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La suppression de l’estrade dans les salles de classe dans les années 1970 et 1980 fut une des conséquences de la « Révolution pédagogique » (1) qui eut lieu dans le sillage de mai 68.
Pour les promoteurs de cette révolution (Ivan Illitch, Edwy Plenel, Philippe Meirieu pour les plus connus), l’école devait abandonner sa mission de transmission des connaissances et des valeurs pour devenir un lieu où les enfants de tous les milieux sociaux vivent ensemble sur un mode égalitaire.
C’est ainsi qu’ils ont imposé le collège unique, le baccalauréat pour tous, puis les études supérieures généralisées, rendus possibles par l’abolition de la sélection, des notes, et même de la plupart des sanctions.
Mais la révolution n’aurait pas été complète si le professeur continuait à incarner la notion de hiérarchie que l’on s’efforçait de faire disparaître des écoles. Il fallait que le professeur cesse de se croire, et d’être considéré, comme supérieur aux enfants. Il devait quitter son rôle de détenteur et relais des connaissances, aussi bien que des valeurs de l’ancienne société.
Le nouveau professeur, lui, allait se mettre au niveau de ses élèves et se changer en simple médiateur « en recherche » avec sa classe, sur des « projets pédagogiques » où chacun a son mot à dire.
Sur le plan symbolique, la suppression des estrades était donc indispensable.
La transcription de cette idée dans les faits a toutefois pris du temps : dans un article paru sur Marianne2.fr, Daniel Faivre, professeur de lettres au lycée, relate que c’est au cours des années 1990 seulement que l’estrade a été abolie dans son établissement.
Seuls aujourd’hui subsistent quelques marchepieds, à la vérité beaucoup moins élevés que les vraies estrades.
L’échec des utopies pédagogiques étant aujourd’hui total, se pose de façon urgente la question des moyens de rendre à l’école son rôle naturel d’instance et de lieu d’instruction des enfants. Comment donner aux enfants les connaissances utiles pour l’avenir ? Comment leur apprendre à respecter les valeurs et les règles de la vie en société ?
Offrir aux professeurs la possibilité d’avoir une estrade peut les aider à retrouver leur rôle. On l’a dit, sur le plan symbolique, l’estrade montre aux élèves que le professeur est un maître, qu’il leur est supérieur par les connaissances qu’il détient et qu’il leur transmet.
Mais l’estrade a également de nombreux avantages pratiques :
Si l’estrade est suffisamment haute, elle incite davantage les élèves à l’attention car le professeur est alors en mesure d’attirer plus facilement sur lui leurs regards.
L’estrade permet au professeur de voir ce qui se passe au fond de sa classe, et de façon plus générale, de mieux surveiller ce qui se passe à l’intérieur de celle-ci.
S’il veut infliger une sanction, il peut convoquer l’élève fautif sur l’estrade, ce qui accroît l’intensité dramatique du moment pour l’élève puni. La honte potentielle peut ainsi jouer un rôle dissuasif.
À l’inverse, l’estrade peut servir à décerner des récompenses : elle permet alors une sorte de « montée des marches ».
L’estrade peut servir à la récitation des leçons. Elle permettait autrefois d’apprendre aux élèves à prendre la parole en public, dans des circonstances solennelles demandant de maîtriser ses émotions. Comme pour le professeur, l’élève a alors plus de chance de voir ses camarades l’écouter vraiment et avec attention.
En outre, l’estrade rend mieux visibles les démonstrations pratiques faites par les professeurs, particulièrement dans le cadre de travaux dirigés. Sans estrade, les élèves du fond de la classe lisent moins bien au tableau et voient mal les exemples donnés par le professeur.
Notons enfin que l’estrade permet aux professeurs d’enseigner assis, s’ils le souhaitent, sans que cela ne les empêche de surveiller leur classe.
Pour toutes ces raisons, SOS Education recommande que les professeurs qui le souhaitent puissent faire réinstaller une estrade dans leur salle de cours.
Recommandations techniques pour l’installation de nouvelles estrades :
L’estrade, pour être utile, doit être suffisamment haute : la taille optimale se situe entre 50 à 65 centimètres de haut.
Afin qu’elle remplisse sa fonction de scène, elle devrait également être assez longue et large pour que le professeur puisse s’y déplacer à sa guise pendant la classe : idéalement cinq mètres sur deux, soit une superficie totale de dix mètres carrés.
Enfin, l’estrade sera située près de la porte, sans l’obstruer, de sorte que l’enseignant pourra, depuis son estrade, demander solennellement le silence avant de commencer le cours. Cela rejoint la question de la nécessité d’assurer l’ordre au début du cours, qui fait l’objet d’un article séparé.
(1) Expression créée par Philippe Némo dans Pourquoi ont-ils tué Jules Ferry ? (Grasset, 1989).