J'évoquais, chez les Arawe, des motifs de boucliers dont l'intérieur représentaient des formes singulières, semblables à celles qui couvrent des étoffes d'écorce.
Chez les Nakanai, des motifs de boucliers sont également semblables à ceux des proues de pirogues, des masques et des libers d'écorce.
Ces étoffes d'écorce (non pas battue, semble-t-il, mais mâchée) étaient utilisées pour des cérémonies funéraires comme linceuls ou capes.
Ces dessins, appelés tataro, avec leurs yeux au centre, ne manquent pas de nous rappeler les visages déformés de peintures occidentales modernes.
Peut-être sont-ils liés aux esprits ?
Cependant, Ann Chowning qui a fait réaliser des tataro dans les années 60 par des Nakanai, en demandant à l'artiste ce que cela représentait, n'a jamais obtenu pour réponse : « il s'agit d'un visage », « d'un ancêtre »...
Les réponses qu'elles récoltaient étaient que tel ou tel tataro avait été inspiré par une forme d'insecte, d'oiseau, de poisson ou de coquillage. Des animaux qui présentent des transformations. Celui qui dessinait semblait capter une forme de l'animal ou de la plante qui ne lui était pas nécessairement familière.
Difficile tout de même de se dégager de l'impression de visage !
En fait, c'est parce que nous sommes fascinés par les « yeux » au centre ; notre attention ainsi captée nous oblige à construire mentalement un visage.
Les Nakanai, eux, s'intéressent aux motifs autour de cette structure :
la forme devient « aile de raie », « queue de scorpion », « feuille pour envelopper la nourriture »...
Bibliographie : Les tapa funéraires des Nakanai de Nouvelle-Bretagne, 1992, catalogue d'exposition, Galerie Meyer, Paris.
Chowning, Ann, 1983, « Inspiration and convention in Lakalai paintings » in Art and Artists of Oceania. Palmerston North : Dunmore Press Ltd and Mill Valley : Etnographic Arts Publications.
Photo 1 : © Olaf Wüpperfürth in Meyer, A. J. P. 1995. Art Océanien. Köln, Ed. Konemann.
Photo 2 : Musée du Quai Branly.
Photos 3 et 4 : Tataro in Chowning, Ann, 1983.