Quelle mauvaise publicité que subit mon pays à cause des sables bitumineux d’Alberta. J’ai l’ai encore vu récemment à la télé française dans le film « Home », réalisé par le célèbre photographe Yann Arthus-Bertrand qui montre les dommages et les dégâts importants causés par l'action de l’homme sur la planète et « comment des initiatives écologiques et sociales locales apportent des réponses concrètes et optimistes à la crise écologique ». C’est un film qui fait frémir et mieux comprendre qu’il est possible d’agir pour corriger la situation. Il faut voir ce film pour saisir ce qu’est notre responsabilité individuelle envers notre planète et son avenir. C’est une invitation convaincante au changement.
L’homme n’est pas seul sur la planète. Il y a aussi des « milliards de milliards d’animaux, de végétaux et d’organismes unicellulaires ». Nous sommes étroitement liés avec eux et c’est Albert Einstein qui nous le rappela par son affirmation : « si l’abeille venait à disparaître, l’espèce humaine n’aurait plus que quatre années à vivre ».
De plus, je viens de parcourir un très beau bouquin aussi intitulé « Home » qui comprend les belles et fantastiques images d’Arthus-Bertrand, accompagnées de textes qui décrivent et expliquent le pourquoi de chacune. Il est un homme positif qui cherche à montrer que nous avons le pouvoir de changer car les solutions existent.
Au Canada, nous possédons une réserve pétrolifère en Alberta qui représente plus de 300 milliards de barils. C’est plus important qu’en Arabie. Pour mon pays et le monde occidental, c’est un atout stratégique majeur. Depuis 2003, le Canada est à la deuxième place des pays producteurs de pétrole, juste derrière l'Arabie Saoudite. C’est devenu une richesse inouïe pour les Canadiens. Malheureusement, notre réserve est sous la forêt boréale, en Alberta, à 60 mètres sous terre et contenue dans des sables bitumineux.
Les sables bitumineux sont un mélange de pétrole brut, de sable, d’argile minérale et d’eau. Pour en extraire le pétrole, il faut creuser les 60 mètres de terre, injecter dans les sables de la vapeur d’eau à faible pression afin d’augmenter la température du bitume et diminuer sa viscosité. Une fois ramolli, le bitume est pompé, l’eau rejetée et la terre remise en place.
Le coût d’exploitation est élevé et l’impact environnemental est dévastateur puisqu’une tonne et demie de sables bitumineux donne à peine un baril de pétrole brut, qu’il faut trois barils d’eau douce pour le fabriquer et pour créer la vapeur d’eau, on doit brûler beaucoup de gaz naturel, soit l’équivalent de deux barils de pétrole brut pour en faire trois, ce qui ajoute un taux inacceptable de gaz à effets de serre (GES) à l’atmosphère. Peut-on vraiment imaginer l’impact total de cette entreprise colossale qui s’étend sur un territoire grand comme le quart de la France métropolitaine ?
L’eau vient des rivières et des sources (déjà on constate l’assèchement du territoire et la baisse de la nappe phréatique) et l’eau usée est traitée et rejetée dans des bassins qui longent la rivière Athabaska. Malgré tout, cette eau reste fortement polluée, demeure toxique et est une sorte de bouillie de produits dangereux. Elle trouve son chemin jusqu’à la rivière, aux sources… Le risque est qu’à la longue, cette pollution fasse partie, un jour, des sédiments et des écosystèmes pour ensuite s’installer dans la nappe phréatique.
Il y a 10 ans, 16 millions de GES étaient produits alors que dans 10 ans on évalue à 65 millions de tonnes les GES dégagés. De plus, une odeur désagréable rend les gens malades et cette pollution de l’air est entraînée par les vents de l’ouest vers le Québec et les provinces maritimes du pays, causant ainsi des pluies acides.
Ce sont les raisons pour lesquelles j’ai toujours dénoncé, dans mes blogs passés, l’exploitation des sables bitumineux au Canada et combattu la politique du Premier Ministre canadien Stephen Harper, député de l’Alberta, qui a favorisé l’accélération par 5 de la production. Notre PM s’est opposé à Kyoto, signé par son prédécesseur, prétextant que le Canada manquait de temps pour rencontrer les objectifs de l’accord. Sans l’exploitation des sables bitumineux (qui représentent plus du tiers de notre production de GES) cela aurait été probablement possible.
Nous, Canadiens, avons la possibilité de devenir très riches mais nous devons prendre le temps nécessaire pour développer les méthodes pour bien exploiter écologiquement nos sables bitumineux. Par exemple, pour éliminer les GES produits, on pourrait construire des usines nucléaires pour fabriquer la vapeur d’eau. Cela prend du temps mais si le gouvernement avait agi il y a dix ans, ces usines seraient en marche.
J’ai confiance au génie canadien pour inventer d’autres façons pour exploiter les sables bitumineux afin de reconstituer le sol de la forêt boréale, assainir parfaitement les eaux de rejet et éliminer à sa plus basse expression les rejets de GES.
Le temps ne nous presse pas car la demande en pétrole brut sera toujours là. Si nous continuons à chercher à améliorer nos méthodes d’exploitation afin de respecter l’environnement nous rendrons un immense service à tous les citoyens de la terre et nous assurerons que nos descendants puissent profiter de la richesse que génèrera la vente de ce pétrole brut dont la qualité de la production sera propre.
J’espère que le gouvernement canadien exprimera, entre autres, une nouvelle politique sur la question des sables bitumineux lors de la conférence sur le changement climatique de l’ONU à Copenhague, en décembre prochain. La réputation internationale du Canada en rapport avec l’environnement en dépend.
Claude Dupras