Marseille, mi-mai, le soleil brille, je sorts du vieux port, remonte la Canebière et me voila chez Pone de La Fonky Family pour prendre de ses nouvelles, parler d’une belle époque et échanger tout simplement.
Dany : On te considère comme l’architecte sonore de la Fonky Family (FF) sur une période s’étalant de 1996 à 2006 : peux tu nous expliquer un peu tes débuts, avant la FF ?
Pone : Au début j’ai commencé à faire des sons, cela devait être en 1992 1993. J’étais passionné de rap et tout ça et puis, un petit peu par hasard je suis tombé sur une machine qui était une W30 Roland : c’était un clavier sampleur, séquenceur et synthé et j’ai commencé à faire des sons dessus.
D : En 93 tu avais quel âge ?
P : J’avais vingt piges. J’étais passionné de rap depuis très longtemps et j’ai donc commencé à faire ça, à faire des sons là dessus. En fait c’est un pote qui l’avait, il ne savait pas s’en servir, et il le laissait un peu trainer, donc je lui ai dis vas-y passe moi le donc je me suis pris un peu la tête dessus et j’ai commencé comme cela.
D : nous avons donc abordé tes tout débuts, et ensuite que s’est il passé entre 1993 et aujourd’hui ?
P : Je commençais déjà à faire des sons pour les mecs de la FF qui n’étaient pas encore les mecs de la FF. Il y avait deux crews on va dire : un crew avec Le Rat et Menzo et un crew avec Choa et Sat. Mais c’était quand même deux crews qui étaient tout le temps ensemble. En fait cela n’a pas duré très longtemps la séparation des deux formations : nous on a eu notre premier concert en décembre 1994 : donc la formation/ réunion sous le nom Fonky Family a été assez rapide. D’ailleurs, tu me disais que tu étais allé voir Stress, cela a été la première partie de Sens Unik : notre premier concert à Marseille. Et donc voila, à partir de là, un petit peu l’élément commun aux deux équipes étaient Djel et moi, qui étions Dj et beatmaker pour les deux, ensuite les choses se sont enchainées assez rapidement : les concerts, les micros ouverts…
D : qu’est ce qui a fait qu’il y a eu une émergence de la FF ? C’est la connexion avec AKH et Coté Obscur ?
P : Oui tout à fait puisque je pense que le gros coup de turbo c’est bien sur « Bad Boys de Marseille » : c’est clair…
D : C’était en quelle année ?
P : en 1996 : donc voila : en fait il y avait un endroit qui existe toujours qui s’appelle le Café Julien, qui est collé à l’espace Julien qui est une salle de concert assez important sur Marseille et là bas tous les 15 jours 3 semaines, il y avait une soirée un peu micro ouvert : il y avait un peu toutes les équipes de Marseille, et nous y étions tout le temps : c’était des potes à nous qui organisaient ça. Un soir il s’est trouvé qu’il y avait les gars d’IAM qui étaient là, que Djel connaissait un petit peu mais qu’on ne connaissait pas vraiment et donc Akhenaton est venu nous voir après notre sortie de scène et nous a de suite proposé un feat : c’est allé super vite, on ne le connaissait pas : c’était mortel. Nous quand il est venu nous voir on était super content. Et deux jours après il était chez moi parce qu’on bossait beaucoup chez moi à Belsunce, et deux jours après il était là pour écrire Bad Boys de Marseille etça s’est super vite enchainé, ils sont allé enregistrer à Capri Digital en Italie, et puis ils ont enchainé le clip à New York : cela a été très rapide.
D : donc l’instru est de toi ?
P : Non l’instru est d’Akhénaton, puisque c’est son album (solo) : cela s’est donc vite enchainé, le morceau a eu le succès qu’on lui connait : qui nous a vraiment propulsé au devant de la scène rap française.
D : Après Bad Boys, grosse explosion, gros buzz, et premier album « Inch Allah » ; comment s’est passé cet album là : car c’est là que ton rôle devient primordial : puisque c’est toi qui va composer 100% des instrus de l’album avec une touche que l’on ne retrouve plus forcément aujourd’hui : une touche donc assez soul, assez douce en fait. 100% des instrus cela fait quand même beaucoup à faire car il y avait bien 18 ou 19 morceaux : comment s’est donc passé l’élaboration de ce premier projet ?
