Fin du 20ème siècle. Une équipe de scientifique explore l’épave du Titanic, à la recherche d’un trésor. Une vieille femme se manifeste : elle serait une des survivantes du naufrage…
Southampton, 1912. Le Titanic, plus grand et plus somptueux paquebot du monde, s’apprête à faire son premier voyage, à travers l’Atlantique. Jack Dawson et son ami Fabrizio gagnent au poker des billets de troisième classe pour le voyage, tandis que la jeune Rose Dewitt Bukater embarque en première en compagnie de sa mère et de son fiancée, desquels elle ne peut se soustraire. Les routes de Jack et de Rose vont se croiser, jusqu’à la nuit fatidique du 14 avril.
On ne présente plus ce film, bien entendu, qui faisait scandale avant sa sortie par son coût de tournage (200 millions de dollars de budget, colossal), et qui a été ensuite connu pour ses records en termes d’entrées et de recettes, ainsi que pour la « Titanicmania» qui s’ensuivit.
Le film est, aujourd’hui encore, le premier du box office mondial, si l’on ne prend pas en compte l’inflation ; en effet, si on réajuste les choses avec l’évolution du dollar, c’est Autant en emporte le vent qui détient toujours son incroyable record. Pour en savoir plus sur le box office américain, vous pouvez visiter ce site ; pour le box-office mondial, un détour sur cette page wikipédia donne quelques classements.
J’étais dans la salle le 7 janvier 1998 en début d’après-midi ; j’attendais un peu le film, curieuse de l’entreprise mais plus ou moins prête à voir une catastrophe (le film, pas celle du bateau). J’en suis ressortie relativement bouleversée, avec cette sensation d’avoir vu quelque chose d’immense. J’y retournerai 4 fois en salle (dont une fois pour la ressortie anniversaire en janvier 99), non par fanatisme extrême, mais parce que j’avais la sensation qu’il fallait profiter des conditions qu’offre une salle de cinéma pour voir ce film-là.
Aujourd’hui, après une revision en DVD (je l’avais déjà revu en VHS plusieurs fois il y a longtemps), je ne peux que confirmer cette sensation, malgré un beau, grand et large écran plasma. Rien ne vaudra jamais les impressions ressenties en salle : le son englobant, venant de toutes parts, depuis les craquements de la coque jusqu’au grondement des machines, en passant par les cris des survivants dans le silence de la mer glacée. La lumière, omniprésente et d’autant plus importante une fois que l’électricité est coupée et que les personnages plongent dans le noir. Cette sensation, enfin, d’être embarquée dans cette salle, comme les personnages sur ce bateau.
Même si je mets une note maximale à ce film, je lui reconnais quelques défauts. Un manichéisme manifeste, tout d’abord, dont je suis consciente, mais qui ne me dérange pas, dans la mesure où les personnages « méchants» (Cal en premier lieu, incarné par Billy Zane, et la mère de Rose, Frances Fisher) sont surtout là en tant qu’archétypes, pour placer les enjeux, pour mieux dessiner en contrepoint Rose et Jack, et pour faire avancer l’intrigue. Quelques scènes techniquement moins élégantes, aussi (déjà à l’époque, je trouvais la scène où Rose s’apprête à se jeter à la mer mal éclairée, et Kate Winslet mal maquillée ; et la buée sortant de la bouche des personnages est toujours aussi visiblement artificielle), quelques détails erronés et/ou anachroniques (les tableaux de Degas, Monet et Picasso) et enfin quelques dialogues un peu plats.
Malgré tout cela, il y a beaucoup de chose que j’adore.
La construction en flashback permet de construire beaucoup de choses. En particulier, l’idée qui est peut-être la plus géniale du film : montrer le naufrage et son déroulement, en images de synthèse, quasiment au tout début du film. On sait d’emblée comment ça va se passer, on sait comment le bateau va se comporter, et comment il va couler en deux temps. Et combien c’est tout le reste que James Cameron veut nous montrer. De plus, une fois l’iceberg touché, on se rappelle de la séquence, on sait ce qui se passe, précisément, et combien tout est inéluctable.
