Né le 8 janvier en 1922 à Casablanca, au Maroc, José
Benazeraf sort diplômé de Sciences Po à la Libération.
En 1957, alors que rien ne le destinait à travailler dans le cinéma,
il produit Les Lavandières du Portugal de Pierre Gaspard-Huit avec
Darry Cowl et Jean-Claude Pascal. Lorsqu'on fait référence
à ce film, il répond : "c'est tout ce que je n'aimais
pas". Ses paroles ne sont d'ailleurs pas tendres lorsqu'il parle
du cinéma français de cette époque : "un art
approximatif, accessoire, pas premier mais dernier".
En 1960, José Benazeraf passe réalisateur avec L'Eternité
pour nous, film romantique exaltant la beauté des femmes. Il
n'y a qu'à l'entendre parler de la splendide Monique Just, qui,
dans une scène, apparait vêtue d'une robe mouillée
et se caresse le sein, et l'on comprend sa passion pour le corps féminin.
Cette œuvre fit évidemment scandale et tout concours financier
lui fut retiré.
José Benazeraf a également eu le mérite d'avoir fait
tourner à leurs tous débuts Bruno Cremer et Mireille Darc
dans Mourir d'amour en 1960, ainsi que Jean-Pierre Kalfon dans
un polar très noir, La Drogue du vice, en 1962. Suivront
dans les années 60 de nombreux films de série B, qui seront
quelquefois interdits pour cause d'obscénité. Ce fut notamment
le cas de Joe Caligula où transparait une haine viscérale
de la bourgeoisie et dont les copies furent retirées de toutes
les salles de cinéma en 1966.
Tout en cherchant à biaiser avec la censure, il continue à
rendre ses lettres de noblesse à l'acte d'amour. Frustration,
qui met en scène en 1971, un trio amoureux entre une jeune femme
célibataire (Janine Reynaud), sa sœur (Elizabeth Teissier) et
le mari de celle-ci (Michel Lemoine), un médecin blasé,
en est un brillant exemple. C'est sans doute l'œuvre la plus aboutie
du "Buñuel de l'érotisme".
"Attachant et lyrique" sont les deux mots qui reviennent le
plus souvent, sans doute par opposition au reste de sa filmographie tournée
résolument vers le hard, dès le milieu des années
70.
Nous sommes en 1975 et la fameuse loi de finances du 31 décembre
institue la classification des films pornographiques et d'incitation à
la violence. C'est l'âge d'or du X et José Benazeraf va s'en
donner à coeur joie. Sa mise en scène devient de plus en
plus crue, mais sa détermination à associer à l'érotisme
la violence ou la politique est restée intacte. En cette époque
warholienne où la sexualité est considérée
comme chic, intellectuelle et bourgeoise, il oppose une vision délibérément
gauchiste. Tournés, comme il l'avoue aujourd'hui, "sans réelle
passion, avec un sens profond de la dérision", ses films underground
aux atmosphères troubles constituent de grands poèmes visuels,
véritables odes à la lubricité.
Jusqu'au milieu des années 80, José Benazeraf tourne à
la va-vite de nombreux pornos, classiques du genre aux titres explicites,
en y glissant toujours sa patte éminemment provocatrice et ses
citations philosophiques : José Benazeraf 1 (1975), une œuvre
brute de décoffrage qui ne s'embarrasse d'aucune intrigue, La Veuve
lubrique (1975), La Soubrette perverse (1975), Une garce en chaleur (1977),
Bordel SS (1978), Nicole par-dessus, par-dessous (1979), Le Majordome
est bien monté (1983) dans lesquels ont tourné tour à
tour les stars de l'époque : Brigitte Lahaie, dont il préfère
ne pas parler, et Alban Ceray, le sosie de Bernard Pivot, qui faisait
partie des "castings éternels".....
Avec la fin du 35 mm, le précurseur du X tombe dans l'oubli et préfère tourner aux Etats-Unis, où ses oeuvres sulfureuses reçoivent un meilleur accueil. A Los Angeles, il dispose d'équipes techniques d'une trentaine de personnes, des décors naturels dans des endroits paradisiaques et de superbes actrices porteuses d'un "message érotique fort" et d'une "noblesse d'attitude et de gestes". Il peut ainsi donner libre cours à son principal plaisir : "caresser une femme avec la caméra". Il se distingue de ses confrères en préférant peaufiner les angles de caméra et filmer les expressions des visages au lieu de s'attarder sur les habituels gros plans chirurgicaux......