P : tu sais nous on avais déjà empilés pas mal de morceaux avec les années passées : avec les un ou deux ans avant l’entrée en studio pour « Si Dieu veut » on avait déjà pas mal de trucs, moi c’était une époque où je bossais 17-18 heures par jours les instrus, vraiment comme un malade, avec toujours la passion comme moteur, et on bossait tous ensemble, il y avait des gros travailleurs au niveau du rap : j’avais quatre Mcs qui étaient très demandeurs…
D : cela te boostait aussi ? Il y avait une émulation entre vous ?
P : oui tout à fait, on est 5 plus Djel et Fel : qui sont du départ, avec Fel qui à la base avait d’abord un rôle de danseur, et qui ensuite est devenu un petit peu Mc, un petit peu là aussi pour conseiller tout le monde, qui s’est un peu repositionné quand il a arrêté de danser et puis on avait aussi notre manager Fafa qui était un pote avant tout.
D : On est sur ce premier album : comment te définissais tu à l’époque : le beat maker ne plait pas à tous les producteurs :
P : Moi beatmaker cela me va bien, producteur en France cela a quand même deux sens, alors producteur au sens américain. Quand tu dis en France je suis producteur c’est plus perçu comme quelqu’un qui paie, et cela n’a jamais été mon cas : je n’ai pas investi des sous : c’est pour ca que Beatmaker me va bien, et en même temps de dire que je suis compositeur musicien, cela me dérange un petit peu, parce que je ne suis pas musicien.
D : Tu n’es pas musicien car tu n’as pas fait de solfège, tu n’as pas forcément eu d’éducation musicale ?
P : Je ne sais jouer d’aucun instrument, j’ai deux trois bases si tu veux, mais je suis incapable de jouer un morceau piano comme cela. Je compose comme je pense beaucoup de Beatmaker, avec aucune base de solfège mais avec une bonne oreille musicale : c’est pour ca que le terme de compositeur, musicien, je ne vais pas te sortir la phrase pompeuse « que cela serait une insulte à ceux qui sont vraiment musiciens »
D : tu ne te considère donc pas comme un « vrai musicien » ?
P : j’aimerai, je fais de la musique mais à l’oreille du plus grand nombre, de dire je suis musicien moi personnellement …
D : tu restes humble par rapport à ça.
P : ce n’est pas de l’humilité, mais c’est la réalité : si je suis musicien, alors tiens prends un guitare et fais nous un truc : moi je ne sais pas : je sais faire des morceaux, je sais quand ça marche, je sais quand ca tourne, je sais quand si c’est faux ou juste, j’arrive à savoir si cela est majeur ou mineur, … mais je suis à des années lumières du virtuose.
D : Pour revenir au niveau de tes productions, sur le premier album il y avait une certaine uniformité : je pense que tu as voulu garder une touche assez uniforme : qu’est ce qui t’inspirait : pourquoi es tu parti dans cette musicalité, cette teinte sonore là ?
