demandé à Christian Noyer de remettre, d'ici à la fin de l'année, un rapport sur la façon dont les établissements financiers auront appliqué ces règles "
Splendide ! Madame Lagarde doit être une émule de Clémenceau qui déclarait "Quand je veux enterrer un problème, je crée une commission" !!!
Mais enfin, qui sont ces gens qui se foutent totalement de la plus élémentaire morale ?
Les banques, et BNP Paribas en premier, sont co responsables du krach économique actuel et de son cortège de liquidation, de licenciements et de précarité !
Car, que pouvait-on lire dans les Echos du 9 août 2007 ?
" .../ ... Parvest Dynamics ABS, BNP Paribas ABS Euribor et BNP Paribas ABS Eonia ont perdu 23% de leur valeur totale entre les 27 juillet et 7 août, entraînant une chute du cours du groupe dirigé par Baudouin Prot et une inquiétude sur les marchés. La BCE a injecté un montant record de liquidités dans le circuit monétaire pour calmer le jeu
Mauvaise nouvelle pour BNP Paribas. Le leader bancaire français vient d'annoncer la suspension temporaire du calcul de la valeur liquidative de trois fonds composés d'Asset Backed Securities (ABS), des titres adossés à des portefeuilles de créances, notamment hypothécaires - Parvest Dynamics ABS, BNP Paribas ABS Euribor, BNP Paribas ABS Eonia. La raison : "la disparition de toute transaction sur certains segments du marché de la titrisation aux Etats-Unis conduit à une absence de prix de référence et à une illiquidité quasi totale des actifs figurant dans les portefeuilles des fonds quelle que soit leur qualité ou leur rating" - Archive Les Echos
C'est à cause de ces investissements hasardeux mais symbole des années fric à tout va que le système financier et bancaire a frôlé le gouffre et appelé au secours l'Etat !
Il est bon de rappeler qu'au 4 février, l’Etat a mis à disposition des banques 28,6 milliards d’euros sous forme de prêts et 10,5 milliards d’euros sous forme de fonds propres remboursables.
Or, avec un bénéfice net de 1,6 milliards d'euros au deuxième trimestre (en hausse de 6,6% par rapport au 2T 2008), la banque BNP Paribas, dans laquelle l'Etat a investi 5,1 milliards d'euros le 31 mars dernier, affiche une santé insolente en cette période de crise ... / ...
Interrogé sur le sujet par Metro, Bruno Sylvestre, porte-parole de la ministre de l'Economie Christine Lagarde affirme: "Il n'est pas dans notre intérêt de mettre la pression sur les banques". Rémunéré à hauteur d'environ 8% par an, le prêt consenti par l'Etat devrait lui rapporter cette année 1,4 milliards d'euros, auquel il faut soustraire le montant des intérêts liés à la somme que l'Etat a lui-même empruntée sur le marché international pour financer cette aide, soit probablement un total d'environ 700 millions d'euros au bénéfice de l'Etat fin 2009.
"Ces prêts rapportent", affirme Bruno Sylvestre qui explique que "la priorité est donnée à la consolidation des acteurs financiers, plutôt qu'à un remboursement rapide qui pourrait les fragiliser sur le plan international". Une consolidation que n'a pas manqué d'opérer le groupe BNP Paribas, qui avec le rachat de la banque Belge Fortis au printemps dernier, est devenu la première banque de dépôt de la zone euro. - Source Metro
Nous pensons indispensable de rappeler cet article publié par Libération en Février 2009
" ... / ... L'Etat a acheté pour 1 milliard d'euros d'actions du groupe franco-belge à 9,9 euros l'unité. Titres dont la valeur s'est depuis effondrée. Elles valent aujourd'hui 2,3 euros. Moins-value potentielle, 770 millions d'euros.
Ensuite, le président oublie de dire que, pour prêter de l'argent aux banques, l'Etat doit lui-même s'endetter, et donc payer des intérêts. Certes, il emprunte à un taux inférieur à celui auquel il reprête l'argent, mais l'opération finale est beaucoup moins profitable. Suivant les cas, l'Etat s'est endetté entre 2,7 et 3,5%. Et il a prêté l'argent à des taux de 4% (pour la partie du plan servant à améliorer la liquidité des banques) et de 8% (pour les avances en fonds propres). Ajoutons que la multiplication de ces opérations va augmenter le risque pris par l'Etat, donc diminuer la confiance des investisseurs vis-à-vis des emprunts d'Etat, qui vont demander des taux plus importants.
Difficile, dans ces conditions, de dire combien gagnera l'Etat avec ce plan de sauvetage. Mais, à l'heure actuelle, on ne voit pas comment son gain peut être de 1,4 milliard. Dans son intervention, Sarkozy se fondait sur le fait que le gouvernement avait déjà «utilisé 25 milliards» pour «aider les banques». Or, ce chiffre ne correspond pas à la réalité.