Le personnage de Rose ensuite, interprété par une Kate Winslet que je ne connaissais alors que de nom (elle avait pourtant déjà tourné dans Créatures Célestes de Peter Jackson, Raison et sentiments de Ang Lee, Jude de Michael Winterbottom et Hamlet de Kenneth Branagh) et qui m’avait frappée par son talent, sa sensibilité et son physique un peu en-dehors des canons contemporains (elle y correspond beaucoup plus de nos jours, d’ailleurs…) Elle est le centre de tout, la base du film. « Il m’a sauvée de toutes les façons qu’une personne peut être sauvée» . C’est ça la véritable histoire : la naissance de cette femme – baptisée par la pluie new-yorkaise après son sauvetage. Que Rose soit riche n’est pas le plus important ; l’essentiel est sa condition de prisonnière, et le fait que sa rencontre avec Jack lui permet de se révéler et de se libérer d’elle-même.
Leonardo Di Caprio, qui s’est révélé être non seulement l’idole des jeunes filles et des petites filles, mais aussi un acteur habile, a ici encore quelques coquetteries de jeunesse (qui lui arrive de reproduire encore aujourd’hui quand il est mal dirigé : froncements intempestifs de sourcils, lèvre inférieure mollasse…) et est peut-être un tout petit peu moins bon que sa partenaire, mais il reste excellent, et surtout, l’alchimie entre les deux est vraiment là, comme on a encore pu le voir cette année à l’occasion de leur « réunion» sur Les Noces rebelles.
A côté de cela, il y a quelques personnages secondaires vraiment marquants : Molly Brown (Kathy Bates) bien sûr ; le capitaine (Bernard Hill), son souci discret, puis manifeste, et sa scène finale ; Mr Andrews (Victor Garber – Mr Bristow dans « Alias» ), brillant et désespéré, bouleversant dans ses derniers moments, face à la pendule du grand salon ; le fat et lâche Mr Ismay, et sa honte dans le canot de sauvetage ; l’officier Lowe (Ioan Gruffudd), son courage et son intégrité – sa réplique en VF (eh oui, à l’époque je n’avais pas de salle VO accessible) « Y’a-t-il quelqu’un de vivant ? Est-ce que quelqu’un m’entend ?» est encore gravée dans mon esprit ; et puis les musiciens, dont la scène finale est très (trop) lyrique, mais marche toujours sur moi avec la même force, sur grand ou petit écran.
Et puis, beaucoup d’images, magnifiques, composés comme des tableaux : un visage de poupée au fond de l’eau ; le paquebot isolé sur l’océan, en pleine nuit ; les immenses mécanismes en salle des machines ; l’enchaînement de plans montrant des couples et des familles en troisième classe, attendant la mort à leur manière ; la descente aux enfers de Bruce Ismay. Une vraie et belle mise en scène, qui se met totalement au service de son sujet – et non l’inverse.
J’ai surtout parlé de la deuxième partie du film ; mais la première partie, plus calme, plus lumineuse, est évidemment essentielle. Elle peut paraître, sur le papier, hors sujet. Mais tout ce temps passé avec les personnages principaux permet de donner de la chair et de l’émotion à toute la suite ; c’est d’avoir suivi et aimé Jack, Rose et les autres pendant une heure et demie qui nous permet de vraiment prendre la mesure humaine d’une telle tragédie. C’est ça aussi, le grand coup de génie de Cameron : mélanger intimement l’immense et le tout petit.
Ce récit est tellement abouti, riche et efficace, que même certains spectateurs cyniques peuvent aimer Titanic (même si l’histoire d’amour soulèvera toujours de l’écœurement, par nature, et, à mon avis, à tort.)
Pour moi enfin, la dernière réussite du film est dans sa portée mythique. On allait le voir, à l’époque, avec un lieu commun en tête, une histoire que tout le monde connaissait (» On n’ira pas, on connaît la fin» , lançaient en masse les plaisantins). James Cameron nous a fait comprendre et ressentir ce que pouvait être réellement ce naufrage.
Et a fait passer le mot Titanic de synonyme d’échec lamentable à celui de succès mondial….