P : Ce sont beaucoup d’influence en fait, essentiellement la musique américaine autant rap, depuis les années 70, soul, funk, essentiellement soul à cette époque là, c’est vrai que je n’ai jamais été autant motivé qu’en écoutant un gros morceau de Barry White ou d’Isaac Hayes,ou de rap aussi : à l’époque on va dire que c’était les gros trucs comme Mobb Deep, Wu Tang, Pete Rock, tout ce « revival » New-Yorkais qui sont arrivés là au début des années 90 : on sortait des Public Enemy, un petit peu d’une musique qui faisait beaucoup de bruit, qui était super intéressante, mais ils sont arrivés en 91-92 Tribe Called Quest, Pete Rock, avec des gens qui pour moi ont poser les piliers des années 90. Pour moi quelqu’un comme Pete Rock est celui qui a amené la simplicité dans la musique : il y avait juste une charley, une caisse claire : ce n’était pas… des gens comme EPMD m’ont beaucoup motivé aussi : ca reste surtout sur la période 1989-90 : j’ai presque tendance à dire que c’est pour moi le plus grand groupe de rap qu’il y a eu, parce que quand tu écoutes les albums qu’ils ont fait en 88 ou 89 : les mecs rappent comme ça maintenant : si tu écoutes ce que fait Sermon il rappe toujours pareil, c’est vrai avec Rakim aussi, avec SlickRics aussi, les mecs sont arrivés avec un rap simple. Je pense que si tu enlève EPMD, RAKIM, tout ce qui est Mobb Deep, Nas, du rap simple du coup je ne sais pas si cela serait sorti : et je pense surtout à EPMD car pour moi c’était énorme. Mais il y en a tellement en même temps, mais pour en revenir à ta question, c’est surtout des trucs comme cela qui m’ont motivé et de vieux morceaux : en fait je ne sais pas si cela se dit, mais la grandeur avec laquelle certains musiciens des années 70 voyaient la musique. J’ai l’impression que j’ai perçu cela, j’ai l’impression que c’était trop sérieux pour le truc :D : donc toi tu préfères ce coté un peu simplicité, pureté,
P : Oui, en même temps je ne sais pas si les sons que je faisais étaient simples et purs, mais en même temps il y a des choses qui sont complexes mais qui sont mortelles : mais vraiment moi j’ai été choqué par le sérieux avec lequel les mecs attaquaient cela : comme Isaac Hayes, Curtis Mayfield, … quand tu écoutes le travail qu’ils ont fait tu te dis putain les mecs, c’était leur vie : c’était un truc de malade la façon dont ils envisageaient les choses : et ça ca été non seulement une source de motivation, mais cela a été aussi le fait de me dire de ne pas faire le con.
D : ce vers quoi tu veux tendre est un travail abouti,qui se satisfasse pleinement
P : oui c’est ce que j’ai essayé de faire : quelque chose sur lequel j’ai mis du temps et de ne rien avoir à regretter dedans. Pour parler de cet album (Si Dieu veut) je ne regrette rien : je ne peux rien regretter : j’ai tellement passé d’heures derrière les machines que c’est impossible de regretter quoi que ce soit. Après que l’on aime ou que l’on aime pas ce n’est pas mon problème, mais moi personnellement j’y suis allé.
D : On a beaucoup parlé du premier album, est ce qu’a cette période tu faisais 100% des prods de la FF ou tu proposais déjà des prods à d’autres personnes :P : à cette époque là, je devais peut être un peu proposer des choses à deux trois groupes qui gravitaient autour de nous, mais pas plus que ça. J’étais quand même beaucoup là avec la FF. C ‘est sur qu’après « Si Dieu Veut », il y a eu une petite demande quand même, mais avant si tu veux, vu que Bad Boys de Marseille n’était pas mon son, on ne connaissait pas encore mon travail, donc c’est surtout venu après que j’ai commencé à travailler avec d’autres personnes hors de Marseille et sur Marseille bien sur.
D : et du coup quand est ce que tu as commencé à proposer des sons à des gens un peu moins connus et à des « têtes d’affiches » autres des gens de la FF ?
P : des têtes d’affiches : il y a eu 113 avec lequel j’ai fait le morceau « Hold Up », c’est le premier morceau de 113 qui a bien tourné : c’est un truc dont je suis assez fier, car ce sont des mecs que j’apprécie beaucoup, je pense que c’est réciproque, et on est toujours en contact. J’ai aussi bossé pour des gens dans l’équipe comme ROHFF, avec le son « Dawa ». Après j’avais aussi fait un morceau pour DIAMS : c’était « Evasion » avec China. Et sur Marseille, un petit peu tout le monde.
D : Que s’est il passé après l’album « Inch Allah » ? pour la FF, pour toi : il y a eu des best of, des live, après il y a eu le deuxième album « Art de rue » sur lequel on vous sentait encore très motivés, et là sur cet album tu étais aussi à 100% sur les prods ?
P : j’ai fais la grosse majorité des sons : il y 4 ou 5 morceaux qui ont été réalisés par Le Rat : qui commençait.
D : Qui a commencé aussi sur son album solo « Mode de vie béton style »
P : L’album du Ratétait avant et par contre sur son album c’est moi qui ai fabriqué toutes les prods, sauf une pardon qui était de Djel. Mais le Rat mais en fait des sons depuis aussi longtemps que moi. Il a toujours fait du son.