Au 4 février, l’Etat avait mis à disposition des banques 28,6 milliards d’euros sous forme de prêts et 10,5 milliards d’euros sous forme de fonds propres remboursables. Si on utilise la base de 25 milliards citée par Sarkozy, on obtient un gain net (c’est-à-dire intérêts perçus à 4%, moins le coût de l’endettement) pour l’Etat de l’ordre de 320 millions d’euros. Si on reprend la somme effectivement versée, on arrive à un profit net de 900 millions. Dans les deux cas, une différence de taille avec les 1,4 milliard de Sarkozy ... / ... " - Source Libération
Néanmoins, et de façon surprenante, un de premiers à se réjouir des résultats de BNP Paribas et de son possible milliard de bonus est ... René Ricol, le médiateur du crédit :
"on ne peut que se féliciter d'avoir des banques qui renouent avec les bénéfices. On ne peut que se féliciter d'avoir de bons résultats de la Société Générale - bien qu'ils aient eu une petite baisse -, de bons résultats de BNP, de bons résultats des banques françaises. Parce que si elles avaient de mauvais résultats, ça voudrait dire qu'il faudrait qu'on se prépare à remettre de l'argent. Donc le fait qu'elles renouent avec les bénéfices, c'est plutôt bon signe. La question maintenant, c'est : que vont-elles faire de ces bénéfices ? Vont-elles continuer dans les errements du passé ? Ses bénéfices vont-ils être tout pour l'actionnaire ? Ou tout pour la reprise économique ? "
... / ... René Ricol semble convaincu que les banques ont vraiment tiré les conséquences de la crise financière : « Je ne crois pas qu'on ait raté le coche, parce que quand je vois les différents ordres du jour des différents G20 qui se tiennent, on voit bien qu'on va vers une nouvelle régulation. Hier encore, je recevais des gens représentant les « hedge funds » [ndlr, fonds d'investissement non cotés à vocation spéculative et risqués, recherchant des rentabilités élevées] et je peux vous dire que ça secoue de partout, parce que la nouvelle régulation se met en place, et pour tout le monde.
Et la vraie question qu'on doit se poser, c'est : 1 milliard de bonus, pourquoi pas, à la condition qu'on ait la transparence. On doit exiger la transparence pour savoir si on a bien mis un terme aux errements et aux rémunérations excessives, qui poussent à des prises de risques excessives, toujours. » - Source RMC
Ce qui signifie que tout va recommencer comme avant et que le discours de Toulon , de notre Président en septembre 2008, fait vraiment sourire lorsqu'on le relit
" ... / ... Nicolas Sarkozy a insisté sur la nécessité de dire la vérité aux Français pour rétablir la confiance, et expliqué le rôle décisif que doit jouer l’Etat dans la refondation du capitalisme .../ ... L’autorégulation pour régler tous les problèmes, c’est fini. Le laissez-faire, c’est fini. Le marché qui a toujours raison, c’est fini", a insisté le président de la République en préambule de son discours.
Il faut "réglementer les banques pour réguler le système", a également déclaré le Président. "A l’avenir", Nicolas Sarkozy souhaite que soit "beaucoup mieux" contrôlée la façon dont les banques "font leur métier, la manière dont elles évaluent et dont elles gèrent leurs risques, l’efficacité de leurs contrôles internes" : "Il faudra imposer aux banques de financer le développement économique plutôt que la spéculation" ... / ...
Si les professionnels ne parviennent pas à s’accorder sur "des pratiques acceptables" pour encadrer les modes de rémunération des dirigeants et des opérateurs, une loi le fera "avant la fin de l’année". Les patrons "ne doivent pas avoir le statut de mandataire social et bénéficier en même temps des garanties liées à un contrat de travail", ni recevoir des actions gratuites, ni bénéficier d’un parachute doré "lorsqu’ils ont commis des fautes ou mis leur entreprise en difficulté". "Leur rémunération doit être indexée sur les performances économiques réelles de l’entreprise". Enfin , "si les dirigeants sont intéressés au résultat, les autres salariés doivent l’être aussi ... / ... ". - Source site du Gouvernement
Mais tremblez banquiers puisque le Président de la République, lui même, a décidé de convoquer le 25 août prochain le secteur bancaire et financier à l'Elysée !!!
Jusque là, dormez braves gens, et profitez de vos congés (si vous en prenez) car, de toute façon, c'est vous qui payerez la crise ... jusqu'au prochain krach !
Sources
La Tribune Entreprises
Crédit photo
Daily Mail