En Septembre 2008, Emmanuel Mauger, avocat spécialiste en droit du travail écrivait : « Il est ridicule de se représenter le monde du travail comme le monde des Bisounours. A partir du moment où salarié et employeur ne souhaitent plus travailler ensemble, c’est qu’il y a litige et tout litige demande réparation. » Il faudra quelques mois pour savoir si cette mesure encourage la mobilité tout en préservant la paix sociale. - Source Blog de Sébastien Tranchant
L'économiste Bernard Gazier, de son côté était encore plus formel : « On parle d'un accord de "flexisécurité" à la française mais, en réalité, c'est "flex-flex" et un tout petit peu "sécurité", avec des difficultés de financement pour les Assedic, qui ne sont pas prévues par l'accord ! »
Bernard Gazier qui est avec Peter Auer auteur de "L'introuvable sécurité de l'emploi" dans lequel ils écrivent : "l'examen attentif des résultats de plus de 500 plans sociaux engagés à la suite de licenciements collectifs montre que, trois ans après, seuls 20% des salariés concernés ont retrouvé un CDI, 10% un emploi temporaire de plus de six mois. Les autres naviguent entre petits boulots, chômage, formation, installation à leur compte ou exclusion: "La machine à intégrer est devenue une trieuse et une broyeuse" - lire la suite de l'extrait sur le site d'Alternative Economique
C'est pourtant, dans ce contexte que le MEDEF, une fois de plus, "vendait" sa solution aux parlementaires, comme une panacée pour l'emploi.
C'était au Sénat le 29 avril 2008 où MM. Dominique Tellier, directeur des relations sociales, et Guillaume Ressot, directeur adjoint chargé des affaires publiques du Mouvement des entreprises de France (Medef) expliquaient les "avancées" de la mesure :
".. / ... concernant la rupture conventionnelle, elle limite le risque de « judiciarisation » et lèvera les réticences à l'embauche, notamment dans les PME. M. Nicolas About, président, a souligné que la rupture conventionnelle suppose que le salarié soit d'accord avec les conditions proposées par l'employeur. Elle devrait éviter qu'un salarié qui souhaite quitter l'entreprise et percevoir des allocations chômage demande à être licencié plutôt que de présenter sa démission.
M. Dominique Tellier a rappelé que cette procédure ne se substitue ni à la démission ni au licenciement et constitue un mode autonome de rupture" - Source Sénat
Et bien, fort de ces rappels, savez-vous que cette procédure est devenue le dernier outil de régulation à la mode des chef d'entreprises ou des DRH ?
" A la veille des vacances, le nombre de ruptures conventionnelles de contrat de travail a fait un bond de 33 %, avec 17 173 "séparations à l'amiable" validées en juin, contre 12 875 au mois de mai. Au total, près de 112 000 séparations de ce type ont été validées depuis l'instauration de ce mode de rupture en août 2008.
Ce mode de séparation, à mi-chemin de la démission et du licenciement, permet au salarié, contrairement à la démission, de bénéficier de l'assurance chômage. Selon les syndicats, ces chiffres révèlent que ce dispositif est utilisé pour contourner les règles des plans sociaux et éviter les procédures liées à un licenciement économique" - Source Boursorama
Alors, merci, aux parlementaires d'avoir validé une escroquerie morale de plus du MEDEF !!!
Que dit un avocat spécialiste du droit du travail sur cet "outil" ?
" La rupture conventionnelle suppose la signature d’un accord tant sur le principe de la rupture du contrat que sur le montant de l’indemnité conventionnelle. Mais alors qu’en pratique, les parties ne discutent pas sur les motifs réels de la rupture des relations de travail, il s’avère que le débat entre elles porte davantage sur le montant de l’indemnité à convenir.
C’est la où le bât blesse.
Car en règle générale, le salarié ne connaît pas les droits auxquels il pourrait prétendre s’il se faisait licencier. Rappelons que le licenciement sans cause réelle et sérieuse d’un salarié justifiant de moins de deux ans d’ancienneté est sanctionné par une indemnité de six mois de salaires. Cette indemnité est encore plus avantageuse lorsque le salarié se prévaut d’une plus grande ancienneté. Le risque serait que l’employeur lui propose une indemnité inférieure à ses droits en cas de licenciement non causé.
... / ... Notre conclusion est qu’en pratique, du fait de cette nouvelle loi dont le législateur n’a peut-être pas appréhendé tous les effets à moyen terme, les salariés auront besoin de recourir de plus en plus systématiquement à un avocat afin de lui soumettre pour avis le projet de l’accord de rupture conventionnelle que son employeur lui proposera, auquel cas la double finalité de la loi ne serait pas atteinte – le salarié nécessitant toujours le service d’un avocat pour vérifier le contenu de l’accord, les conseils de prud’hommes risquant d’être saisis de contentieux d’un type nouveau relativement à la validité des protocoles de rupture conventionnelle.