D : Mais alors quoi il n’était pas encore sur de lui ?
P : Non mais il était vraiment concentré sur le rap, sur l’écriture, sur le micro, sur sa partie.
D : Derrière donc sur Art de rue, vous êtes encore motivé, toi tu as voulu apporter autre chose, dans tes morceaux , tu étais plus électro, un peu plus moderne, apporter d’autres touches, avec par exemple le morceau « Art de rue », mais aussi d’autres morceaux.Cet album là t’a t’il aussi marqué que le premier et qu’est ce qui t’a alors influencé?
P : Moi j’ai toujours été influencépar ce que tout le monde écoutait : la musique que tu avais quand tu étais adolescent : les années 80 et tout ça et donc j’ai toujours samplé des trucs des années 80 de toute façon, et c’est vrai que dans cet album c’est un peu plus ressorti : on avait des titres qui nous plaisaient et qui étaient vraiment issus de tout ça ! J’avais vraiment commencé à pousser ce délire sur l’album du Rat qui est sorti en 2000. C’est vrai que beaucoup me l’on dit que c’était beaucoup années 80, le délire et tout et ce n’était pas quelque chose de vraiment voulu, mais cela me plaisait et je trouvais que cela apportait de l’originalité à une époque ou on samplait beaucoup de choses des années 70, du Funk, de la Soul. Cela s’est fait naturellement. En plus j’avais un stock de plus de 2000 ou 3000 disques des années 80 que j’avais récupéré d’une radio qui avait fermé.
D : tu as donc étudié tes 2000 galettes et tu as trouvé ton bonheur (rires)
P : j’ai un pote à Toulouse, qui était un gros Dj des ces périodes et tout ça, et qui m’a passé aussi pas mal de disques, pour que je puisse élaborer l’album du Rat et qui est mon pote Moktar de Toulouse et qui était vraiment super riche en disques,et essentiellementdes années 80, mais pas des tubes, mais le post Funk avec des groupes comme Sherelle tous ces trucs des années 83-84 qui étaient un peu dans la mouvance Mickael Jackson qui était riche pour moi au niveau qualité : je trouve que la musique des années 80, en ne la comparant pas avec la musique des années 70, c’était vraiment une période énorme.
Le clip du morceau “Art de rue” :
D : Derrière, on arrive sur le dernier album de la FF en 2006 : « Marginale Musique » : et là comment vous êtes vous sentis par rapport à cet album ? Moi sincèrement et parce que je vous ai suivi depuis le début, on sent déjà un essoufflement : tu le prends peut-être mal, comment vois tu cela ?
P : Je ne le prends pas mal du tout, déjà il faut savoir que cet album a été très compliqué à réalisé, en studio, beaucoup de morceaux, pas super content des morceaux, on avait peut être une trentaine, une quarantaine de morceaux, donc difficile de choisir, pas l’étincelle, pas le truc… pourtant on était bien, on était tous dans une super ambiance, mais à un moment donné, je ne dirais pas que « le ressort était cassé », mais moi personnellement ce n’est pas un album qui m’a plu artistiquement, cela peut peut-être choquer certaines personnes. Je ne considère pas que ce soit un bon album. C’est un album qui a certainement plu à « nos fans », qui nous soutiennent et que je remercie encore, mais je ne considère pas cet album comme un bon album.
D : Avec du recul je trouve qu’il est moins abouti, qu’il est moins intéressant et on ne sent plus le ….
P : c’est beaucoup plus formaté …
D : les deux premiers et surtout le premier restera dans les annales
P : je pense que le premier nous avons fait de la musique et sur Marginale Musique nous avons fait du rap. J’ai toujours ce discours qu’on fait de la musique et pas juste du rap ! Je pense que c’est important de garder cette ligne directrice : c’est la musique qui reste dans la tête : ce n’est pas le rap. Si le rappeur dessus est mortel….quand je dis la musique, je ne parle pas que du beat.
D : tu parles de l’ensemble?
