16 avril 1788, Paris : décès de Georges-Louis Leclerc, comte de Buffon, dit Buffon, naturaliste, mathématicien & écrivain.
Né le 7 septembre 1707 à Montbard, dans la Côte-d'Or, Buffon était fils de grands bourgeois puisque son père présidait le Grenier à Sel de la ville et que son parrain et grand-oncle maternel servait le duc de Savoie en qualité de collecteur d'impôts. Quant à son grand-père paternel, Louis Leclerc, il était procureur du Roi et prévôt.
Il a dix ans quand son père achète les propriétés et la seigneurie de Buffon, à six kilomètres de Montbard. Il acquiert également une charge de commissaire général des maréchaussées qui, revendue trois ans plus tard, en 1720, contre une charge de conseiller au Parlement de Dijon, contraindra toute la famille à émigrer en cette ville.
Le futur naturaliste fait donc toutes ses études chez les Jésuites de Dijon avant de s'inscrire en Droit et d'obtenir sa licence en 1726. Hélas pour sa famille, il se sent l'âme d'un scientifique et abandonne tout cela pour s'en aller étudier les mathématiques et la botanique à Angers, en 1728. Seul un duel au cours duquel il tue son adversaire le forcera à renoncer à l'Université de médecine.
Provisoirement exilé à Nantes, il y fait la connaissance d'un aristocrate anglais, le duc de Kingston, qu'il décide de suivre dans son tour d'Europe. La mort de sa mère, qui survient en 1731, le rappelle cependant en France et, dès l'année suivante, le jeune homme s'installe à Paris. Il a vingt-cinq ans et une solide ambition : d'ailleurs, ne signe-t-il pas déjà Buffon ?
L'année suivante, il présente un mémoire à l'Académie des Sciences et reçoit les éloges de l'astronome Maupertuis et du mathématicien Clairault. Ce mémoire s'intitule "Sur le jeu du franc-carreau" et il est le premier à introduire la notion de calcul différentiel et le calcul intégral en probabilité.
A la même époque, Buffon traduit plusieurs ouvrages de géométrie d'Isaac Newton ainsi que les livres de botanique de Stephen Hales. Il rencontre Voltaire et un certain nombre d'intellectuels et est reçu à l'Académie des Sciences. Grâce à la protection du comte de Maurepas, il obtient également un poste d'adjoint dans la section mécanique.
En 1733, le ministère de la Marine a justement demandé à l'Académie une étude sur les bois utilisables dans la construction des navires. Mais les premiers commissaires, faute de moyens, se sont récusés. Buffon reprend la main, expérimente à tout-va et rédige le compte-rendu demandé. Maurepas finit par lui proposer la surintendance des forêts de ses domaines mais Buffon se dérobe.
Il est à nouveau plongé dans ses traductions. Toujours celles de Hales avec "Vegetable Staticks". L'Anglais s'y inscrit en faux contre la science cartésienne et prône l'observation et l'expérience. Buffon, anglophile convaincu, se rallie à lui et, après un bref séjour à Londres, en 1738, il sera élu à la Royal Society.
En 1739, il devient intendant du Jardin du Roi (l'actuel Jardin des Plantes) et passera le reste de sa vie entre Montbard, la Cour et ses activités d'administrateur d'un Jardin qu'il révolutionna. Il s'éteignit à Paris, à l'âge vénérable de 81 ans, le 16 avril 1788.
__Sur le plan strictement littéraire, outre les articles de sciences qu'il rédigea pour l'"Encyclopédie", le nom de Buffon reste associé à son "Histoire naturelle, générale et particulière, avec la description du Cabinet du Roy", laquelle comporte 36 volumes dont quelques uns paraîtront après son décès. Sur ces 36 volumes, trois constituent une sorte de théorie générale, les douze suivants sont consacrés aux quadrupèdes, neuf autres aux oiseaux, cinq aux minéraux et enfin, les sept derniers constituent les suppléments.
Curieusement, ce scientifique émérite y adopte un style à mille lieues de la sécheresse habituelle dans ces sortes de livres. Ses confrères en sciences lui reprocheront d'ailleurs un ton qu'ils jugent ampoulé et redondant. Le lecteur actuel l'estimera sans doute tout bonnement littéraire et manifestera son indulgence même si l'on peut reprocher à Buffon certains a priori - notamment envers les chats ;o) - et une tendance avérée à l'anthropomorphisme.
On ne s'en rend pas compte aujourd'hui mais le succès de cette "Histoire naturelle ..." fut énorme et ne se démentit pas un seul instant. Il fut même comparé à celui de "L'Encyclopédie." Il faut préciser que Buffon attacha un soin particulier aux planches des illustrations (deux mille environ) qu'il demanda à Jacques de Sève et à François-Nicolas Martinet.
Quant à son influence, elle fut considérable. Buffon en effet a été l'un des tous premiers à faire reculer la datation sacro-sainte de l'Univers établie par les textes bibliques (environ 6 000 ans) jusqu'à lui faire atteindre des millions d'années. Il a aussi placé l'homme au coeur du monde animal et souligné sa très grande ressemblance avec les animaux, il a même affirmé que toutes les races humaines provenaient d'une seule souche.
A l'époque, il fallait oser et Buffon, à la fin de sa vie, fut d'ailleurs inquiété par la Sorbonne, qui voulait l'interdire. Mais il fit patte de velours, ergota, promit de se repentir ...
... et n'en fit rien. Il peut être considéré à bon droit et malgré ses erreurs comme un précurseur de Lamarck et de Darwin, comme un évolutionniste avant la lettre. Aussi a-t-il toute sa place sur notre Calendrier. ;o)