Le législateur a-t-il bien pensé la loi de modernisation du travail ? La question est ouverte… " - Source Blog de Gérard Picovschi
Et comme un avocat coûte cher et que la procédure peut être longue ...
Mais, en ces temps sociaux peu agités pour cause de congés d'été, même s'il ne faut pas oublier les MOLEX et autres conflit sur lesquels la presse, les élus de la nation et milieux économiques font bien peu de cas, il faut prendre garde à un autre mauvais coup que prépare le gouvernement, au travers du transfuge de gauche et accessoirement secrétaire d'Etat à la Justice : Jean-Marie Bockel
C'est le journal Les Echos qui nous en informe :
" ... / ... Quelques jours après sa nomination, Jean-Marie Bockel, secrétaire d'Etat à la Justice, avait réservé sa deuxième visite de terrain au Conseil des prud'hommes de Paris. Une simple prise de contact, à première vue. Pourtant, il aura suffit d'une phrase sur une future réforme de la procédure prud'homale pour que les professionnels s'émeuvent.
Nous considérons que ça ne fonctionne pas comme ça devrait fonctionner, a confié Jean-Marie Bockel aux “ Echos ” la semaine dernière. Les délais sont trop longs. Je sais que je n'ai pas de marge de manoeuvre importante - financière ou en termes de personnels -, mais on peut réfléchir à des simplifications de procédure. Faut-il préserver la conciliation ou pas ? »La question n'est pas tranchée, mais elle est sérieusement à l'étude, de même que celle de la suppression de l'oralité des débats, deux spécificités de la justice prud'homale
Officiellement, le Medef n'est pas demandeur (Alors d'où sort cette proposition ?) Si les prud'hommes sont néanmoins « un sujet ouvert » dans l'esprit de Laurence Parisot, ce n'est pas sur le fonctionnement du dispositif, mais sur les modalités de désignation des juges prud'homaux ... / ...
Les magistrats et avocats n'ont pas tardé à réagir
Passer à la procédure écrite risque de déshumaniser les débats. Or, dans les litiges liés au monde du travail, la confrontation directe est capitale, estime Matthieu Bonduelle, secrétaire général du Syndicat de la magistrature. Même inquiétude au Syndicat des avocats de France (SAF) : « La suppression de la conciliation est en totale contradiction avec la volonté du ministère de développer les modes de résolution alternatifs des conflits. » ... / ... Chez les syndicats comme au patronat, on tombe des nues en apprenant qu'une réforme de la procédure prud'homale est envisagée, affirmant ne jamais en avoir entendu parler.
Suppression de l'oralité des débats et de l'obligation de tenter une conciliation, qu'est ce que ça signifie ?
" ... / ... « La première mesure rendrait de fait caduque la possibilité offerte aux salariés de se défendre seuls devant les prud'hommes alors que déjà, une réforme récente a rendu obligatoire de s'adresser à un avocat en cas d'appel », fait remarquer un syndicaliste ... / ... " - Source Les Echos
Si cette mesure devait s'appliquer, dans ce cas là, là aussi, un avocat coûterait cher pour une procédure qui pourrait être longue ...
Mais ne doit-on pas rapprocher cette nouvelle tentative du Secrétaire d'Etat de celle entreprise par Rachida Dati et qui aboutissait au Décret n° 2008-514 du 29 mai 2008, modifiant le siège et le ressort des conseils de prud'hommes, qui supprimait 63 tribunaux ?(Liste disponible sur Legifrance ).
Décret contre lequel les recours continuent et obtiennent gain de cause comme à Nogent-le-Rotrou (Voir article de la République du Centre ou à Fougères (Voir le texte des deux décisions sur Legifrance )
Or, il s'agit d'une jurisprudence dans laquelle d'autres communes pourraient s'engouffrer et rendre quasiment caduc le décret de 2008. Dans ce cas, comment continuer le plan d'économies voulu par le gouvernement ?
Car, Rachida Dati qui avait, en même temps, proposée en octobre 2007, que : "Les avocats de certains barreaux de province menacés par la réforme de la carte judiciaire pourraient obtenir le droit de partir en retraite à 55 ans ... / ... Il s'agirait de venir en aide aux avocats dont l'activité serait menacée par la fermeture d'un tribunal de grande instance ou d'une cour d'appel, après refonte de la carte judiciaire ... / ... " - Source Le Point
D'ailleurs, Jean-Marie Bockel n'est-il pas, comme l'indique sa biographie, sur le site du Gouvernement : Avocat au barreau de Mulhouse, depuis 1973 ... et ministre d'un gouvernement qui se soucie peu de maintenir la justice et et l'équité pour tous les citoyens ...
Alors, cette proposition n'est-elle pas, avant tout, un moyen habile de pas se mettre à dos une profession, à qui, on a fait des promesses et de lui permettre de "gagner plus "et de "travailler plus longtemps" ... au frais des salariés ?
Crédit photo
Le Point
Crédit image
Faber