P : Je parle de l’ensemble : c’est bien beau d’avoir un discours mais dans dix ans qu’est ce qu’il restera de ça ?Moi j’ai toujours eu à l’esprit et ceci assez inconsciemment, j’ai toujours été choqué par la musique. Aussi petit que je me rappelle : la musique m’a toujours choquée, quand j’avais 5, 6 ans…
D : quand tu dis choqué, c’est que la musique t’a interpellé, intéressé, qu’elle a dégagé quelque chose chez toi?
P : Ca m’interpelait vraiment et au plus haut point, c’est à dire que j’entendais des trucs et je me disais, mais comment font les gens pour faire ça, je n’avais pas cette analyse, mais je me rappelle très bien des morceaux, que cela soit les premiers Mickael Jackson, que cela soit les tubes qui sont peut-être ridicules à entendre maintenant, mais ca m’a toujours choqué. Et c’est peut-être pour ça que j’ai un peu ce discours maintenant qui est qu’on fait de la musique.
D : Si tu avais 20 ans en 1993, quel age as-tu aujourd’hui ?
P : 36 ans
D : c’est sans doute ce qui explique ton discours plus mature ?
P : Cela a certainement à voir (rires)
D : C’est une bonne transition, quels sont tes projets,
Mais avant tes projets, on sent que vous n’allez plus reformer la FF, peux tu nous confirmer cela ? Il n’y a plus l’étincelle, sauf si vous avez un jour un éclair, que vous retrouvez une direction commune, Sat fait ses deux projets solo, Choa lui aussi ses deux, le Rat un premier et un second qui arrive bientôt et qu’on attend pour beaucoup avec beaucoup d’impatience. Sais tu d’ailleurs que Le Rat est considéré par un grand nombre comme l’un des meilleurs et qu’il est très respecté ?
P : Je pense à juste titre, tu sais quand tu es bon, ça se voit, c’est comme quand tu es mauvais, cela se voit aussi (rires) quand tu es bon tu peux faire ce que tu veux, tu restera bon, je pense que Le Rat c’est un des meilleurs de sa génération, voir le meilleur, j’ai regardé un truc la dernière fois, Streetlive ou Akhénaton dit que c’est le meilleur : et moi bon c’est vrai que je suis peut être un peu partial dans cette affaire, mais pour moi il fait parti en France des meilleurs ;D : c’est ce que beaucoup des gens que j’ai pu rencontrer (Rappeurs, Djs, acteurs, fans…) m’ont affirmé. C’est quelqu’un dont le nom ressort toujours.
P : Je pense que déjà ce qu’il a fait avec nos albums dans les années 90 a quand même marqué, beaucoup de gens l’ont vu en live et c’est une bête de scène, et aussi son album (le premier) reste quand même quelque chose d’énorme même si je ne devrai pas trop dire ca puisque j’ai fait l’intégralité des prods, mais ca reste pour moi un album intemporel : j’ai au moins une fois par semaine quelqu’un qui me dit putxx, j’ai écouté l’album du Rat hier et je connais des gens qui ont l’album dans leur voiture et qui bloquent encore dessus.
D : On a brossé l’ensemble de ta carrière de tes débuts d’avant la FF, à la fin de la FF et depuis 2006, que fais tu et quels sont tes projets actuellement ?
P : Déjà je fais toujours du son, c’est sur que j’en fais moins qu’avant, mais j’en fait toujours, j’ai une vie personnelle qui s’est développée : je me suis marié, je suis père de famille avec un enfant. J’ai des artistes avec lequels je travaille, sur leur projet que cela soit en tant que beatmaker ou en tant que réalisateur : un petit peu tout cela. J’ai aussi d’autres activités on va dire plus extra-musicales : j’organise un petit peu des soirées, je suis dans l’édition, c’est toujours lié à la musique, dans la production je suis associé à d’autres personnes. J’arrive à avoir mes journées bien remplies.
D : au niveau des prods que tu fais : à qui les propose tu ?
P : je propose assez rarement, mais j’ai tout le temps des demandes, que cela soit des gens de Marseille ou d’ailleurs, et quelque part ce n’est pas plus mal que j’ai moins de demandes, car je produits moins, j’ai moins de temps pour produire. Peut être que si j’avais encore plus de demandes je produirai plus, mais cela me va comme cela.
D : On parlait de l’album du Rat, t’a t’il demandé quelques prods, ou va-t’il les faire toutes ?
P : Non il a fait plus que de me demander une ou deux fois, je lui en ai fait.
D : donc il y aura des prods à toi sur son prochain album ?
P : J’espère, mais le Rat est quelqu’un qui est assez difficile, dans ses choix musicaux et c’est tout à son honneur : donc c’est toujours assez délicat et surtout ce qu’il y a c’est que lui même fait des prods qui sont mortelles.
D : Le Rat fait attention aux sons qu’il prend ; il est difficile, Flynt est comme cela aussi et cela est sans doute le cas pour ceux qui ont une belle plume, et derrière tes autres projets : aujourd’hui chez toi un de tes artistes est ici : JLONE : peux tu nous en parler ?
P : JLONE est quelqu’un qu’on développe gentillement. Il y a des artistes avec lesquels je suis assez proche, commeMik DElit qui sont un groupe du centre ville (http://www.myspace.com/mikdelit), il y a tout un tas de petits jeunes qui savent que quand ils ont besoin de moi je suis là. Que cela soit pour des prods ou pour des conseils avec le peu que je sais de l’industrie de la musique, bon voila, je suis toujours sur le terrain.
D : tu es à la disposition des gens s’ils ont besoin de toi ?
P : à disposition c’est beaucoup dire, mais je suis là.
D : Cela veut dire que quand tu as de « petits groupes » qui viennent te voir tu ne vas pas forcément leur facturer un prix démentiel, tu peux adapter tes prods
P : en fait je facture mes instrus, mais c’est sur que si ce sont des gens comme ceux dont je viens de parler avec qui je suis plus impliqué, au niveau musical et aussi parce que ce sont des mecs de mon quartier je ne facture rien du tout, mais c’est vrai que souvent on me demande des prods par le biais d’internet et là je fais payer et tout simplement parce que je me suis rendu compte que si tu ne fais pas payer déjà le mec s’en fout, mais cela m’est déjà arrivé de filer des prods a des mecs assez connus, voir très connus et si tu veux un an après je n’ai toujours pas de nouvelles, et ce qui est emmerdant c’est que moi dans ma tête, je me dis que ces prods là sont bloquées : et ça m’est arrivé il n’y a pas longtemps ou par hasard je faisais écouter des prods qui étaient déjà « bloquées » et le mec m’a dit je la veux, je la veux et je lui ai dis non elle est bloquée : et en fait le mec pour qui je l’avais bloqué ne l’a jamais utilisé, et je n’ai plus eu de nouvelles. Donc à partir du moment ou tu payes, symboliquement tu vas te dire « je ne suis pas un con, je n’ai pas payé pour rien ». C’est avant tout pour ca : moi alors je la retire du marché, elle devient exclusive, mais prend là, fais en quelque chose.
D : Aujourd’hui as tu quelque chose à dire sur le « rap game », sur l’industrie du disque, sur le Hip-Hop en général, qui a aujourd’hui à mon sens beaucoup disparu car les « plus jeunes », ce n’est pas péjoratif, mais ces derniers connaissent le rap mais pas forcément les autres piliers/parties du Hip-Hop.
P : c’est comme ça : moi je pense que c’est bien : je ne suis pas le mec qui va te dire « c’était mieux avant », c’est comme ça, cela a évoluer. Nous aussi quand on a commencé, il y avait des gens qui avaient le même discours, oui ils font du rap mais ils ne connaissent pas … c’est pas grave : tu arrives, tu prends ce qu’il y a à prendre, de toute façon le rap, le Hip-Hop en général a été victime de son succès et bon forcément qui dit succès dit argent, dit enjeux, dit machin, dit truc, dit formatage, et c’est comme ça. La phase de mutation est arrivée au stade que c’est une musique qui est mondiale et qui est majeure et qui est partout… Hip Hop For Ever !
Retrouvez Pone sur son myspace : http://www.myspace.com/pone13
Interview réalisé pour HipHop4ever chez Pone à Marseille, non loin du vieux port! Il est bon d’être dans le Sud, bande de veinards ! Merci à Pone et à son collègue pour leur accueil !
Le W30…